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« Nous sommes déjà le premier parti d’opposition ! »

Bruno Gollnisch a accordé un entretien à la Gazette de Côte-d’Or publié le 23 mai, à l’occasion de sa venue dans le département pour y apporter son soutien à Rémy Boursot et autres candidats FN du Rassemblement Bleu Marine en lice pour les législatives. Nous reproduisons ici cet article in extenso.

 

 Bruno Gollnisch : « Nous avons raison sur beaucoup de points »

 

 « Le député européen Bruno Gollnisch reste un homme influent au Front National, dont il est membre du bureau politique. Candidat aux élections législatives dans le Var, celui qui est également conseiller régional en Rhône-Alpes analyse la situation d’un parti fort d’un score élevé lors de la dernière présidentielle (18 %). »

 

 LA GAZETTE : Quand François Hollande et Nicolas Sarkozy ont fait du vote en faveur de Marine Le Pen au premier tour de la présidentielle un vote de révolte et non pas d’adhésion, comment avez-vous réagi ?

BRUNO GOLLNISCH : Avec agacement. Car c’est totalement faux. Les gens du Front National savent très bien ce dont ils ne veulent pas, mais ils savent aussi ce qu’ils veulent. Ces expressions de « vote protestataire », « vote de crise », « exclus de la modernité », etc. ont pour but de faire passer nos électeurs pour des râleurs, voire des tarés, qui ne comprennent pas la complexité des problèmes ; des gens qu’il faudrait peut être « écouter », mais sans prendre en compte leurs convictions. À la limite, on s’attend à ce que l’on propose de les « rééduquer ». C’est d’ailleurs, curieusement, la rhétorique que l’on appliquait aux « dissidents » en URSS. En fait, le vote FN traduit souvent une conscience politique plus aiguisée que le vote socialiste dans la région de Toulouse ou le vote UMP à Neuilly.

 LA GAZETTE : L’électorat frontiste se sent-il méprisé ?

BG : Oui, bien sûr. Ce type d’attitude est exaspérant. Derrière les propos faussement compatissants ou condescendants, nos électeurs sentent bien le mépris d’un établissement de politiciens nantis qui ne vivent pas la même chose qu’eux dans la vie quotidienne.

 LA GAZETTE :Comment avez-vous réagi aux déclarations de certains ministres entre les deux tours, à propos de leur refus de voter FN aux législatives en cas d’affrontement avec un candidat socialiste au second tour ?

BG: Beaucoup sont allés plus loin. Valérie Pécresse, Nathalie Kosciusko-Morizet, Claude Guéant, n’ont pas seulement dit qu’ils ne voteraient pas pour le candidat FN ; ils ont dit qu’ils voteraient socialiste !

J’ai d’abord considéré que ces prises de position étaient suicidaires pour leur propre camp. Je pense même que si Nicolas Sarkozy avait clairement pris la position inverse, il aurait été élu ! Je pense aussi que ces attitudes sont révélatrices de la complicité qui existe entre socialistes et UMP, partis du système. Bien sûr il y a entre eux des rivalités, féroces même, pour occuper les places. Mais sur le fond, ils sont proches. Et ils sont solidairement responsables du déclin de la France ces trente dernières années. Alors ils n’aiment pas que des outsiders viennent le leur rappeler !

  LA GAZETTE :Gérard Longuet a considéré Marine Le Pen comme une interlocutrice valable. Est-ce selon vous un acte isolé ou au contraire l’ancien ministre de la Défense a-t-il clairement dit ce que beaucoup à l’UMP pensent ?

BG : C’est ce que beaucoup pensent à l’UMP, parmi les électeurs de base et les élus locaux. Mais au sommet de l’appareil du Parti, on leur interdit de l’exprimer ! On obéit aux oukases socialistes contre le FN, qui se veulent vertueuses mais n’ont pour but que de diviser leurs adversaires afin de favoriser leur propre camp. Mais on ne peut pas indéfiniment et sans dommage jouer avec les règles de l’adversaire. Et on ne peut pas indéfiniment faire comme si un parti politique qui recueille régulièrement, depuis trente ans, 15 à 18 % des suffrages n’étaient qu’un « accident » temporaire de la vie politique française.

 LA GAZETTE :Marine Le Pen a-t-elle eu raison de lisser l’image du Front National ?

BG: Je ne suis pas favorable à la « diabolisation ». J’ai toujours considéré cette diabolisation comme parfaitement injuste. Elle est en fait une arme psychologique de nos adversaires. Par conséquent, si on peut la combattre, tant mieux. Mais selon moi, ce qui rend le FN plus acceptable, c’est tout simplement que les gens réalisent que nous avons raison sur beaucoup de points, que nos analyses se vérifient, que nos solutions fermes mais de bon sens s’imposent…

 LA GAZETTE :Auriez-vous appliqué la même stratégie si vous aviez été élu président du Parti ?

BG : Je ne me serais pas séparé de militants qui avaient peut être commis des erreurs, ou des péchés de jeunesse, mais dont les qualités étaient indéniables. Je me serais efforcé de réunir des éléments du Mouvement national qui nous avaient quittés ou qui existaient en dehors de nous en même temps que d’élargir notre rassemblement à d’autres courants politiques. Mais ce n’est pas moi le président du FN…

 LA GAZETTE : Le Front National pourrait-il devenir le premier parti d’opposition, et peser davantage sur la vie politique du pays ?

BG : Il pèse déjà sur la vie politique française, quoique n’ayant à ce jour aucun député, car il oblige ses concurrents et adversaires à se positionner par rapport à lui. Sa présence dans la sphère politique empêche d’ores et déjà le gouvernement d’ouvrir plus grandes encore les vannes de l’immigration, par exemple. Et l’on voit bien le rôle central que jouera le Front national, ses candidats « bleu Marine » et ses propositions lors des prochaines législatives.

Quant à devenir le premier parti d’opposition, c’est déjà, par exemple, ce qu’ont réussi nos amis autrichiens dans leur pays. Et si l’on considère que la véritable fracture politique est désormais moins une facture « droite-gauche » qu’un clivage, qui traverse d’ailleurs les partis de l’Établissement, entre tenants béats de la mondialisation et patriotes persuadés que la nation est l’espace le mieux à même d’assurer la prospérité, la protection mais aussi l’expression démocratique de ses habitants, alors nous sommes déjà le premier parti d’opposition.

 Des résultats décevants aux élections pour l’UMP couplés aux luttes internes qui s’annoncent pour prendre sa direction vont conduire à une implosion de ce parti et à une recomposition du paysage politique. Et nous sommes prêts à accueillir ceux de ses sympathisants et militants qui, à la base, souhaiteraient nous rejoindre.

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