Comme le note Jeanne Smits, « cette initiative qui fut approuvée par l’ONU le 22 avril 2009 en assemblée plénière veut, enfin, reconnaître les droits de Mère Nature, 60 ans après la proclamation des droits de l’homme, par une Déclaration universelle de même force. Elle bénéficia de l’appui de plus de 60 pays membres. Son auteur? Leonardo Boff, théologien de la libération, qui put s’adresser à l’assemblée plénière grâce à l’hospitalité de la délégation brésilienne . Evo Morales est connu comme assurant la promotion dans son pays de l’idolâtrie, du paganisme et du culte de la Pachamama, la planète-mère».
On l’aura compris pas de quoi choquer les amis de Cécile Duflot et de José Bové ou les lecteurs de Libération, à ce détail près que le discours prononcé par M. Morales, réélu triomphalement à la tête de l’Etat bolivien en décembre 2009, est désormais sous le feu des critiques des organisations homosexuelles. En effet, le président bolivien, de l’ethnie indienne aymara, s’est non seulement attaqué à la nocivité du Coca-Cola, « un déboucheur bien connu de toilettes», « à l’alimentation occidentale transgénique », à la pomme de terre néerlandaise «qui nourrit mais n’alimente pas», mais aussi, et c’est là le problème, « aux poulets chargés d’hormones féminines».
Selon lui, «quand les hommes mangent de ces poulets, ils connaissent des déviances dans leur être masculin», avant d’affirmer que «la calvitie, qui paraît normale, est une maladie en Europe, où presque tous les gens sont chauves» (sic). «C’est à cause de ce qu’ils mangent, tandis qu’au sein des peuples indigènes, il n’y a pas de chauves, parce que nous mangeons autrement», avait ajouté le président.
En Espagne, rapporte l’Afp, la Fédération nationale des lesbiennes, gays, transsexuels et bisexuels (FELGTB) a remis une lettre de protestation à l’ambassade de Bolivie à Madrid, car elle juge «homophobes» les propos de M. Morales. Le porte-parole du gouvernement bolivien, Ivan Canelas, a rétorqué que «ce n’est pas une nouveauté que le fait d’engraisser les animaux que nous consommons avec des hormones et d’autres produits provoque des troubles chez nos enfants».
Le « socialiste » Morales soutenu par l’internationale des « progressistes », lié à Chavez et au régime castriste par une même opposition à Washington, aurait donc commis ce qu’il convient d’appeler une « boulette ». D’autres rappellent cependant que le mouvement qu’il a présidé jusqu’en 2005 et qui l’a conduit au pouvoir, Movimiento al socialismo, s’est longtemps appelé, jusqu’à la fin des années 90, Movimiento al socialismo-unzaguista et que son socialisme, indiquait il y a peu un intéressant article paru sur le site voxnr, « n’avait que très peu de points en commun avec celui de la gauche occidentale ».
L’adjectif Unzaguista accolé à son parti rappelant la filiation de celui-ci avec « la doctrine d Oscar Únzaga de la Vega (1916-1959) qui, en 1937, fonda la Falange socialista boliviana (FSB), à l’imitation de la Falange Española de las JONS de José Antonio Primo de Rivera » ; l’idéologie des unzaguistes « pouvait se résumer en trois mots Dieu, patrie et foyer ».
Au nombre des spécificités de nationalisme bolivien, figure son « indigénisme », « ce pays étant très majoritairement peuplé de descendants d’indiens Quechua et Aymara, et de métis, tandis que les Boliviens de souche européenne représentent moins de 15% de la population. Le nationalisme de la FSB fut donc un indigénisme. Oscar Únzaga de la Vega prit ainsi soin d’écrire la première biographie de Tupaj Katari, un chef indigène qui dirigea, en 1780, une importante révolte des tribus indiennes contre la colonisation espagnole et il en fit la figure de référence du nationalisme bolivien. De plus la Phalange milita pour une réforme agraire qui rendrait la terre aux indiens et s’opposa aux grandes sociétés minières qui exploitaient durement un prolétariat entièrement composé d’indigène (…) ».
Dans les références et la doctrine de M. Morales, « il n’est pas difficile de retrouver de multiples traces d’unzaguisme, que ce soit son nationalisme indigéniste, sa défense du monde paysan, son hostilité aux Etats-Unis, sa référence à Tupaj Katari, etc. Alors de gauche Evo Morales ? Peut-être… Mais en tous les cas d’une gauche bien particulière et aux racines bien étranges, très différente de celle que l’on connaît en Occident ! ».