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Du patriotisme économique

 affiche-produisons-francais-avec-des-francaisL’AFP le rapporte, Arnaud Montebourg, tout en laissant la porte ouverte aux discussions, « a demandé lundi dans une lettre dressée au  PDG de General Electric, Jeff Immelt,  d’améliorer son offre de reprise du pôle énergie d’Alstom, jugée insuffisante », car « reposant sur la seule acquisition des activités d’Alstom dans le domaine de l’énergie », qui  revêt « une importance stratégique ». Activités nucléaires sur  lesquelles « la France se doit de conserver sa souveraineté technologique »,  le pôle énergie d’Alstom  représentant 70% de son  chiffre d’affaire, « soit 14,8 milliards d’euros sur l’exercice 2012-2013 ». Aussi « le gouvernement souhaite examiner (avec M. Immelt) les voies et moyens d’un partenariat équilibré, rejetant une acquisition pure et simple qui, en l’état, conduirait à la disparition d’Alstom ». Arnaud Montebourg  cite comme exemple de partenariat équilibré  l’alliance que General Electric et Safran « ont su nouer dans les moteurs d’avions depuis 50 ans ». L’Afp précise encore que si le conseil d’administration d’Alstom  est favorable à General Electric,  «  il s’est toutefois réservé le droit de répondre à des offres non sollicitées, comme celle de Siemens, qui est soutenue par le gouvernement français ».

 Dans un communiqué paru la semaine dernière, Marine Le Pen a constaté qu’après Péchiney et Arcelor, c’est un nouveau  « fleuron industriel français » qui est ainsi « sans vergogne abandonné à ses concurrents étrangers ».« L’Etat qui avec succès avait pu sauver Alstom en 2003, en prenant 21% du capital (rétrocédées ensuite à Bouygues, NDLR), bute à présent sur le barrage de l’Union européenne construit par les traîtres de l’UMP et du PS. Ce que la Commission avait jadis toléré du bout des lèvres, nous est à présent sèchement refusé, marquant là le désastre de notre soumission ». « Sauver Alstom et ses 18 000 emplois directs sur le territoire, par une solution nationale, est donc une obligation stratégique, sociale et morale. Il faut refuser le faux choix du dépeçage américain ou allemand et y préférer une voie patriote, française, par le rachat des parts de Bouygues, principal actionnaire, par la Caisse des Dépôts et Consignations ».

 Négligeant cette  voie patriote , M. Montebourg ne cache pas  dans le dossier Alstom sa préférence pour son concurrent de toujours  l’allemand Siemens  plutôt que pour General Electric. Or, comme le rappelle le Bulletin d’André Noël,  il y a plusieurs raisons pour lesquelles Alstom est  de nouveau en difficulté, «  mais parmi celles-là il faut citer la transition énergétique allemande et l’abandon du nucléaire qui prive la firme française de commandes de réacteurs. Il en va de même pour son secteur ferroviaire : Eurostar, filiale de la SNCF, a choisi, en 2010, les trains à grande vitesse de Siemens, moins chers, au détriment du TGV d’Alstom. Ainsi l’Allemagne, après avoir affaibli notre  champion  français, Alstom, confie à Siemens le soin de s’en emparer et Montebourg applaudit au nom du  patriotisme économique » !

 Pourtant, le futur  ministre du redressement productif  fustigeait en 2011 l’ogre allemand, incarné par Angela Merkel qu’il n’avait pas craint de qualifier de « nouveau Bismarck » ! Sur son blog, M. Montebourg dénonçait ainsi  «un ordre allemand» que voudrait imposer la chancelière ,  «la question du nationalisme allemand en train de resurgir», «l’intransigeance dangereuse et suicidaire» de l’Allemagne à l’égard des autres pays de la zone euro.

 Les européistes de gauche avaient alors  dénoncé ses propos,   Daniel Cohn-Bendit, l’accusant même  de «sombrer dans le nationalisme au clairon»,  de  faire «du Front National à gauche». Hier comme aujourd’hui, ce type d’«accusation », même s’il s’en défend, fait le jeu d’Arnaud Montebourg qui  multiplie les mâles déclarations   contre le  « monde de la finance ». Et ce, dans le but assez évident d’apparaître aux yeux des  électeurs de gauche, des déçus du hollandisme,  comme un concurrent sérieux, sur le même segment qu’une   Martine Aubry dont on retrouve  la patte derrière les députés PS qui ont  refusé de voter le pacte de stabilité porté par M.  Valls.  Bref,  un  candidat potentiel en 2017,  susceptible de séduire  mieux que cette dernière   les catégories populaires  patriotes par ses saillies cocardières

 Voilà pour le positionnement  mais qu’en  est-il  de son  impact ? C’est dans ce contexte qu’un sondage CSA pour  Les Echos , Radio Classique et l’Institut Montaigne vient d’être publié  sur la perception par les Français du  patriotisme économique dont M. Montebourg entend  se faire le héraut. 59 % des personnes interrogées jugent que « le fait de privilégier des produits ou des entreprises françaises dans le contexte actuel de mondialisation » est « efficace pour redresser l’économie française » (38 % jugent  cette stratégie « inefficace »).

 « Dans un contexte de défiance vis-à-vis vis de l’exécutif, il s’agit d’un sujet fédérateur : quel que soit le degré d’exposition à la mondialisation, la catégorie socioprofessionnelle ou les sympathies politiques, les Français se retrouvent sur le bien-fondé de cette sorte de protectionnisme », souligne Yves-Marie Cann, directeur en charge de l’opinion chez CSA.

 Pour autant et c’est un sujet d’étonnement pour les commentateurs,   ce seraient  « les sympathisants du Front National » qui se montreraient  les plus dubitatifs quant à l’efficacité du patriotisme économique. Seuls 51 % d’entre eux l’estimeraient «  efficace ». En l’espèce  constate Bruno Gollnisch,  le doute qu’exprimerait les frontistes porte non pas tant sur le concept de patriotisme économique, autre déclinaison du protectionnisme, autre nom  du  refus de l’ultra libre échangisme et de l’ouverture inconsidérée des frontières à tous les flux de marchandises, que sur la sincérité et l’efficacité  de M.  Montebourg.

 Force est de constater que celui-ci  se définit toujours  comme un internationaliste, un immigrationniste.  Et   la grande  médiocrité des résultats obtenus  à la tête de son ministère, qui reste subordonné à des orientations gouvernementales radicalement inverses. M. Montebourg est donc perçu pour ce qu’il est, une simple caution, un alibi, qui   accepte par sa seule présence au gouvernement  d’avaler des couleuvres et/ou  de cautionner une  politique eurobruxelloise qu’il feint largement  de combattre.  

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