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« Liberté, Liberté »

Selon les déclarations mardi de Samdhong Rinpoche, Premier ministre du gouvernement tibétain en exil en Inde, environ 140 personnes ont été tuées par le bras armé du gouvernement communiste chinois lors des récentes manifestations au Tibet. C’est dans ce contexte que la cérémonie au cours de laquelle la flamme des Jeux Olympiques de Pékin était allumée à Olympie (Grèce) a été perturbée lundi par trois militants de Reporters sans Frontières (RSF). Une association dont l’indépendance est cependant contestée par certains du fait de son financement par des capitaux gouvernementaux américains, via la fondation National Endowment for Democracy (NED). Le fondateur et dirigeant de RSF, Robert Ménard, était au nombre des trois journalistes qui ont scandé à Olympie « Liberté, Liberté » et déployé une banderole invitant au boycott des JO et au respect des droits de l’Homme. Une action qualifiée de « honteuse » par le ministre chinois des Affaires étrangères. Il ya cinq ans, M. Ménard avait écrit au PDG de Yahoo !, Terry Semel, pour dénoncer l’attitude du célèbre fournisseur d’accès américain qui avait signé « l’engagement public sur l’autodiscipline » exigé par Pékin. Il s’agissait bien évidemment ici de réduire au silence les opposants au régime communiste, et ce avec la complicité d’un des symboles du capitalisme américain… (FDA Quotidien du 05/07/2002). Bref, M. Ménard met ses actes en accord avec ses paroles, ce qui n’est finalement pas si courant, lui qui n’a pas craint à de multiples reprises de s’attirer la foudre des bien-pensants, notamment lorsqu’il avait déclaré qu’il « (descendrait) dans la rue pour défendre la presse FN ».

Mezzo voce

Pour l’heure, les réactions de la diplomatie française ont été plutôt mesurées. Lors de la campagne présidentielle, Nicolas Sarkozy n’avait pas hésité, s’attirant alors les louanges de Bernard-Henry Lévy ou d’un André Glucksman, à clamer sa volonté de rompre avec la Realpolitik, affirmant que la France serait « aux côtés de tous ceux qui sont persécutés par les tyrannies et par les dictatures ». L’exercice du pouvoir a très sensiblement amendé cette posture, les perspectives de juteux contrats commerciaux n’y sont bien évidement pas pour rien, et le Président de la République s’est contenté d’envoyer un message à son homologue chinois Hu Jintao appelant à « la retenue et à la fin des violences par le dialogue au Tibet ». Quant à un éventuel boycott des JO de Pékin, il n’est pas à l’ordre du jour, tout juste un « boycottage partiel », celui de la cérémonie d’ouverture, a-t-il été évoqué. Comme l’a indiqué Bernard Kouchner, en réponse à son ami Jack Lang, « personne ne réclame, surtout pas le dalaï-lama, le boycott des Jeux Olympiques. « Il ne faut pas être plus tibétain que le dalaï-lama » a assuré M. Kouchner. Une position qui est aussi celle de Washington – la Maison Blanche a signifié que les événements au Tibet n’empêcheraient pas M. Bush, pour l’instant silencieux, d’assister aux Jeux Olympiques –, de la Commission européenne, et de la plupart des responsables politiques et sportifs mondiaux.

Mémoire sélective

La situation au Tibet a aussi des répercussions sur la politique intérieure française comme on le voit avec un Alain Juppé, qui, remis en selle par sa victoire à Bordeaux, se sent peut être l’obligation de jouer au donneur de leçon. Visant directement un Nicolas Sarkozy dont la cote de popularité a encore décliné selon les derniers sondages, le vieil ami de Jacques Chirac a critiqué « les responsables occidentaux » qui demandent à la Chine de « tuer avec retenue » au Tibet. « Je suis ébranlé quand je vois l’allant que certains mettent aujourd’hui à pratiquer cette Realpolitik qu’ils fustigeaient tant hier. Il y a des grâces d’Etat. Des disgrâces aussi ». « Sans doute est-il facile de prononcer les paroles justes quand on n’a pas la charge des intérêts d’un peuple. Mais la Chine est si riche ! », note-t-il. Les propos d’un Juppé, mis en ligne sur son blog, auraient certainement était plus convaincants si ce dernier, alors Premier Ministre, avait réagi lorsque Chirac, nous le rappelions dernièrement, n’avait pas hésité à multiplier les gestes d’amitié envers le chef d’Etat chinois Ziemin, sous le règne duquel la persécution anti-tibétaine n’a jamais faibli, allant même jusqu’à l’inviter dans son château de Bity lors de son premier mandat.

Le principe de réalité

Au-delà de l’ère communiste, simple intermède certainement dans l’histoire plurimillénaire de la nation chinoise, il s’agit de rappeler la permanence des réalités géopolitiques telles que les expose Aymeric Chauprade dans son remarquable ouvrage « Géopolitique. Constantes et changements dans l’histoire ». A savoir que « la Chine a toujours tenté de dominer le Tibet, le Xinjiang ou encore la Mongolie » et que les dynasties chinoises « se sont toujours opposées à l’instrumentalisation politique des ethnies périphériques de l’empire – aujourd’hui les Tibétains et les Ouïghours – par leurs ennemis ». Que cette occupation chinoise « vise à empêcher toute tentative étrangère de s’établir sur le Toit du Monde avec l’aide des Tibétains. Car celui qui tient le Tibet peut déferler sur la Chine, l’Inde, le Sinkiang et la Mongolie intérieure. Au-delà des problèmes médiatisés liés aux entorses aux droits de l’Homme dans la région, il faut bien comprendre les raisons géopolitiques de la présence chinoise au Tibet » relevait encore M. Chauprade, région où Pékin a déployé des missiles nucléaires tactiques. Bref contre la politique de force brutale et de réalisme géopolitique menée par Pékin, il est clair que les protestations de la « conscience universelle » s’avèrent largement inopérantes… et insignifiantes aux yeux de ceux qui luttent pour leurs libertés. On rappellera que le boycott des JO de Moscou en 1980, pour protester alors contre l’invasion de l’Afghanistan, n’avait eu aucun résultat et n’avait pas réussi à instaurer plus de libertés dans les pays soumis à la férule soviétique. Et que c’est abrité derrière l’idéologie des droits de l’Homme que le Nouvel ordre mondial a mené sa sanglante croisade contre l’Irak qui a fait d’ores et déjà des centaines de milliers de morts…

Un sarkozyste dans le ton

C’est toujours au nom des « grands principes », de cette idéologie des droits de l’Homme très bien adaptée pour déstructurer les pays occidentaux où elle est née, que le nouveau Secrétaire d’Etat à l’Outre-mer, Yves Jégo a rejeté toute réforme du droit du sol pour les enfants nés à Mayotte de parents immigrés clandestins, qui deviennent ainsi inexpulsables. C’est dans cette île soumise à l’invasion que se trouve la plus grande maternité française… Interrogé mardi sur France O, M. Jégo a qualifié le droit du sol de « grande tradition française ». « C’est un sujet qui mérite beaucoup de respect et qui doit être préservé », a-t-il assené. Et ce, alors même que ce droit du sol, auquel le FN entend substituer le droit de la filiation, contribue largement à alimenter une immigration de peuplement qui menace la pérennité même du peuple français dont, il est vrai, nos dirigeants ont une vision totalement désincarnée…

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