Madame la Présidente, Madame la Commissaire, j’avoue avoir un peu de mal à comprendre votre décision qui n’a pas été publiée, même si l’objectif de mettre fin au dumping fiscal dont bénéficient certaines multinationales est louable.
Quelques questions: premièrement, on s’interroge sur la base légale. Quels sont les textes de droit qui sont visés? Cette absence de publication de votre décision limite considérablement nos possibilités d’analyse.
Deuxièmement, la Commission dit ne pas mettre en cause le fait que les États membres sont libres de leur politique fiscale – très bien – et que les taux sont fixés librement par les États – ici, l’Irlande. Elle n’attaque donc pas frontalement un dumping fiscal que pratiquerait l‘Irlande au détriment d’autres pays européens. Il en résulte logiquement que les distorsions de concurrence sont appréciées à l’intérieur du marché irlandais. Mais quels sont ces concurrents? Vous ont-ils saisi d’une plainte? Il ne semble pas.
Troisièmement, si l’Irlande est fautive, n’est-il pas incohérent, comme l’a dit mon collègue, de vouloir lui attribuer de force comme sanction ces 13 milliards dont elle vous dit qu’elle ne veut pas? C’est tout de même étrange.
Quatrièmement, si, comme le suggère la Commission, les États membres se sont abstenus d’imposer Apple pour ses activités économiques réelles sur leur territoire, la responsabilité de cette carence n’incombe-t-elle pas à ces États et non à la société qui en a bénéficié de façon publique et paisible avec leur bienveillance? Je voudrais être sûr que vos objectifs légitimes sont compatibles avec l’état de droit, la non-rétroactivité, que votre action serve bien aux intérêts européens et non à rapatrier les bénéfices et les impôts aux États-Unis, l’Europe n’y serait pas gagnante