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Un monde de brut

Selon l’Afp, « La France disposait début octobre de 17 millions de tonnes de pétrole brut et de produits pétroliers dans ses stocks stratégiques, représentant 98,5 jours de consommation, soit plus que ses obligations internationales (90 jours). » « Théoriquement, ils doivent être utilisés seulement en cas de crise internationale. » Hier, le ministre de l’Economie François Baroin a déclaré que la France tablait « raisonnablement» sur un feu vert de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) pour puiser dans ses réserves stratégiques de pétrole afin d’endiguer le renchérissement des cours du brut. Interrogé sur France Inter, le Premier ministre François Fillon a estimé qu’«On peut utiliser ces stocks comme une sorte de tampon», «Mais, il ne faut pas en attendre des miracles sur la baisse du prix de l’essence.» La France a confirmé qu’elle soutenait une proposition américano-britannique visant à remettre sur le marché une partie des stocks stratégiques, qui donnent lieu à une coordination de la part de l’AIE.

Beaucoup mettent en doute l’utilité pratique de ponctionner les réserves actuelles, sachant que celles-ci seront à reconstituer dans quelques mois sans aucune certitude de pouvoir acheter un pétrole moins cher. La tendance lourde est en effet à l’augmentation continue du prix du brut du fait de la demande croissante des pays émergents. Ce qui entraîne l’utilisation de nouveaux gisements dont les conditions d’exploitation et de forage sont beaucoup plus onéreuses. Situation à laquelle s’ajoutera dans quelques mois le début effectif du boycott pétrolier de l’Iran, l’embargo décidé par l’Union européenne sur les importations de brut iranien, qui jouera à plein à partir de juillet…. Certes l’UE est très peu dépendante du brut iranien,  mais les tensions dans cette région du monde ne militent  pas pour des perspectives de baisses significatives du prix du baril.

Mais nous savons aussi, et Bruno Gollnisch l’a souvent signalé, que la conjoncture internationale sert trop souvent à justifier la flambée des prix. Or, le prix de l’essence est constitué principalement par la fameuse Taxe Intérieure de consommation sur les Produits Pétroliers (TIPP), un impôt indirect concernant tous les produits payé par les consommateurs comme la TVA que le gouvernement se refuse de baisser. En clair les taxes constituent l’un des éléments les plus importants du prix du litre (66 % pour l’essence et 56 % pour le gazole). C’est pourquoi Marine Le Pen a demandé une baisse immédiate du prix du litre à la pompe pour les Français.

 

Le site du quotidien Le Parisien donnait la parole à Luca Baccarini, de la société de conseil en investissement Energy Funds Advisors qui estime qu’« une utilisation tactique des réserves aura sûrement un impact sur le marché, mais il sera transitoire car le problème de fond, c’est le rapport entre une demande qui repart et une offre limitée par des contraintes de production, avec une marge de sécurité au niveau de capacités de production très limitée, de l’ordre de 1,5 millions de barils seulement. »

« Avec les sanctions contre l’Iran poursuit-il, on a mis le doigt dans un engrenage qui va peser sur le marché pétrolier physique pendant un bon moment. Les sanctions internationales vont conduire à une réduction des exportations pétrolières iraniennes de 500.000 à un million de barils par jour, ce qui va rogner la capacité de production supplémentaire», principalement concentrée en Arabie Saoudite.

Olivier Jakob, analyste chez Petromatrix, note pour sa part que « le recours aux réserves stratégiques est censé être la dernière cartouche, et si les pays occidentaux sont en train d’envisager sérieusement cette solution, cela prouve le manque d’engagement reçu de la part de l’Arabie saoudite pour palier l’absence du pétrole iranien. »

Le 8 mars dernier, Pierre Beylau dans Le Point,  soulignait aussi les graves conséquences d’une attaque militaire israélienne sur l’Iran pour l’ empêcher de mener à bien son programme nucléaire : « Un bombardement de l’Iran déclencherait une onde de choc incontrôlable : probable blocage du détroit d’Ormuz (avec envolée des cours du brut), embrasement des fronts Hezbollah libanais et Hamas palestinien. Une telle initiative, de l’avis des experts, ne résoudrait rien. Elle ne ferait, au mieux, que retarder le programme iranien. Tout en confortant Téhéran dans l’idée que seule la détention de l’arme nucléaire permettrait de sanctuariser le territoire iranien. C’était déja l’idée du Shah. »

Or, si Barack Obama « fait son possible pour dissuader les Israéliens de se lancer dans une aventure militaire qui risque d’embraser toute la région »,selon la presse israélienne « il aurait proposé à Benyamin Netanyahou (…) de livrer à l’État hébreu des bombes anti-bunker sophistiquées et des avions ravitailleurs si Israël s’abstenait de frapper l’Iran en 2012. Les Israéliens pourraient, en effet, être tentés de profiter de la campagne électorale américaine pour franchir le Rubicon. Obama se retrouverait dans une situation impossible et probablement contraint, politique oblige, d’approuver une opération qu’il aurait de toutes ses forces tenté d’empêcher. »

On le voit, la question du pétrole et celle du nucléaire restent par la force des choses intimement liées et les campagnes électorales s’invitent à plus d’un titre dans ce dossier, pas toujours dans le bon sens et pour la bonne cause…

 

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