Réagissant samedi lors d’une conférence de presse à Lille à ce sondage, Marine Le Pen a estimé, à juste titre, qu’il s’agit d’appréhender les sondages «avec beaucoup de recul». Pour autant elle a dit espérer « qu’on assiste là aux prémices d’un réveil du peuple français (…). Les Français aspirent à une autre politique, ils ont envie de se donner un véritable choix au second tour : le choix entre un projet national, et un projet mondialiste qui peut être représenté soit par Nicolas Sarkozy, soit par Dominique Strauss-Kahn ou par Martine Aubry ».
«Il existe une courbe qui me laisse penser que de toutes façons Nicolas Sarkozy perdra cette élection présidentielle. Je pense qu’il ne remontera pas la pente. Il se cristallise sur lui une telle déception et un tel rejet de la part du peuple français que je pense que d’ores et déjà il est presque éliminé de ce second tour», a-t-elle affirmé.
Les enquêtes tentent en effet à démontrer qu’à rebours du scénario de 2007, qui avait vu une large fraction de l’électorat national apporter ses suffrages à M. Sarkozy dès le premier tour, aujourd’hui environ un électeur sur cinq ayant voté pour l’actuel locataire de l’Elysée lors de la précédente présidentielle, envisage désormais d’apporter sa voix à la candidate du Front National.
Le résultat de ce sondage apporte aussi du grain à moudre à ceux qui, au sein de l’UMP notamment, estiment que la réactivation par le chef de l’Etat et Jean-François Copé, de thèmes « porteurs » pour le FN, comme celui de la « place de l’islam », sont singulièrement contre-productifs… à partir du moment ou le chef de l’Etat n’en tire pas les bénéfices escomptés.
Au nom de la règle bien connue qui veut que les électeurs puissent préférer l’original FN à la (mauvaise) copie sarkozyste. Surtout quand celle-ci est mâtinée d’un double discours permanent comme l’atteste la poursuite à haut débit depuis 2007 de l’immigration de peuplement.
D’autres soulignent a contrario, calculs opérés par certains petits « Machiavel », que le résultat de ce sondage aura le mérite de souder autour du chef de l’Etat, comme autour du ou de la candidate du PS, le camp « progressiste ». « L’Union sacrée » pour faire barrage au « danger Marine », peut dissuader de trop nombreuses candidatures susceptibles d’éparpiller les voix en 2012, notamment à « droite », du type de celle de Christine Boutin, habituelle ramasse-miettes de la majorité présidentielle.
Nous noterons enfin que ses intentions de vote très élevées en faveur de Marine Le Pen privent l’opposition nationale de l’effet de surprise et désignent la candidate du FN comme la « femme à abattre ».
Ce qui peut laisser présager toutes sortes de manipulations, de manœuvres et de coups tordus dans les mois qui viennent. Marine Le Pen a donc parfaitement raison de rester raisonnablement prudente dans sa lecture de cette enquête, tout en précisant dimanche qu’elle partait dans cette campagne « pour gagner et pas pour faire de la figuration. »
Nous verrons si effectivement, le vent de révolte qui souffle contre le Système peut enfin déboucher sur la chute de la citadelle UMPS, la nécessaire « Révolution patriotique » que le FN appelle de ses vœux depuis quarante ans.