Coincée entre le désir de montrer à son électorat qu’il prend en compte la réalité, à savoir le lien entre immigration et insécurité –deux thèmes qui seront encore au cœur, n’en doutons pas, de la prochaine campagne présidentielle- et la poursuite, mezzo voce, d’une politique migratoire soutenue relayée par la mise en place accélérée de la discrimination positive, l’UMP se doit de résoudre la quadrature du cercle.
Ce double langage du parti au pouvoir s’est encore vérifié pleinement à l’occasion du dîner de clôture du jeûne du ramadan au Pavillon Dauphine mardi dernier, organisé sous la tutelle de Mohamed Moussaoui, président du Conseil français du culte musulman (CFCM). parmi les personnalités présentes, « que du beau linge » : Brice Hortefeux, Eric Besson, Fadela Amara et Nadine Morano, les socialistes Jean-Paul Huchon, et Claude Bartolone, de nombreux préfets, le cardinal Vingt-Trois, archevêque de Paris, président de la Conférence épiscopale, le pasteur Claude Baty, président de la Fédération protestante de France, les Grands Rabbins de France et de Paris, les présidents des Consistoires central et de Paris, le président du Fonds social juif unifié, en encore Richard Prasquier, président du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF).
Sur le site Polémia, Guillaume Bénec’h a parfaitement analysé la posture victimaire qui a été celle de M Moussaoui dans son discours. Surtout, il a relevé que derrière la condamnation rituelle du communautarisme et les invocations sacrées de la « République » et de la « laïcité » par M. Hortefeux, la volonté de céder aux exigences religieuses du CFCM.
Il est encore relevé que le CRIF, son « organisation » et ses « méthodes », « servent de référence et de modèle pour le CFCM ». M. Moussaoui a ainsi « remercié Brice Hortefeux de la signature, le 17 juin dernier, d’une Convention-cadre entre le ministère de l’Intérieur et le CFCM, convention qui porte sur la mise en œuvre d’un suivi opérationnel et statistique des actes antimusulmans à l’instar de ce qui existe déjà pour les actes antisémites (…). Pour l’alimentation halal, Mohammed Moussaoui a tenu à réaffirmer que le soutien des pouvoirs publics et l’action concertée avec le Consistoire central (juif) nous ont permis, après de longues batailles, de défendre au niveau européen l’abattage rituel» – «le gouvernement français s’est opposé à la norme halal autrichienne qui prévoit l’étourdissement de l’animal avant égorgement ».
La question qui mérite aussi d’être posée est celle de la légitimité du CFCM à parler au nom des musulmans français et étrangers présents en France. L’important étant d’être capable, par une opération de sidération des esprits dont les medias se rendent plus ou moins volontairement complices, d’être appréhendé comme le porte-parole incontournable d’une « communauté ».
Un électeur frontiste d’origine musulmane, qui conteste totalement le droit du CFCM à parler en son nom, nous a rappelés ce jugement sur le Crif d’Esther Benbassa, titulaire de la chaire d’histoire du judaïsme moderne à l’Ecole pratique des hautes Etudes. Un jugement qui s’applique pleinement au CFCM créé par Sarkozy ; une critique du Crif formulée pareillement par un grand nombre d’électeurs frontistes de confession ou d’origine juive.
« Mais qui représente véritablement le Crif et combien sont-ils en son sein ? s’interroge Mme Benbassa. On ne le saura jamais. Ce qui compte, c’est qu’il est perçu comme un lobby (mot horripilant en France) par les politiciens. Et considéré comme tel, il l’est bien, un lobby, en fait. Ceux qui s’agglutinent à son dîner croient vraiment qu’il joue un rôle important dans la machine électorale. On y vient à la pêche aux voix juives, et pour être adoubé par des juifs dont l’influence serait déterminante, en raison de la place qu’ils occupent, ou sont censés occuper, dans la société française ».
C’est bien au même calcul indigne auquel les partis du système se livrent vis-à-vis des électeurs musulmans dont le poids électoral grandissant excite bien des appétits, au risque de tomber de haut…