« Il est incontestable que la libération d’Hervé Ghesquière et de Stéphane Taponier a donné lieu à une couverture médiatique sans commune mesure avec l’annonce de la mort de militaires français en Afghanistan. D’un côté, des heures de direct, la mise en scène télévisuelle de l’émotion des proches, les commentaires de spécialistes (…). De l’autre, une vague brève en fin de journal télévisé ou dans un bas de page des quotidiens. Qui a entendu parler de Cyrille Hugodot , mort à 24 ans au service de la France ?» (63è militaire français tombé en Afghanistan, NDLR).
Comme l’écrit un (soldat) internaute réagissant à cet article « 7 secondes au JT de France 2 pour un camarade mort au combat pour la France » d’un côté, les photos de ces deux journalistes assénées « matin midi et soir » de l’autre. « D’ailleurs les mots ne trompent pas : quand un soldat donne sa vie, ce n’est pas la France qui est en deuil, mais l’Armée de Terre… Tout est dit. »
« Les tentatives, conduites par quelques anciens, pour rendre un hommage public aux soldats morts lors du retour de leur corps en France se soldent par des échecs. Ce qui renforce le malaise » note encore Jean-Dominique Merchet.
« De nombreux militaires écrit M. Merchet, ne comprennent pas l’attitude des deux journalistes de France-Télévisions en particulier les risques qu’ils ont pris sur le terrain. Hervé Ghesquière a cru bon d’expliquer, juste après son retour, que personne ne nous a rien dit. Que ce soit clair. Ce n’est malheureusement pas aussi clair et la direction de France-Télévisions n’ignore pas qu’il existe des traces écrites des avertissements lancés par l’armée française la veille même de l’enlèvement des deux journalistes (…) Idem sur l’existence de conversations téléphoniques assez directes entre les deux reporters et un officier français (…) Tout le monde sait qu’ils ont bien été avertis du danger de se rendre dans ce secteur non sécurisé, qui plus est à la recherche de contacts avec les talibans. D’ailleurs, tous les journalistes français arrivant sur le théâtre afghan le sont systématiquement. »
Enfin il est fait justice dans cet article des mensonges énormes des officiels français qui ont tous affirmé, la main sur le cœur, que la France ne verse pas de rançons aux ravisseurs. En effet, « En matière d’otage, la France a une pratique, aussi constante que non avouée : tout faire pour les libérer– y compris le versement de rançons importantes. C’est un choix. D’autres pays, à commencer par le Royaume-Uni, ont une autre politique : on ne cède pas, on ne discute pas. Qui, en France, serait prêt à assumer un tel choix, qui signifie la mort de compatriotes ? Et pas seulement de journalistes… »
Aujourd’hui, chacun se félicite du retour sain et sauf de nos deux compatriotes et, campagne présidentielle oblige, Nicolas Sarkozy s’est déplacé avec son épouse jusqu’à l’aéroport de Villacoublay pour les accueillir la semaine dernière. Europe 1 relatait pourtant il y a un an et demi, lors de l’exposé du ministre de la Défense Hervé Morin sur le sujet à l’occasion du Conseil des ministres du 5 janvier 2010, que «Nicolas Sarkozy (a) piqué (…) une grosse colère contre l’inconscience des journalistes enlevés en Afghanistan».
«C’est insupportable de voir qu’on fait courir des risques à des militaires pour aller les chercher dans une zone dangereuse où ils avaient l’interdiction de se rendre ». « Il faut que les Français sachent le coût de cette histoire. » Finalement les Français ne doivent rien en savoir, le chef de l’Etat s’est ravisé…
François Baroin et Alain Juppé ont donc démenti l’existence de toute transaction financière pour récupérer MM. Ghesquière et Taponier. Le quotidien Times rappelait pourtant des précédents célèbres puisque en Irak, la France aurait versé 15 millions de dollars pour la libération des journalistes Christian Chesnot et Georges Malbrunot, survenue en décembre 2004 et 10 millions de dollars pour celle de Florence Aubenas, en juin 2005.
Michel Peyrard, envoyé spécial de Paris Match en Afghanistan ou encore Frédéric Helbert, journaliste et grand-reporter, ont assuré que plusieurs millions d’euros ont été payés par la France pour obtenir l’élargissement des journalistes de France 3, via des intermédiaires afghans.
Un paiement systématique des rançons par les autorités françaises qui a aussi ses effets pervers car téléphone arabe aidant, tout le monde sait que l’enlèvement de Français, ça peut rapporter gros…