Le retrait finalement décidé du nom du publiciste, journaliste, écrivain, penseur et théoricien de l’Action Française Charles Maurras (1868- 1952) du recueil 2018 des Commémorations du ministère de la Culture, peut-il se justifier du fait des propos et écrits antisémites de cet académicien Français, au nom justement du maintien nécessaire de la paix civile ?
Nous le notions il y a peu à l’occasion de la décision prise, sous la pression, par les éditions Gallimard de renoncer à republier les pamphlets de Louis-Ferdinand Céline, il est difficile d’imaginer que les bas-de-plafond qui constituent les gros bataillons des racailles et autres islamo-mafieux de « nos » banlieues se mettent à la lecture des auteurs français précités pour y trouver d’hypothétiques justifications au passage à l’acte anti-juif.
Le ministre de la culture Françoise Nyssen (co-fondatrice des Editions Actes Sud, maison qui édita notamment l’excellent écrivain russe néo-poutinien Zakhar Prilépine ) avait confié à l’historien Olivier Dard (spécialiste de l’Action Française) la longue notice consacrée à Maurras dans ce livre des Commémorations... qui a finalement été mis au pilon. Mme Nyssen a plié devant les exigences épuratrices de SOS racisme, de la Licra, du commissaire politique mélenchoniste Alexis Corbière et, sans surprise également, du délicat Frédéric Potier, nouveau Délégué interministériel à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT. «Commémorer c’est rendre hommage. Maurras n’a pas sa place dans les commémorations nationales 2018», affirme-t-il. Le Figaro qui s’arrête sur cette polémique, cite Jean-Noël Jeanneney et Pascal Ory, deux membres du Haut Comité aux commémorations nationales chargé de sélectionner chaque année les personnalités et les événements dignes d’intérêt , qui font valoir en revanche « que s’il revient à l’Etat de fêter le souvenir des moments lumineux (…), c’est son devoir aussi de braquer la lumière sur les périodes les plus sombres – de toutes les manières possibles.»
Où s’arrêtera cette volonté de gommer, éradiquer, occulter les romanciers, les figures appartenant désormais à l’histoire des idées, de la littérature et à l’Histoire tout court, mais porteurs d’une pensée dissidente ou condamnés au nom des tables de loi républicano-progressistes ? Déjà, « après l’affaire de la réédition des pamphlets de Céline, après le retrait de Charles Maurras du livre des commémorations nationales 2018 (…), c‘est au tour d’un professeur d’université, Nicolas Offenstadt, de s’interroger sur la présence dans cette liste d’un autre écrivain marqué à droite, Jacques Chardonne, mort il y a cinquante ans. Pour l’universitaire, invité sur Europe 1, On peut discuter de l’œuvre littéraire de Jacques Chardonne et de son intérêt aujourd’hui. Mais fondamentalement, il représente le symbole de l’écrivain qui a prôné la collaboration avec les Allemands. Il a défendu la collaboration avec les nazis de manière extrêmement claire et nette, explique le chercheur. Comment commémorer ce type d’attitude qui n’est pas séparable de l’ensemble du personnage? »
M. Offenstadt se livrerait (délibérément?) à un contre sens selon MM. Jeanneney et Ory qui, dans leur tribune publiée dans Le Monde, précisent que « la mission confiée au Haut Comité aux commémorations nationales est de contribuer à une meilleure prise de conscience des épisodes majeurs du passé. Il en propose une liste à la ministre, à qui il revient de les agréer si elle le souhaite. Françoise Nyssen l’a fait d’abord, en l’occurrence, avant de changer d’avis. Sont concernés les personnalités et les événements dont notre pays peut s’honorer, mais pas eux seulement. Commémorer, ce n’est pas célébrer », expliquent-ils.
Rappelons qu’en 2011, le ministre de la culture de Nicolas Sarkozy, Frédéric Mitterrand, avait lui aussi sous la pression (notamment celle de Serge Klarsfeld) retiré le nom de Louis-Ferdinand Céline, du « Recueil des célébrations nationales ». « Frédéric Mitterrand doit renoncer à jeter des fleurs sur la mémoire de Céline, comme François Mitterrand a été obligé de ne plus déposer de gerbe sur la tombe de Pétain » avait notamment déclaré M. Klarsfeld.
« On peut aimer Céline sans être antisémite, comme on peut aimer Proust sans être homosexuel ! » soulignait M Sarkozy en 2008 et ce passage à la trappe de Céline avait été alors condamné par des personnalités peu soupçonnables de compromission avec la Bête immonde comme le comédien Fabrice Luchini, l’écrivain Philippe Sollers, l’essayiste Alain Finkielkraut, le philosophe pipole Bernard-Henri Lévy…
Membre du Haut Comité et préfacier du recueil, l’historien Alain Corbin disait concevoir « que la présence de Céline puisse blesser (…) mais, d’un autre côté, on risque ce faisant d’ouvrir la voie à des débats sans fin : il y aura toujours quelqu’un pour dire qu’il est inadmissible de célébrer Thiers parce qu’il a écrasé la Commune, Turenne parce qu’il a ravagé le Palatinat et Rousseau parce qu’il a abandonné ses enfants. »
Invité avant-hier de l’émission Des idées à partager sur France Culture, un proche de BHL, l’écrivain Yann Moix, qui n’hésite pas à réciter régulièrement le pathétique catéchisme immigrationniste, s’est opposé cependant avec de vrais arguments contre la décision prise par Françoise Nyssen: « effacer Charles Maurras de l’Histoire c’est se condamner à ne pas la comprendre . Charles Maurras était le Jean-Paul Sartre d’une partie du début du XXe siècle. Si vous enlevez Charles Maurras de la compréhension d’une époque, vous enlevez l’influence qu’il a eue sur Marcel Proust, Apollinaire, André Gide, Jacques Lacan. Maurras, qu’on le veuille ou non, fait partie de l’histoire des idées en France. Le déconnecter du passé, l’arracher à la mémoire, c’est oublier l’influence intellectuelle phénoménale qu’il a eue. Je ne crois pas qu’un journaliste ait plus publié que Maurras en son temps. C’est vraiment s’insulter soi-même que de croire que parce qu’on passe quelqu’un sous silence il n’existera plus. C’est une forme de révisionnisme officiel. Evidemment que les thèses de Maurras, notamment ses penchants antisémites, sont avérées. Mais aujourd’hui, on ne peut plus prendre une oeuvre dans sa complexité, la penser exactement. Comme la cigarette de Malraux sur les publicités en 1996, on efface l’oeuvre, elle n’a jamais existé parce que par décret l’oeuvre n’a pas eu lieu, n’a jamais été publiée. »
Redisons-le ici, cette polémique est tout sauf anecdotique. Elle est un signe, parmi beaucoup d’autres, de la fébrilité (qui ne touche pas tout le monde, la preuve par M. Moix) des acteurs de ce Système finissant, notamment devant une jeune génération réactionnaire, au sens le plus noble du terme, qui a marginalisé la gauche dans le débat public et des idées. La frousse d’une Caste devant un peuple français qui se cabre, refuse de plus en plus de penser dans les clous, d’ingurgiter béatement la doxa mondialiste, transnationale, hors-sol validée par les autorités morales. Une polémique qui démasque de nouveau les pulsions totalitaires d’un certain nombre de lobbies , de personnalités ou d’idiots utiles qui participent de cette entreprise de régression intellectuelle visant à nous couper de notre mémoire quand celle-ci n’est pas réductible aux dogmes progressistes. Du passé faisons table rase, encore et toujours l’inusable slogan de tous les fils spirituels de la Terreur et des adeptes de la police de la pensée.