À propos de l’Union Soviétique européenne
Ce titre m’a été inspiré par un vidéo clip de l’ancien dissident russe Boukovski, publié sur YouTube, et que je vous recommande particulièrement. Il se termine par ces mots prémonitoires « J’ai vécu votre futur, et ça n’a pas marché »
Notre identité nationale, mais aussi notre souveraineté, qui est à une nation ce que la liberté est à une personne, sont attaquées sur le plan physique, par l’effet conjugué de la dénatalité et de la politique d’immigration massive. Elles le sont aussi sur le plan moral, par la négation de notre identité, ou par la véritable guerre psychologique qui se manifeste notamment au travers des exercices obligés de repentance à répétition, visant à inculquer à notre peuple, et spécialement aux plus jeunes, un sentiment diffus de dégoût de leur nation et de culpabilité collective les privant de toute réaction. Elles le sont enfin sur le plan institutionnel, par la dissolution de l’Etat français dans un ensemble supranational ouvert à tous les vents, à tous les flux migratoires, à toutes les marchandises, à tous les capitaux.
A cet égard comme à bien d’autres, une précision s’impose. Il est fait grief aux Nationaux d’être «contre l’Europe». Il serait aussi stupide pour les patriotes d’un pays d’Europe d’être «contre l’Europe» qu’il le serait pour des Africains d’être «contre l’Afrique», comme pour des Asiatiques d’être «contre l’Asie», etc. A la vérité ils ne sont pas contre l’Europe, dans la mesure où leurs nations appartiennent géographiquement à l’Europe. Dans la mesure aussi où ils reconnaissent, par delà l’extrême diversité des caractères nationaux, un certain patrimoine commun aux peuples d’Europe. Dans la mesure encore où, dès lors que le voisinage impose des relations, ils préfèrent naturellement que celles-ci soient pacifiques, voire fructueuses, plutôt qu’agressives, voire hostiles.
Les nationaux ne sont donc ni «contre l’Europe» en tant que réalité géographique, humaine et culturelle, ni même contre toute forme de coopération européenne. Mais ils sont résolument contre l’escroquerie qui consiste, sous le couvert de cette coopération, à édifier un Super-Etat destructeur de leurs identités particulières, de leurs souverainetés, de leurs libertés, sans même pour autant édifier un ensemble véritablement européen, mais un espace euro-mondialiste ouvert à tous les vents, à tous les flux de personnes, de marchandises et de capitaux, même quand ces personnes sont l’avant-garde d’une colonisation de peuplement venue d’autres continents, d’autres races, d’autres cultures, même quand ces marchandises ont été fabriquées à vil prix par les nouveaux esclaves des temps modernes, dans quelque pays asiatique, par des ouvriers surexploités ne disposant d’aucun droit social ou syndical, et même enfin quand ces capitaux sont des instruments de domination et de contrôle de ce qu’il nous reste d’industrie aux mains de puissances étrangères ou de fortunes anonymes et vagabondes.
En d’autres termes, les nationaux combattent résolument les évolutions criminelles de l’Union européenne, puisque c’est d’elle qu’il s’agit. Ce refus d’un Super-Etat Eurocratique, bien éloigné des bénéfiques influences de l’Empire Romain, ou même du saint Empire médiéval dont le roi de France «empereur en son royaume» se faisait d’ailleurs l’égal, ce refus ne qualifie pas les nationaux comme anti-européens. Au contraire ! Leur attitude est conforme à la vraie tradition européenne, puisque l’Europe, cette petite péninsule située à l’extrémité de l’immense continent asiatique est l’espace qui a inventé la liberté et légalité des nations, modèle unique et sans équivalent ailleurs : ni le modèle chinois traditionnel, avec ses cercles concentriques de subordination au fils du Ciel, ni le modèle islamique du Khalifat, où se confondent pouvoir religieux et politique, ni le modèle marxiste de la domination de la « patrie des travailleurs » sur ses satellites n’en offrent d’exemples.
Ce modèle européen de nations libres, égales, souveraines et donc indépendantes, se gouvernant librement, sans ingérence extérieure, puise comme nous l’avons dit plus haut ses plus anciennes racines dans les Cités grecques distinguant dans leur ligues et amphictionies l’hegemon du despotès, pratiquant entre elles l’arbitrage ; il est le fruit de l’émergence des Etats dotés de la summa potestas chère à Jean Bodin ; il repose sur les principes juridiques du droit des gens européen, énoncés plus haut, et sur le principe politique du justum potentiae equilibrium, : le « juste équilibre des puissances » consacré par les traités de Westphalie (1648), qui mirent fin à la guerre de 30 ans, puis par celui d’Utrecht (1715), qui mit fin à la guerre de Succession d’Espagne et ceux qui ont suivi ; principe auquel se heurteront Charles Quint, Louis XIV, Napoléon, Hitler (sans autre rapprochement entre ces divers personnages !).
Or, ce droit international est en constant recul. L’arrogance des forces mondialistes, la substitution méthodique de la sensiblerie à la raison, et la manipulation des opinions qui en résultent, l’insertion forcée de notre pays dans cet ensemble supranational qu’est devenue l’union européenne, et beaucoup d’autres facteurs encore y concourent.
Au plan international, les effets de cette décomposition juridique sur notre droit interne sont proprement terrifiants. C’est ainsi que l’abandon de notre souveraineté a eu pour effet la soumission de notre droit, même le plus élevé dans la hiérarchie des normes juridiques, à la réglementation bruxelloise.
Nous disons bien : à la réglementation et non seulement aux traités. Entrons un peu dans la technique juridique. Notre constitution comporte un article, l’article 55, qui dispose que :
Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur ratification, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque traité ou accord, de son application par l’autre partie. Mais depuis toujours, nos tribunaux, tant de l’ordre judiciaire que de l’ordre administratif, estimaient qu’il n’était pas en leur pouvoir d’écarter l’application d’une loi française postérieure à un traité, même si elle comportait des dispositions en apparente contradiction. C’était le problème du Ministre des Affaires Etrangères ; c’était le problème du Gouvernement. Ces principes ont volé en éclats depuis les arrêts Café Jacques Vabre de la Cour de Cassation et Nicolo du Conseil d’Etat. Et depuis, les lois votées par le Parlement sont subordonnées non pas seulement aux traités eux-mêmes, mais, ce qui est encore plus inadmissible, à la réglementation européenne la plus subalterne.
Rien ne symbolise mieux les manières à la fois pernicieuses et arrogantes de l’Eurocratie que la question du siège du Parlement européen, question mineure, au regard d’autres enjeux, et cependant révélatrice.
Le lobby bruxellois est à l’oeuvre depuis des années pour transférer ce qui reste des activités de ce Parlement de Strasbourg à Bruxelles, où siègent déjà la Commission et le Conseil, dans le but -qui devrait être évident pour chacun- d’en faire en quelque sorte le Washington DC du nouvel Empire eurocratique. Mes collègues députés européens français, flamands, allemands de la Coordination des droites européennes furent quant à eux unanimes dans leurs défenses de Strasbourg comme Siège du Parlement Européen, au sujet duquel nous avons, avant tous les autres, tiré la sonnette d’alarme.
Or, sous prétexte de réunion du Bureau du Parlement « étendu à tous les députés », concept absurde et illégal, mais créé pour la circonstance, le Président socialiste Baron Crespo a réussi à imposer, en violation des traités et du règlement de cette Assemblée, des réunions plénières à Bruxelles où s’édifiait parallèlement, sur fonds privés, dans l’illégalité la plus totale, un hémicycle qui fut, une fois achevé, loué à prix d’or au Parlement aux termes d’un bail exorbitant conclu par ce même président dans les dernières heures de son mandat. De « Bureau élargi à tous les députés”, on est passé au concept de “mini-sessions” de quelques heures, puis de 24h ; puis de 48h : les “ mini-sessions ” de Bruxelles tendent à devenir des “ maxi-sessions ”, cependant que parallèlement on réduisait la durée de celles qui ont lieu à Strasbourg. Chacune de ces violations des traités et des accords internationaux aurait du trouver sur son chemin toute l’énergie des responsables politiques français, au delà des clivages partisans, à commencer par la mairesse de Strasbourg, elle-même euro-député, qui aurait du mobiliser contre de telles manoeuvres tous les députés sans exception, qui, comme nous, étaient prêts à l’épauler. Par faiblesse, par aveuglement, par complicité ou par sectarisme, personne n’en a rien fait. Le fameux compromis d’Edimbourg qui garantissait 12 sessions à Strasbourg, fruit d’une timide réaction du Gouvernement français, a été ouvertement bafoué. Jusqu’à ce que la Cour de justice en réaffirme le principe, ce qui n’a eu d’autre effet que de réduire de cinq jours à quatre (en fait, à trois) la durée des « semaines » de session. L’unique réaction a été la construction d’un quatrième hémicycle de ce Parlement, édifié à grand frais, après celui de Luxembourg, celui que nous occupions naguère à Strasbourg, et celui qui fut édifié et loué à Bruxelles dans l’illégalité totale que nous venons de décrire. Ce projet pharaonique achevé, les quatre cinquièmes des activités parlementaires européennes sont déjà passés à Bruxelles. L’effondrement hautement symbolique du toit de ce nouveau parlement fera hélas le reste.
Mais, si cette affaire est symbolique, soit de l’incurie, soit de la collaboration volontaire, et en tous cas de la corruption des élites politiques face aux forces euro-mondialistes, abandonnant le dépôt de l’indépendance nationale qu’elles ont pourtant mission de chérir et de conserver, il est des questions beaucoup plus graves que celle du siège. Ce sont les diverses étapes par lesquelles se réalise progressivement l’Union Soviétique Européenne : ensemble dont les dirigeants ne sont pas choisis par les peuples, et souvent même totalement inconnus d’eux, qu’ils ne peuvent par conséquent ni contrôler ni révoquer, et qui cependant tendent à régir tous les domaines de la vie politique, économique, sociale, et jusqu’aux aspects les plus intimes de la vie de plus de quatre cent millions d’européens. Ensemble qui a depuis longtemps dépassé le stade de la discussion entre la forme fédérale et la forme confédérale, et qui agit désormais directement dans la vie intérieure de nos nations, à la façon d’un Etat centralisé dont la France-et les autres-, de surcroît démembrés, ne seraient plus que des collectivités locales.
L’Eurocratie de la sorte, Parlement compris, légifère sur tout. Sur la largeur des béquilles des cyclomoteurs, sur le point de savoir si le corbeau freu, la pie grièche, le choucas des clochers, doivent ou non être protégés, par une réglementation unique applicable de l’Algarve à la Laponie et de Brest à Nicosie, sur le changement de prénom des transexuels, sur la teneur en graisse du chocolat, etc.
Cette évolution de type totalitaire ne va pas sans rencontrer des résistances, mais celles-ci, lors même qu’elles ont le droit pour elles, sont systématiquement occultées, contournées, méprisées. Ainsi par exemple, le 29 mai 2005, par 15 millions et demi de suffrages, le peuple de France, à une large majorité, et contre la volonté politique de 90% de la classe parlementaire, disait non à la Constitution européenne, non à la disparition de la France, non au Super-Etat Eurocratique sur lequel les peuples n’auraient aucun contrôle, non aux forces obscures du mondialisme, non à la dictature des intérêts abjects de la finance anonyme et vagabonde, non aux politiques Euro-mondialistes qui ruinent nos économies, nos emplois et notre pouvoir d’achat.
Pourtant aujourd’hui, par un incroyable camouflage qui masque le camouflet que lui a infligé sa classe politique, le même peuple s’est vu cyniquement imposer le même texte.
Car tous les dirigeants européen qui ont encore un reste d’honnêteté intellectuelle le disent en effet, par franchise, ou par cynisme : de la chancelière allemande Angela Merkel à l’ancien Président du Conseil italien Giorgio d’Amato, du ministre des Affaires étrangères néerlandais Karel de Gucht au Premier Ministre luxembourgeois Junker, et même Valéry Giscard d’Estaing, le père de la Constitution européenne de 2005 rejetée par le peuple : le traité de Lisbonne n’est ni “mini”, ni “simplifié”. C’est la Constitution européenne bis ! Imposer sous une autre forme aux Français exactement le texte même qu’ils ont rejeté, c’est un véritable coup de force contre le peuple, et ce coup de force a lieu dans une indifférence que nous sommes les seuls à briser !
Le Super-Etat européen comporterait : des institutions anti-démocratiques : un Président non élu qui n’aura de comptes à rendre à personne ; la Commission de Bruxelles, véritable gouvernement eurocratique mais où tous les pays ne seront plus représentés et d’où même, fait inouï, la France pourrait être complètement absente ; un Quasi-Ministre des Affaires Etrangères et de la défense , inféodé aux Etats-Unis et à l’OTAN , qui pourrait nous entraîner dans des guerres qui ne sont pas les nôtres : hier en Irak ou contre la Serbie, demain contre l’Iran ou ailleurs…
Des décisions prises à la majorité dans presque tous les domaines (économie, social, immigration…), sans plus aucune garantie pour nos intérêts vitaux ni d’ailleurs pour ceux des autres nations. Décisions supérieures comme on l’a dit, à notre droit national et même à notre Constitution.
La France ne sera plus qu’une collectivité locale asservie, morcelée, écartelée en Euro-Régions ou en Euro-Länder, que préfigure déjà le découpage de son territoire depuis les élections européennes de 2004. L’Eurocratie, se verrait bien en effet comme unique interlocuteur de 200 régions d’Europe en position de quémandeurs de subventions, et plus docile que des Etats-Nations qui peuvent refuser de se laisser broyer, et lui résister comme le Danemark résista à Maastricht et comme l’Irlande résiste au traité de Lisbonne.
L’euro-mondialisme destructeur est toujours là : Un libre-échange international sans protection, facteur de concurrence déloyale, de fermetures ou de délocalisations d’entreprises. Une prétendue “libéralisation” des services, qui tirera des millions de salaires vers le bas… Une Banque centrale européenne qui commande nos finances, donc notre économie, donc notre politique sociale depuis Francfort sans aucun contrôle, ni de la part des autorités des Etats-membres, ni même, ce qui est proprement stupéfiant, de la part des institutions politiques européennes. Dans cette Europe sans frontières et sans identité, Bruxelles décidera des autorisations d’entrée dans toute l’Union Européenne, donc en France. Toutes les politiques de visas, immigration, asile, nous échapperont. Une fois admis dans un pays, tous les étrangers non-européens acquièrent le droit de s’installer librement dans les autres : en toute légalité, des centaines de milliers de clandestins régularisés par un autre Etat pourront venir vivre chez nous, sans qu’on nous demande notre avis. On refuse de définir les frontières de l’Europe, et les conditions d’adhésion presque exclusivement idéologiques et administratives sont tellement larges que demain, l’Ouzbékistan ou l’Algérie pourraient en devenir membres. Le préambule du Traité refuse de reconnaître les racines chrétiennes de l’Europe pour mieux intégrer la Turquie, dont on continue à négocier l’adhésion, quoi que prétende Sarkozy. Elle serait le pays le plus puissant de la nouvelle “Eurocratie”.
Aujourd’hui, pour faire passer un texte aussi contraire au véritable génie de l’Europe, aucun gouvernement, sauf en Irlande, ne veut de référendum, parce que, comme l’a declaré Nicolas Sarkozy devant la conférence des Présidents de Groupe du Parlement Européen, ils savent que les peuples diront “non”. Mais en France, ce que le peuple a fait, seul le peuple peut le défaire !
C’est pourquoi, et quelle que soit l’issue de cette procédure, les Nationaux dénient par avance à ce texte toute légitimité ; ils ne l’acceptent et ne l’accepteront pas plus que leurs pères n’ont accepté le honteux traité de Troyes qui livrait la France à l’étranger, pas plus que les Etats-Généraux n’ont reconnu le traité de Madrid par lequel le roi prisonnier François 1er abandonnait la Bourgogne à l’Empereur Charles Quint, pas plus que les Alsaciens et Lorrains de Moselle n’ont accepté le traité de Francfort qui en 1871 les abandonnait à l’Allemagne !
C’est pourquoi, la poignée de résistants que nous sommes ne craint pas de ramasser dans le caniveau où ils l’ont jeté le drapeau lacéré de la patrie.
C’est pourquoi, dans la grande solidarité qui doit unir les patriotes et tous ceux dont les mêmes forces obscures menacent l’identité, nous allons édifier l’union des Patriotes, avec nos amis autrichiens, bulgares, italiens, britanniques, flamands et wallons, serbes et croates, russes et ukrainiens, et beaucoup d’autres encore.
Je veux encore faire litière d’un élément de propagande mille fois ressassé. Lorsque par exemple ils ont été placés devant la nette victoire du « NON » au projet de ratification du traité constitutionnel européen, les partisans de l’Eurocratie ont dressé un sombre tableau de la situation. Comme ils le font toujours, ils reprochaient aux nationaux d’agiter, contre la construction européenne, des peurs injustifiées. Ce sont eux en réalité qui les agitent, en laissant entendre qu’il n’y a d’autre alternative que l’Eurocratie boulimique ou le retour aux conflits passés qui ont opposé et déchiré les nations. « Si vous êtes contre la Constitution, c’est que vous voulez refaire la guerre à l’Allemagne » nous a-t-on, en substance, seriné presque dans ces termes.
Ce qui restera
Pourtant, la nette victoire du NON n’a pas été la fin du monde. Quoi qu’on en ait dit, il n’y a pas eu de résurgence des antagonismes heureusement disparus. Ce n’est d’ailleurs pas l’indépendance nationale qui a provoqué les guerres civiles européennes que furent les conflits mondiaux ; ce sont au contraire les menaces contre l’indépendance nationale, que nos voisins n’exercent plus.
Il doit être clair que nous sommes des gens parfaitement raisonnables, et que nos positions ne conduisent pour notre pays à la perte d’aucun bénéfice.
Les nationaux n’entendent porter aucune atteinte à ce qui relève des perfectionnements du « droit des gens européen » que nous décrivions à l’instant, et notamment :
- au principe de l’intangibilité des frontières,
- à l’arbitrage pacifique des différends,
- à la sécurité mutuellement garantie, (dont l’UEO aurait pu être le cadre si elle avait été absorbée par l’Union Européenne au lieu que cette dernière s’en remette à l’OTAN sous contrôle américain.)
- et, pourquoi pas, à la concertation entre les délégués des peuples d’Europe, ministres ou parlementaires, notamment dans ce haut lieu chargé d’histoire et de symboles qu’est la ville de Strasbourg, siège à temps partiel, et très menacé, du Parlement.
Ils savent, certes, que le maintien du statu quo n’est pas la solution de tous nos problèmes. Juridiquement, le Traité de Nice resterait en vigueur – dont Valéry Giscard d’Estaing nous dit aujourd’hui qu’il est le plus défavorable aux intérêts de la France que l’on ait jamais conclu. Mais Jacques Chirac et Lionel Jospin, qui l’avaient négocié, lorsqu’ils présidaient le Conseil Européen, présentaient à l’époque comme une considérable avancée.
Nous resterons donc avec ce dispositif, susceptible de renégociations dans la pratique, comme M. Delors l’a reconnu à demi-mot.
Que l’on ne vienne pas dire que cette perspective d’une renégociation est utopique ou que les textes ne la prévoient pas. La France a, dans le passé, pratiqué la politique dite « de la chaise vide », et elle avait obtenu le « Compromis de Luxembourg », qui lui donnait satisfaction.
Elle peut surtout à cet égard mettre en œuvre la clause de réciprocité contenue dans l’article 55 de sa constitution, jamais invoquée jusqu’à présent. Il ne manquerait pas de motifs pour l’invoquer, ne serait-ce que les illégales manœuvres menées contre Strasbourg, en violation des traités, évoquées plus haut.
Renouveau européen
Les nationaux ont donc raison de vouloir empêcher le train fou qu’est aujourd’hui devenue l’Union Européenne d’aller dans le précipice. Et plus raison encore, si elle y va, de vouloir sauter du train en marche. Que l’augmentation indéfinie des domaines d’intervention, véritable machine à broyer les identités nationales, se trouve bloquée, n’a de soi, aucun caractère « négatif ». Le processus d’adhésion de la Turquie serait, au moins provisoirement, entravé. La boulimie de compétences de l’Union européenne serait enfin remise en cause. Ceci obligerait donc à recentrer la coopération sur des projets précis, chiffrés, identifiables quant à leur rapport coûts-avantages : Airbus, Ariane, le CERN (Centre Européen de Recherche Nucléaire sur la structure de la matière). Mais aussi, par exemple, les bourses d’étudiants Erasmus, ou les projets trans-européens de liaisons fluviales, ferroviaires, aériennes, le système européen de positionnement par satellite Galileo, toutes actions légitimes de coopération qui n’ont aucune raison de s’arrêter, au contraire.
En refusant l’adhésion de la Turquie, non pas pour des motifs humiliants à l’égard de cette grande nation, mais pour la seule raison qu’elle n’est pas, ni sur le plan culturel, ni sur le plan linguistique, ni sur le plan religieux, ni même sur le plan historique, un état européen, nous sommes des défenseurs plus conscients et plus exigeants quant à l’identité européenne que nos adversaires prétendus «européistes ».
De même, en réclamant que cet ensemble européen, à l’intérieur duquel les cloisons avaient sauté, mais qui devait en être pourvu sur ses limites extérieures, devienne un ensemble cohérent, raisonnablement protégées sur son pourtour à l’égard des flux financiers, des flux migratoires, des invasions de produits fabriqués à vil prix par les millions d’ouvriers sous-payés du tiers-monde, ce qui n’est plus le cas depuis que cet espace a été intégré dans l’Organisation Mondiale du Commerce, nous sommes à tout prendre plus soucieux des intérêts de l’Europe que nos adversaires. Et nous sommes de meilleurs défenseurs qu’eux des traditions européennes, quand nous défendons la famille, la vie, les corps intermédiaires, le droit naturel, la personne.
Si toutefois par extraordinaire, le système de l’Union Européenne devait définitivement se bloquer, d’autres coopérations internationales seraient parfaitement concevables.
Alliance franco-russe
Une nouvelle organisation internationale pourrait naître, incluant par exemple des pays et des peuples européens qui ne font pas encore partie de l’Europe (Serbie, Ukraine, Biélorussie, Russie). Nous pourrions renouer avec une tradition nationale naturelle en termes de géopolitique, qui va du mariage d’Anne de Kiev avec le futur roi de France, il y a presque mille ans, à l’Alliance Franco-Russe scellée à la fin du XIXe siècle. Il ne s’agirait pas ici comme par le passé d’une alliance défensive, mais de faire que l’Europe ainsi réconciliée surmonte sa grande division, qui remonte au partage de Théodose au IVe siècle entre Empires latin et grec, et à la séparation sous Photius du catholicisme et de l’orthodoxie. Cette ligne de partage est très exactement le méridien de Sarajevo, ligne d’affrontement de 1914 à nos jours. Refaire l’Unité de l’Occident, abroger les conséquences politiques de la division de l’Europe chrétienne, participer -à profits partagés- à la mise en valeur des richesses naturelles de ces immenses espaces ; voilà un champ d’action nouveau.
Ou une union latine
Une autre piste supposerait une volonté politique nouvelle, en particulier dans les autres pays concernés. Elle requerrait la coopération des Etats latins : France, Espagne, Portugal, Italie, Roumanie, avec la mise en œuvre de leurs réseaux d’influence pour les trois premiers de ces pays, influence tenant aux liens historiques, culturels, économiques, politiques avec de nombreux pays dans le monde. Les quelques 52 Etats francophones, hispanophones, lusophones représentent une masse d’un milliard d’êtres humains. Une force culturelle capable de faire contrepoids à la domination culturelle jusqu’ici incontestée du monde anglo-saxon. Une force politique décisive dans le concert des Nations-Unies. Un terreau pour un vrai développement du tiers monde, fondé sur l’intérêt réciproque de tous les acteurs concernés.
Sursaut national
En tout état de cause, au plan national, la victoire des nationaux ne sonnerait pas seulement la fin d’une illusion, mais aussi celle d’un alibi. Celui de nos dirigeants politiques dans la constante évasion de leurs responsabilités. «C’est à cause de Bruxelles» ne pourrait plus être l’excuse de l’inaction, des promesses non tenues, des réformes en souffrance. Cette victoire peut être l’occasion d’un sursaut national, renouveau dans lequel nous ferions enfin jouer, au service de nos intérêts légitimes, les atouts réels de la France que sont :
- Les ressources d’un territoire le plus vaste, le plus diversifié, et le plus hospitalier de l’Europe occidentale. Et qui pourrait sans difficulté héberger 100 ou 120 millions de Français, si l’aménagement du territoire était plus harmonieux, et si nos villages étaient aussi peuplés qu’au Moyen Age, quand les rendements agricoles étaient cependant vingt fois inférieurs à ce qu’ils sont aujourd’hui.
- Les ressources d’un territoire qui a ses prolongements dans ce qui nous reste de l’acquis de nos marins, pionniers, découvreurs : les confettis d’un ancien empire répartis encore sur tous les océans : Atlantique, Indien, Pacifique, Mers Australes.
- Un domaine maritime qui, en vertu de la Convention de l’ONU de Montego Bay sur le droit de la mer, événement majeur mais méconnu, est le troisième du monde. A l’heure où l’avenir de l’humanité se joue davantage dans les mers que dans l’espace.
- Une influence culturelle qui peut revivre pour autant que des Français comme M. Rocard ne scandalisent pas nos collègues italiens du Parlement européen en affectant de s’exprimer en anglais (sans pour autant être d’ailleurs plus compréhensibles que lorsqu’ils s’expriment en français).
- Un savoir faire exceptionnel de concepteurs, d’ingénieurs et de techniciens, capables de construire les meilleurs avions, les meilleurs trains, d’excellentes voitures, et beaucoup d’autres réalisations encore.
- Un art de vivre que le monde entier nous envie et qui ne s’altère que par la progression de l’égoïsme social et de l’insécurité.
A chacune de ces consultations populaires qui se font de plus en plus rare –et pour cause !- on a voulu faire peur aux Français en leur disant que la claque fantastique que constituerait un rejet de l’Eurocratie contre l’établissement politique qui la soutient ouvrirait une crise de régime. Mais quand le régime est pourri, la crise de régime est salutaire !
Nous ne sommes pas chargés d’organiser la survie d’une classe politique solidaire dans la corruption financière (ainsi notamment que l’a montré, entre autres, l’affaire des lycées d’Ile-de-France), solidaire dans le reniement de ses promesses, solidaire dans le mensonge institutionnel et la duperie des Français, solidaire dans l’effroyable décadence morale, solidaire dans le trucage des modes de scrutin, solidaire dans l’instauration de la police de la pensée dans le pays autrefois le plus libre du monde.
Nous ne sommes pas chargés de la survie du système, nous sommes chargés de la survie de la France.
Le 29 mai 2005, lors du referendum sur la Constitution européenne, par son NON fort et clair, elle a manifesté comme un malade qui sort du coma, son premier réflexe, celui de l’instinct de conservation, celui d’un peuple qui ne veut pas mourir ! A nous de lui offrir l’occasion de sa renaissance !