L’Union européenne a annoncé le versement de trois milliards d’euros à la Turquie pour, de manière très hypothétique, qu’elle lutte contre une immigration clandestine, aujourd’hui torrentielle, qu’elle laisse se déverser vers l’Europe. Il s’agira surtout avec ce pactole, a-t-il été précisé, de financer la scolarisation des enfants ou encore de faciliter l’accès au marché du travail des réfugiés sur le sol turc.
Il n’y pas que dans le domaine de la lutte contre le terrorisme islamique que la Turquie atlantiste de M. Erdogan fait preuve, au bas mot, d’une réelle ambiguïté alimentant les soupçons de double ou de triple jeu. D’ores et déjà M. Davutoglu a ainsi affirmé qu’aucune garantie ne sera apportée par le gouvernement turc sur la moindre baisse du nombre de « réfugiés » et autres « migrants » passant en Europe depuis la Turquie…
L’Europe et la Turquie «partagent la même destinée» avec l’Union européenne a scandé le Premier ministre turc à Bruxelles, tandis qu’un nouveau chapitre d’adhésion de ce pays non européen… à l’Union européenne a été également ouvert -Ankara avait demandé l’ouverture de cinq autres chapitres, mais s’est heurté à la ferme opposition de Chypre…
C’est un spectacle toujours assez sidérant que de voir cette UE trahir les souhaits des peuples dont elle prétend avoir la charge et vouloir faire le bonheur, en ne prenant aucune des mesures fermes que les Européens réclament pour lutter vraiment contre l’immigration. Tout en poursuivant, souligne Bruno Gollnisch, une politique d’adhésion à petit pas de la Turquie, selon la technique dite du voleur chinois, adhésion là aussi dont les Français, comme leurs voisins, ne veulent pas.
Dans ce climat de peur et d’anxiété sur l’avenir de notre continent et de sa civilisation, le journaliste Pierre Haski s’est livré sur le site de l’Obs à une recension de la troisième édition, les 18 et 19 novembre, des « Journées de Bruxelles». Elles sont organisées par ce même magazine et les quotidiens belges, le Soir et De Standaard.
Elles avaient pour thème «Europe: dernière chance» et la question de « L’irruption du terrorisme au cœur du continent, pour la deuxième fois de l’année après Charlie Hebdo et l’Hyper Cacher à Paris en janvier, n’a fait que renforcer la force du titre de ces Journées » a relevé M. Haski. «Tant l’Europe est apparue à côté de la plaque aux yeux de ses citoyens : échec du renseignement, manque de coordination face à une menace commune, tolérance ou laxisme vis-à-vis de foyers de radicalisation islamiste…»
« Un Européen convaincu, l’Italien Walter Veltroni, ancien maire de Rome et figure de la gauche transalpine », a souligné que «la peur est aujourd’hui dominante dans les opinions publiques, avec comme conséquence la montée des demandes identitaires (…) Pour Walter Veltroni, il faudra donc choisir : Soit le repli identitaire, soit les Etats-Unis d’Europe.»
Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, comme « l’ancien Premier ministre belge Guy Verhofstadt, président du groupe libéral (ALDE) au Parlement européen, ont martelé eux aussi lors de ces Journées que « la solution, c’est l’Europe.» « Le changement climatique, le crime organisé, le terrorisme ne s’arrêtent pas aux frontières nationales. Le rétablissement des frontières comme le préconise Marine Le Pen créera plus de problèmes qu’il n’en résoudra.»
A quoi il est facile de rétorquer qu’au-delà même des arguments, ô combien cohérents et légitimes avancés par le FN pour un retour aux pleines souverainetés nationales, à l’Europe des patries libres, de la libre coopération, c’est l’étalage d’impuissance de cette Europe bruxelloise qui achève de la décrédibiliser.
«L’Europe, c’est fini, on a raté le coche, c’est trop tard» a d’ailleurs affirmé un autre européiste historique, l’ex Premier ministre Michel Rocard. « Sombre », il a « constaté que le monde se refait dans la force, mais que l’Europe a baissé les bras. Les dépenses de défense sont au plus bas depuis cent cinquante ans, les citoyens de l’Union européenne sont joyeux de ne plus s’occuper des problèmes du monde. A ses yeux, l’Europe s’est dotée d’un système d’institutions paralytiques, des institutions qui tuent le leadership. Il a plaidé à l’opposé pour un civisme mondial autour des grandes questions comme le climat, la laïcité, etc ».
Un improbable, nébuleux civisme mondial comme palliatif à une construction européenne défaillante sous la coupe de la technocratie euromondialiste? Quel plus bel exemple d’aveuglement et d’hémiplégie intellectuelle ? L’avenir, la renaissance de la France, de l’Europe européenne ne passera par eux, et ce qui est nouveau c’est que désormais cette certitude s’impose dans les esprits et est en passe de devenir majoritaire.