Il n’est pas question de minorer l’action courageuse des policiers sur le terrain pour endiguer le commerce des stupéfiants, mais nous pouvons douter de la réelle volonté des pouvoirs publics de gagner cette guerre là, tant il est vrai que les cités les plus calmes sont aussi parfois celles où le trafic est le plus florissant. Chacun sait très bien que le désordre n’est « pas bon pour le commerce » et les cyniques qui nous dirigent savent aussi qu’éradiquer totalement, du moins autant que faire se peut, les points de vente de la drogue dans les banlieues, menacerait la « paix civile ».
Pour les mêmes raisons sociales et économiques, un pays comme le Maroc, premier producteur de la résine de cannabis consommé en Europe, ne se donne pas vraiment les moyens d’en finir avec cette « agriculture » là qui fait vivre toute la région du Rif et engraisse beaucoup de monde. Et les molles admonestations de l’UE n’y changent rien…
Au lendemain des émeutes de 2005, le site Polemia notait que « la première opinion qui court sur les banlieues consiste à opposer populations tranquilles et jeunes délinquants, et, au sein de ceux-ci, à distinguer les petits délinquants des gros trafiquants . La réalité est autre : c’est la connexion du business entre les gros trafiquants et les petits délinquants – qui servent de vigies et de passeurs aux premiers – et le fait que le bénéfice des trafics, gros ou petits, profite à une partie importante de la population des cités en termes de redistribution des revenus, dans les cercles familiaux et claniques, des emplois à partir des entreprises et des commerces créés avec l’argent des trafics, sans même parler des aumônes versées à certains imams qui permettent le développement d’un islamisme militant et souvent radical ».
« Les trafics d’ailleurs, ce ne sont pas seulement les trafics de drogue était-il justement indiqué, ce sont aussi les trafics de cigarettes, les trafics de jeux, le racket et les vols avec ou sans violence : chacun trouvant ensuite son intérêt à acquérir – à bon marché – auprès des receleurs les biens de consommation du monde moderne pour soi-même et ses proches ou pour en faire bénéficier le pays d’origine à l’occasion des vacances d’été : les véhicules lourdement chargés qui prennent en juillet la route du Sud ne transportent pas uniquement des objets payés avec factures… ».
« Certes, précisait Polemia, il serait injuste de dire que 100 % d’une cité vit ainsi ; mais il est parfaitement illusoire de faire semblant de croire que cela ne concerne que quelques pour cent des habitants des cités les plus chaudes ».