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« La question centrale du XXIe siècle va être celle de l’identité »

MINUTE n°2377 du Mercredi 24 Septembre 2008
ENTRETIEN AVEC BRUNO GOLLNISCH

Député au Parlement européen, vice-président du Front national en charge des affaires internationales et du programme, Bruno Gollnisch, ce n’est pas un scoop, est candidat, le moment venu, à la succession de Jean-Marie Le Pen. Mais au fait,quelle est sa vision de l’identité nationale ? Et l’Union européenne: on y reste ou on en sort ?

Minute : Vous êtes candidat à la succession de Jean-Marie Le Pen. Marine Le Pen l’est aussi. Et, depuis samedi, Jean-Claude Martinez l’est également. Que pensez-vous de cette candidature surprise ?

Bruno Gollnisch : J’ai toujours dit qu’en 2010 Marine et moi ne serions sans doute pas les seuls candidats. Jean-Claude a parfaitement le droit de l’être aussi comme toute personne qui partage notre combat. Les militants départageront les candidats le moment venu. Je suis un peu peiné, toutefois, qu’il me présente comme appartenant à « un courant traditionnel proche de la grande bourgeoisie française ». J’aimerais bien que les classes dirigeantes partagent nos convictions pour la défense de l’identité nationale, affirment le primat de la morale sur le politique et du politique sur l’économique, et défendent les racines spirituelles de notre pays ! Je constate hélas que le niveau social est souvent inversement proportionnel aux qualités de courage moral, ce qui est un signe assez sûr de la décadence de notre pays. Je l’inviterai à venir me voir avec les ouvriers et paysans qui partagent notre combat patriotique dans ma région.

Ces candidatures vous semblent-elles représenter trois approches différentes du nationalisme ?
C’est ce qu’il faudra dire à un moment donné, car je trouverais tout à fait navrant qu’on en reste à une compétition de personnes. Moi, je n’ai rien à prouver dans ce domaine. J’ai été le
coordinateur des trois programmes successifs du Front national, en y incorporant le travail de dizaines de personnalités particulièrement qualifiées, au nombre desquelles d’ailleurs Jean-Claude Martinez. C’est à ceux qui s’en démarquent aujourd’hui de faire connaître en quoi leurs positions sont différentes. Ceci étant dit, je n’éluderai pas le débat d’idées. Ceux qui veulent bien s’intéresser à ce que je suis et à ce que je pense plus personnellement peuvent se procurer l’ouvrage La Réaction, c’est la vie(1),qui est un entretien que j’ai eu il y a quelques années avec un éditeur franco-libanais, Richard Haddad. En outre, je préparais depuis quelque temps, en dehors de tout contexte interne au Front, une petite brochure pour résumer quelques-unes de mes convictions et propositions. Je la publierai bientôt.

« Il faut revenir à la notion de préférence européenne »

La prochaine échéance électorale, c’est, l’an prochain, les européennes. Le FN est « contre cette Europe-là ». Mais pour quelle Europe est-il ?
D’abord le constat : Bruxelles fait preuve d’une boulimie infinie de compétences, de telle sorte que c’est maintenant Bruxelles qui dirige, et les parlements et les gouvernements nationaux appliquent. Il est bien évident que cette situation ne peut pas durer. Alors que peut-on garder ? Je crois qu’il faut garder tous les textes positifs qui sont le fruit de la coopération pacifique entre nations et qui ne sont pas nécessairement liés au cadre de l’Union européenne. Par exemple le principe de l’intangibilité des frontières, qui, contrairement à ce que l’on dit, ne sont pas sources de conflit mais facteurs de paix comme nous le savons en Europe depuis cinquante ans. Par exemple aussi, et c’est essentiel, le principe de l’arbitrage pacifique des différends, qu’il faut renforcer en restaurant ce grand acquis de la civilisation européenne qu’est le droit international, lequel comporte le principe de non-ingérence. S’il avait primé sur toute autre considération, il nous aurait interdit par exemple de faire la guerre à la Serbie et de participer à l’épuration ethnique des Serbes du Kosovo ! Il faut garder aussi des coopérations concrètes qui fonctionnent et dont vous noterez qu’elles ont pour point commun d’avoir été menées hors du cadre de l’Union européenne : la fusée Ariane ; l’avion Airbus ; l’« anneau franco-suisse », ces recherches exceptionnelles sur la structure de la matière menées par le Centre européen de recherches
nucléaires ; mais aussi le projet de satellite Galileo ; les échanges culturels Erasmus, etc.
Ce qu’il faut arrêter en revanche, c’est tout ce qui détruit les identités nationales et les souverainetés des Etats membres et particulièrement de la France. C’est, d’abord, l’ouverture forcée au mondialisme, qui est quand même paradoxale de la part d’un ensemble
régional qui avait été conçu sur le principe de la préférence européenne ! Ce devait être en effet une zone de libre-échange où l’on supprimait certes les barrières à l’intérieur, mais évidemment pas à l’extérieur. Or en ouvrant les frontières de ce grand ensemble au mondialisme, on l’a livré pieds et poings liés aux invasions de flux de personnes par l’immigration, aux invasions de capitaux par les fonds de pension, notamment américains, qui viennent acheter ce qu’il nous reste d’industries, ou aux invasions de marchandises fabriquées à vil prix dans les pays du tiers monde, de sorte que cette organisation ne procure plus aucun bénéfice. Il faut revenir à la notion de préférence européenne.

Concrètement, comment fait-on ? On réforme les institutions européennes pour en revenir à la conception originelle ou on sort de l’Union européenne ?
On renégocie et, si la négociation échoue, on invoque le principe de réciprocité qui figure dans notre Constitution. L’article 55 de la Constitution française, qui n’est jamais invoqué, dispose que nos lois ne sont inférieures à nos engagements internationaux que sous réserve que ces engagements soient respectés. Or ils sont violés de multiples façons ! Donc on peut très bien suspendre la supériorité des traités européens sur nos lois et monter autre chose à côté, comme la réactivation de l’Union latine, qui existe toujours théoriquement mais est en sommeil, comme aussi une coopération avec l’Est avec la mise en commun de l’exploitation des richesses naturelles considérables qu’il y a là-bas, en renouant avec la tradition historique de coopération entre la France et la Russie.

Et l’euro, on « en fait des confitures » ?
Là encore, il faut d’abord négocier et tenter de réformer. On peut essayer de faire en sorte que l’euro devienne une monnaie de réserve internationale. Il faut se souvenir que la deuxième guerre du Golfe a été déclenchée à partir du moment où Saddam Hussein, dans le cadre du programme « pétrole contre nourriture », a exigé d’être payé en euros. C’est aussi une revendication de l’Iran. Efforçons-nous de déboulonner le monopole du dollar, dont on voit bien les conséquences catastrophiques qu’il a. Si l’euro devenait une monnaie de réserve, on pourrait faire comme les Américains, qui financent leur déficit en faisant marcher la planche à billets, ce qui est une véritable agression économique et financière contre laquelle personne ne proteste. Soit on fait cela, et l’on refait passer la Banque centrale européenne sous contrôle politique, soit on en sort. C’est parfaitement possible. Les monnaies des pays baltes ont été parfaitement viables après que ceux-ci ont quitté la Russie et se sont affranchis du rouble.

« L’ethnicité participe de l’identité de la France »

Croyez-vous à la possibilité de constituer une « Europe puissance » ?
Je crois que la puissance résulte d’alliances mais que ces alliances sont ponctuelles. Il y a des circonstances où nous pouvons avoir des intérêts communs avec tel ou tel pays, et d’autres absolument pas. L’idée de l’« Europe puissance » est une chimère dans la mesure où une addition de faiblesses ne fait pas une force. En revanche, si chacun est fort, nous pouvons, par des alliances, nous faire entendre dans tel ou tel domaine. On peut se répartir les constructions d’armements pour réaliser des économies d’échelle. Il est particulièrement regrettable par exemple que le dernier Livre blanc militaire ralentisse le renouvellement de notre flotte de surface (frégates),qui doit se faire en commun avec l’Italie.

La priorité est donc de renforcer la France ?
Je ne vois pas pourquoi on renoncerait au cadre français. Je vais sans doute choquer un certain nombre de gens mais je crois que la France pourrait accueillir sans problème 120 millions de Français si nos villages étaient aussi peuplés qu’au Moyen Age, alors que les rendements agricoles étaient bien inférieurs. Pourquoi ? Parce que nous avons le territoire le plus vaste d’Europe occidentale, le plus équilibré et le plus productif. Nous avons aussi le troisième domaine maritime du monde grâce à ce qu’il nous reste de l’empire. C’est capital, parce que l’avenir de l’humanité se joue certainement davantage encore au fond de la mer que dans l’espace. Quand j’ai commencé mes études de droit international, on nous apprenait que la largeur des eaux territoriales, c’était trois miles marins, cinq kilomètres, la portée d’un boulet de canon au XVIIIe siècle. Maintenant, la largeur de la « zone économique exclusive » qui appartient à l’Etat riverain, c’est 200 miles marins. Autrement dit, l’îlot de Clipperton détermine une zone de 700 kilomètres de diamètre dans le Pacifique, soit pratiquement la surface de la France. C’est une des possibilités que nous avons pour notre développement en dehors du cadre paradoxalement étriqué de l’Union européenne.

Carl Lang disait récemment dans nos colonnes que la priorité est de stopper le « processus de colonisation ethnique » de la France. Partagez-vous ce point de vue ?
C’est certainement l’une des priorités les plus urgentes. L’immigration, du fait qu’elle est massive, entraîne la création d’enclaves étrangères et génère des comportements hostiles. Il n’y a malheureusement pas d’exemple dans l’histoire que des communautés hétérogènes cohabitent sur le même territoire de façon éternellement pacifique. Les derniers exemples que l’on citait étaient la Bosnie et le Liban, on a vu ce que ça a donné. Il est certain que le fonds de la population française est issu de souches celtique, latine et germanique. C’est ainsi. L’ethnicité participe évidemment de l’identité de la France. Je ne suis pas un défenseur de la pureté raciale, chacun sait que je suis marié à une Japonaise. Mais ma femme serait d’accord avec moi pour dire que s’il y avait dix millions de Japonais en France, ça poserait un problème à la France, et de même au Japon s’il s’y trouvait dix millions de Français ! Pas à cause du tempérament des uns ou des autres mais en vertu de mécanismes sociologiques
qui sont exactement du même ordre que le fait qu’une greffe d’un donneur dont l’ADN n’est pas compatible avec le receveur est généralement rejetée.

« S’il y a des gens à qui cela ne plaît pas… »

Alors que faire ?
Inverser le courant. Outre l’expulsion sans faiblesse des délinquants, faire en sorte que le flux de gens qui sortent soit plus important que celui des gens qui entrent, ce qui peut tout à fait se faire dans la dignité et en accord avec nombre de dirigeants africains qui souhaitent que leurs ressortissants reviennent participer au développement de leur pays. Et bien sûr instaurer la préférence nationale, ce qui aura pour effet de faire partir tous ceux qui ne sont chez nous que pour profiter des avantages sociaux.

Cela implique de sortir de l’espace Schengen…
Absolument. A moins que les pays formant l’espace Schengen ne fassent leur cette priorité, ce qui n’est pas impossible quand on voit l’évolution des mentalités dans certains pays, notamment aux Pays-Bas, qui fut longtemps le temple du prétendu anti-racisme « politiquement correct », et où le rejet de l’islamisation est maintenant stupéfiant.

La France compte un nombre considérable de Français d’origine immigrée, soit par naturalisations, soit par naissance en vertu du Code de la nationalité. Sont-ils des Français comme les autres ? Faudra-t-il revenir sur l’octroi de la nationalité à certains,
sachant que beaucoup de jeunes Français d’origine maghrébine manifestent de plus en plus de signes d’appartenance religieuse comme un défi lancé à la France ?(2)
Nous devrons assumer les fautes des gouvernements qui nous ont précédés, c’est une question d’honneur et de courage. Deuxièmement, les réflexes identitaires de jeunes qui ont la nationalité française se manifestent parce qu’ils méprisent une société qui n’est plus sûre de ses valeurs et de son identité. Cessons l’autoflagellation et les repentances à répétition. Soyons respectables, et nous serons respectés. En outre, nous demanderons une option claire aux doubles nationaux. Ils devront choisir. Et nous mettrons en œuvre les règles de déchéance puis d’expulsion des naturalisés ayant commis crimes et délits. S’agissant de l’islam, le fait que le Front national n’est pas et ne doit pas devenir un parti confessionnel ne l’empêche pas de défendre une identité française profondément marquée par le christianisme. Nous devons distinguer, ce qui ne signifie pas séparer, le temporel et le spirituel. Nous n’avons pas de raison de porter atteinte à la liberté de conscience ou à la liberté de culte des musulmans français. Mais nous sommes cependant en droit d’imposer à ceux qui sont arrivés récemment chez nous, ne sont pas français ou le sont depuis moins longtemps que les autres, non seulement nos lois, mais aussi mais nos moeurs, nos coutumes et même nos goûts – je pense par exemple aux cantines scolaires. S’il y a des gens à qui cela ne plaît pas, ils peuvent toujours revenir dans leur pays d’origine. Si l’on a le courage de le dire et de l’appliquer, tout rentrera dans l’ordre. La défense de notre souveraineté, donc de nos libertés, passe par la défense de notre identité. De la même façon
que le débat politique, au cours du siècle passé s’est articulé essentiellement autour des questions économiques et sociales entre tenants du libéralisme et tenants du socialisme, la question centrale du XXIe siècle est et va être celle de l’identité. C’est pourquoi nous avons un avenir.

Est-ce que vous pensez que votre personne peut répondre aux attentes du peuple français ? Que ceux-ci, comme dirait Jean-Marie Le Pen, ont envie d’avoir un grand-père comme président de la République ?
[rires] J’ai dix-huit ans de plus que Marine, j’en ai vingt-deux de moins que Jean-Marie, je crois que ça fait une bonne moyenne… Je suis très exactement de la génération de gens dont j’entends « un peu » parler, pas seulement au passé mais au présent et même au futur. Des gens qui s’appellent Nicolas Sarkozy, François Fillon, Bertrand Delanoë, Ségolène Royal, Jean-Louis Borloo, Philippe de Villiers, etc. Je suis à un âge où l’on peut conjuguer une certaine vigueur et une réelle expérience…

Propos recueillis
par Céline Pascot

1. Editions Godefroy
de Bouillon, 2003.
2. Voir le dossier
du numéro de septembre
du « Choc du mois » n° 25 :
« Immigration, une chance
pour qui ? »,
6,50 euros port compris.
Sur commande à : Sacemm,
51 bld Garibaldi, 75015 Paris

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