Les semaines qui viennent de s’écouler auront été extrêmement instructives. Nous y aurons appris (si nous ne le pressentions pas déjà) que les engagements extérieurs de la France répondent désormais à des intérêts qui ne sont pas les siens.
Et même qu’ils y sont opposés et que l’Union européenne est devenue une cause de tension, voire de conflit armé, ne serait-ce qu’indirectement.
N’en déplaise à nos gouvernants, nous sommes en guerre en Afghanistan depuis que nous y avons débarqué et nous y sommes considérés par beaucoup comme des occupants et non comme des libérateurs. Il n’y a pas eu en août un subit bouleversement de situation au moment de la mort de ces jeunes militaires courageux, volontaires, qui ont assumé jusqu’au bout leur engagement et les risques qu’ils avaient choisi de prendre. Il n’y a pas de guerre en Afghanistan parce que nos soldats y sont morts : ils sont morts parce qu’il y a la guerre. Et ce n’est pas l’impréparation, la jeunesse ou l’incompétence qui leur ont coûté la vie (ces mots, employés par la classe politique et les médias sonnent comme une insulte à leur mémoire), mais le mensonge sur la nature de leur mission qui a mené à l’inévitable inadéquation entre leur action sur le terrain et la réalité qu’ils allaient y affronter. Les responsables sont ceux qui les ont embarqués dans cette galère, gauche et droite confondues, Chirac Président et Jospin Premier Ministre, en faisant croire qu’il s’agissait de maintien de la paix et de rétablissement d’une démocratie pacifiée n’ayant jamais existé dans ces contrées. Le problème est que ces jeunes gens, engagés au service de la France, sont tombés pour une cause et des intérêts qui ne sont pas ceux de leur patrie, mais ceux des Etats-Unis, qui utilisent l’OTAN comme bras armé collectif de leur politique étrangère.
Deuxième enseignement : l’Union européenne, c’est la guerre. Grâce à la menace d’anéantissement nucléaire mutuel, qui ne lui devait rigoureusement rien, l’Europe de Bruxelles a pu faire croire pendant des années qu’elle était un facteur de paix indispensable sur le continent et François Mitterrand pouvait affirmer en 1992 : « le nationalisme, c’est la guerre ». Mais c’est au contraire la négation du fait national qui a toujours conduit aux conflits armés. C’est la volonté d’expansion de l’OTAN qui a mis le feu aux poudres dans le Caucase. La revendication d’adhésion à l’UE, par des pays que la Russie considère comme particuliers pour sa sécurité, est vécue par les demandeurs comme par Moscou, comme un ancrage définitif à Washington. Car en effet, les traités européens placent clairement la politique étrangère et de sécurité de l’UE sous l’égide des engagements atlantiques de ses membres. Alors qu’il est de l’intérêt de la France, et de l’Europe, d’entretenir d’étroites relations avec leur voisin Russe, nous sommes entraînés contre lui dans des affrontements diplomatiques et peut-être demain pires encore, au nom du maintien de l’ordre mondial unipolaire. Il est vraiment temps de faire autre chose que cette Europe-là.