Si la formulation est peut-être sujette à caution (la justice nous le dira?) et ambiguë, elle a cependant sa cohérence pour Renaud Camus, auteur d’une formule choc qui est quasiment rentrée dans le langage courant, reprise par ses adversaires comme par ses soutiens, celle du Grand Remplacement (titre d’un de ses livres paru en 2011). En l’espèce celui des Français autochtones, de souche par des flux migratoires en provenance des pays du sud. Ce « Grand Remplacement» écrivait-il, «le changement de peuple que seul rend possible la grande déculturation, est le phénomène le plus considérable de l’Histoire de France depuis des siècles, et probablement depuis toujours. »
Les petits pions de sos racisme se sont étranglés et se sont livrés à une exégèse tortueuse des propos de l’écrivain: « Camus sous-entend ici que l’arrivée d’immigrés et la présence de descendants d’immigrés fera plus de victimes que la Shoah. Ses propos sont une façon de banaliser sans le dire l’ampleur du crime de la Shoah… Ils sont ouvertement racistes envers les personnes Noires et Arabes en plus d’être puants envers les Juifs.» Même son de cloche des Torquemada de l’UEJF qui « déposera plainte contre Renaud Camus pour contestation de crime contre l’humanité et provocation publique à la haine raciale. Renaud Camus, idéologue d’extrême-droite a déjà condamné par la justice pour sa théorie du grand remplacement (…). Non content d’inciter à la haine envers ceux qu’il juge responsables du remplacisme global, Renaud Camus y ajoute une forme de révisionnisme pernicieuse consistant à minimiser le processus d’extermination de plus de 6 millions de juifs en Europe.» Ces deux officines exigent en outre une nouvelle fois que les hébergeurs de plateformes censurent et fassent défensivement taire les refuzniks, les dissidents et autres déviants à la pensée unique.
Ne pas être d’accord avec la politique d’immigration massive implique t-il qu’on incite à la haine contre les responsables du remplacisme global, à savoir non pas les immigrés eux mêmes mais la classe politicienne au pouvoir depuis 1976, année de la mise en place du regroupement familial? Même Laurent Wauquiez qui a avalé sans moufter et même en les dégustant avec plaisir toutes les couleuvres euromondialistes, immigrationnistes, multiplie ces derniers mois les clins d’œil identitaires à l’électorat frontiste et droitier.
Invité le 29 octobre du Grand Jury RTL / Le Figaro / LCI , M. Wauquiez, archétype du progressiste du sérail adoptant un langage dur à des fins clientélistes, a repris une nouvelle fois le discours du FN. «La réalité, a-t-il dit, c’est que vous avez, aujourd’hui en France des quartiers qui sont les quartiers perdus de la France. Sortez du plateau de RTL, venez avec moi. Je vous emmène à Saint-Étienne, on ira à Firminy. Et vous verrez rapidement que la réalité va vous sauter au visage. » La réaction de son ami Gaël Perdriau, maire LR de Saint-Etienne et président de Saint-Etienne Métropole ne s’est pas faite attendre: « je ne peux pas accepter cette assimilation hâtive, reposant sur une théorie identitaire (sic), subitement élevée au rang de réalité révélée, qui en fait le seul facteur explicatif des difficultés de certains quartiers de nos villes (…) ses propos sont inadmissibles par la stigmatisation des habitants de certains quartiers et parce qu’ils ouvrent la voie aux tenants de la théorie du grand remplacement culturel, tels Renaud Camus. Ces théories constituent le véritable socle idéologique de l’extrême-droite et de ses alliés comme Nicolas Dupont-Aignan.»
Alain Wauquiez suspecté de complicité idéologique avec La Bête…l’heure est grave! Notons qu’ Alain Finkielkraut, ami de longue date de Renaud Camus, a été longuement interrogé sur son tweet par Elisabeth Lévy dimanche dernier sur l’antenne de Radio RCJ. «Je souffre de voir Renaud Camus s’égarer de cette manière » a affirmé l’académicien. « Il faut se garder comme de la peste de toute comparaison (avec la shoah, NDLR), avec les sombres temps du XXe siècle, et s’efforcer de penser le présent dans ses propres termes (…). Les ignorants qui l’accablent enterrent vivant un très grand écrivain. Je confirme. Voici la tragédie : c’est que celui-ci leur apporte son concours. Avec ses analogies et ses raccourcis, il creuse sa tombe, il est son propre fossoyeur. Il veut provoquer un sursaut, résultat, il provoque un haut-le-cœur, même chez les plus clairvoyants.»
Pour autant, M. Finkielkraut lui donne raison sur le fond: « comme l’a écrit Elisabeth Badinter, sur la foi des témoignages terrifiants et édifiants collectés par Georges Bensoussan dans Une France soumise : Une seconde société tente de s’imposer au sein de notre République, tournant le dos à celle-ci, visant explicitement le séparatisme, voire la sécession. C’est un crève-cœur pour lui de savoir que tant de Français vivent à Saint-Denis, Sevran, La Courneuve, Tourcoing et même certains quartiers de Paris comme dans une terre étrangère (…). Quant au remplacisme global dénoncé à juste titre par Renaud Camus, qui consiste à vouloir compenser par l’immigration la baisse de fécondité des pays d’Europe, il procède de l’universalisation de l’idée du semblable. C’est parce qu’aucune différence n’est insurmontable que n’importe qui, partout, peut faire l’affaire. On peut dire que la vision démocratique du monde a enfanté un monstre, mais que ce monstre n’est pas génocidaire. Car le génocide n’est pensable que par contestation de l’unité de l’espèce humaine.»
Invité de RFI le 6 octobre dernier, Bruno Gollnisch avait été questionné sur cette notion de Grand Remplacement: «Il y a des invasions qui ne sont pas nécessairement accompagnées de manœuvres militaires. Dans l’histoire de l’humanité, vous avez des transferts de population qui aboutissent progressivement à la disparition d’une population qui est remplacée par une autre. C’est ce qui s’est passé au moment les invasions barbares, etc. La théorie du Grand Remplacement ne me choque pas parce qu’il est certain que sous l’effet de l’immigration massive d’une part, et de la dénatalité française qui n’est masquée que par nos fausses statistiques, que par notre code de la nationalité, on observe progressivement un changement dans la population française. Si ça doit aboutir à la disparition ou à la régression de la population française d’origine, je m’en inquiète.»
Immigration massive qui s’accompagne chez nous d’un discours, d’un racisme antifrançais proprement insupportable. Nous évoquions sur ce blogue les propos de Malika Sorel-Sutter, proche de la droite républicaine, ancien membre du collège du Haut Conseil à l’Intégration et de sa mission Laïcité. En février 2014, réagissant au rapport de Thierry Tuot portant notamment sur la lutte contre les discriminations, elle avait dénoncé un lobby immigrationniste dont le discours «consiste à attribuer la responsabilité de l’échec de l’intégration aux Français » .« Ce sont ceux qui entraveraient la réussite des immigrés et de leurs descendants et c’est à ce titre qu’il convient de lutter contre les discriminations. Des Français de souche européenne seront mis de côté uniquement parce qu’ils ne sont pas de la bonne ascendance biologique. C’est du racisme anti-Français. Oui, le pouvoir bascule vers la préférence étrangère. »
Dans son livre parue en 2015, Décomposition française -comment en est-on arrivé là?, Mme Sorel-Sutter sonnait le tocsin. La France ne survivra pas à la politique migratoire menée jusqu’alors par les différents gouvernements du Système prévenait-elle. Notre nation est sur le chemin de l’implosion, du fait de l’aveuglement de nos élites, de gauche comme de droite, sur les problèmes migratoires. Élites composées d’arrivistes fonctionnant par cooptation et écartant tout esprit indépendant, rebelle à la doxa multiculturaliste; personnel politicien privilégiant le court terme, le clientélisme communautaire – faites du lobbying comme les autres religions et venez travailler avec nous déclarait Valérie Pécresse il y a quelques années aux responsables musulmans… Élites incapables d’appréhender la dimension ethno-culturelle de l’immigration de peuplement, se fourvoyant dans la discrimination positive, l’assistanat plutôt que la méritocratie, incapables de faire aimer la France et précipitant l’avènement d’un communautarisme à l’américaine, mais sans la capacité intégratrice des Etats-Unis.
Dans son livre, Malika Soral-Sutter, tout en énonçant de solides vérités dont nous avons donné un très bref aperçu, faisait part de sa grande peur –partagée aussi par M. Finkielkraut- de voir dans ces conditions un Front National qui, lui, refuse de se voiler la face, être porté au pouvoir par les Français. Une frayeur qui parait bien dérisoire, pusillanime, aberrante même, au regard de la situation et de l’avenir sombre qu’elle nous décrit. En s’opposant au seul grand mouvement politique luttant frontalement, sans esprit de recul, contre la submersion migratoire, les intellectuels et personnalités qui le combatte ne se comportent-ils pas comme des alliés de revers des politiques remplacistes qu’ils dénoncent?