Une analyse dont le caractère factuel est parfois difficilement contestable, peut être recevable ou à tout le moins légitimement argumentée comme lorsqu’il note que « l ‘effondrement du judéo-christianisme en Europe, la baisse du taux de fécondité de sa population couplée à la Résurgence de l’Islam et à l’augmentation de son taux de fécondité, témoigne en faveur de l’islam» ( « nous avons le passé pour nous, ils ont l’avenir pour eux» prophétise-t-il), «porteur d’une nouvelle spiritualité européenne capable de disposer de la puissance avec laquelle se constituent les civilisations nouvelles ». Michel Onfray fustige aussi Vatican II qui « a fait de Dieu un copain à tutoyer » et souligne que « les législations postchrétiennes qui libèrent la sexualité et la découplent de la procréation, de l’amour et de la famille contribuent à l’effondrement démographique ».
« Le judéo-christianisme a régné pendant presque deux millénaires. Une durée honorable pour une civilisation. La civilisation qui la remplacera sera elle aussi remplacée. Question de temps. Le bateau coule: il nous reste à sombrer avec élégance ». A cette civilisation islamique prédit-il encore succédera le grand tout, le magma mondialiste, « une civilisation planétaire, en réseau (…) car les nations ont disparu, les territoires ont disparu (?), on est dans le temps réel de l’appel téléphonique, de l’écran vidéo ( ?)». Pour autant, il prend bien soin de dire « (qu’il n’est) pas de ceux qui dirait: attention il faudra bien voter la fois prochaine fois sinon on aura l’islam au pouvoir».
L’immigration non européenne est appréhendée par Onfray comme inéluctable, fatalisme du philosophe nietzschéen bien étranger, soit dit en passant, au génie et au caractère de notre civilisation. « Le blanc», dit-il, «va être une vieille chose dépassée et il y aura métissage et disparition et je ne suis pas de ceux qui disent oh la la le grand remplacement, catastrophe, oh la la , le métissage nos étions une race supérieure et il y a des races inférieures qui sont en train de nous dominer, de nous posséder etc. Je dis juste est-ce qu’on peut, à la Spinoza , un ni rire ni pleurer , mais comprendre…».
Peut-être peut-on rappeler à M. Onfray que la volonté de défendre son identité qu’elle soit physique, culturelle ou spirituelle n’implique aucun racisme. Et certainement pas la dévalorisation, le mépris, la haine de l’autre mais, le plus souvent au contraire, une saine estime de soi, la pleine perception que la beauté de notre monde réside dans sa diversité, sa pluralité, ses différences. Dévalorisation, mépris et haine qui s’exercent a contrario exclusivement chez les grands prêtres de l’idéologie dominante dans les médias, contre les Européens qui veulent rester eux mêmes, mais jamais vis-à-vis des autres peuples, communautés ou ethnies qui à travers le monde manifestent le même souci respectable.
De la question identitaire aux préoccupations souverainistes, M. Onfray, toujours sur Europe 1 , énonçait sur le même mode le caractère irréversible de la dépossession de la maîtrise de notre destin: «le prochain président de la République va défendre l’Euro, l’Europe, le marché, le libéralisme. Nous allons continuer dans le même sens. Si ce n’était pas le cas, et que par exemple Marine Le Pen était élue», «ce serait le bazar dans la rue», « on aurait le syndrome de Tsipras (le Premier ministre grec eurosceptique d’extrême gauche qui s’est finalement couché devant Bruxelles, NDLR). C’est-à-dire que l’Europe ferait son travail. L’Europe libérale n’est pas méchante, mais elle obéit à une forme de fatalité. C’est comme ça que ça se passe, et ça contribue à une dilution des souverainetés, des souverainismes et des frontières. Ce n’est ni bien ni mal, c’est ainsi »… Ni bien ni mal? Une Europe écrit-il pourtant, dominée par un libéralisme qui, selon lui, est « un facteur d’enrichissement des riches et, la plupart du temps, d’appauvrissement des pauvres ». «L’Europe est à prendre, sinon à vendre».
Comme Eric Zemmour notamment, Michel Onfray réitère dans son dernier livre « son admiration pour le travail de Samuel Huntington et son Choc des civilisations (1996), un livre, écrit Onfray, validé par le réel bien qu’il fut déconsidéré lors de sa parution en France par l’intelligentsia parisienne ». Cet avis, comme plus largement ses considérations sur notre civilisation et l’assomption de l’islam, avaient déjà été tenus par le philosophe-essayiste lors d’une conférence en août 2013: « Prétendre qu’il n’y a pas un choc des civilisations entre l’occident localisé et moribond et l’Islam déterritorialisé en pleine santé est une sottise qui empêche de penser ce qui est advenu, ce qui est, et ce qui va advenir…». Bruno Gollnisch notait pour sa part, dans un entretien accordé au magazine Zur Zeit en 2015 , que si certaines analyses historiques, objectives de M. Huntington peuvent être validées, il restait très « circonspect » sur cette théorie du « choc des civilisations brandi par les neocons ». « Elle a contribué à la justification de la catastrophique guerre contre l’Irak de 2003, nous en voyons les effets désastreux aujourd’hui, et à une volonté plus générale de remodelage du Proche-Orient, toute aussi chaotique dans ses effets ».
Reste que l’athée Onfray décrit parfaitement la déshérence spirituelle d’un « Occident (qui) ne vit désormais que dans le consumérisme.» Or,« On ne donne pas sa vie pour un iPhone. L’islam est fort, lui, d’une armée planétaire faite d’innombrables croyants prêts à mourir pour leur religion, pour Dieu et son Prophète. Nous avons le nihilisme, ils ont la ferveur ; nous sommes épuisés, ils expérimentent la grande santé, nous vivons englués dans l’instant pur ils tutoient l’éternité. ».
Cette réflexion d’Onfray ne nous est pas bien sûr pas totalement étrangère. Nous l’avons écrit sur ce blogue ces dernières années, c’est par la réaffirmation des valeurs qui ont fait la force, le génie, et la grandeur de notre civilisation helléno-chrétienne, que nous gagnerons le respect des populations immigrées ; valeurs qui si elles étaient portées fièrement, seraient même un facteur d’assimilation. Mais valeurs piétinées allègrement le plus souvent par les autoproclamés défenseurs cosmopolites de la laïcité, d’une république bien peu romaine, mais progressiste, décadente, affaissée, sans âme…
Bruno Gollnisch relevait que « la nature a horreur du vide ». « Nos églises se vident, les mosquées sont pleines. C’est aussi sur le vide spirituel de l’occident, de nos nations dites avancées, mais surtout désenchantées, que prospère l’islamisme. Quelles valeurs autres que matérialistes, hédonistes, marchandes, relativistes avons-nous à opposer à l’islam conquérant ? La quête du Beau, du Bien, du Vrai qui, dés la Grèce antique, a façonné l’esprit, le génie de notre civilisation, est battue en brèche, moquée, vilipendée. En refusant de reconnaître les racines chrétiennes de l’Europe, les instances Bruxelloises ont fait aussi, à leur niveau, le jeu de l’islam radical. En désarmant les âmes, on affaiblit aussi les cœurs et les esprits ». L’Islam -dans sa composante fondamentaliste mais pas que– prospère en réponse au matérialisme et à ce vide spirituel occidental qui ne peut être comblé uniquement à l’évidence par la déclaration des droits de l’homme, les centres commerciaux et le mariage pour tous.
Enfin, et nous le rappelions pareillement, cette immigration massive qui découle aussi de l’explosion démographique des pays du sud, « n’est pas l’œuvre d’un complot fomenté par les mollahs, les docteurs de la foi de l’université al azhar du Caire ou le Grand Mufti de Jérusalem. Elle est plus simplement de la responsabilité directe des politiques criminelles menées par la gauche et la droite depuis quarante ans, par soumission au grand capital apatride, lâcheté, aveuglement, bêtise ou cosmopolitisme. Il ne faut pas l’oublier.»