Manœuvres qui ne sont peut être pas à mettre en cause dans la soudaine prise de conscience d’une ancienne du Front de Gauche (FG), la très fragile Anna Rosso-Roig qui vient d’annoncer pourquoi elle quittait le Rassemblement Bleu Marine (RBM). Dans Libération elle raconte qu’elle a été victime d’une erreur d’appréciation : «Avec toute la stratégie de communication qu’ils (les dirigeants du FN, NDLR) avaient mise en place, dit-elle, des gens comme moi ont eu l’espoir qu’ils enlèvent ce côté brutal … ».
Ex militante CGT et du PS à Marseille, candidate aux municipales en 2008 puis aux législatives de 2012 sous les couleurs du Front de Gauche, Anna Rosso-Roig avait rejoint le RBM il ya quelques mois. Dans le quotidien La Provence elle expliquait : «Marine m’a convaincue 150 000 fois », « Je ne suis pas passée au FN sur un coup de tête », même si l’élément déclencheur fut l’« agression grave dont a été victime un de (ses) proches et qui (l’a) fait fulminer sur l’impunité de certains ».
« La réalité n’est pas ce que me raconte le Front de Gauche », affirmait-t-elle, rappelant son opposition au mariage homosexuel en tant que «catholique pratiquante » et ses inquiétudes « au sujet de la montée de l’islam ». Toujours mesuré, Jean-Luc Mélenchon disait alors évoquant ce ralliement : «le FN fédère mieux les girouettes et les perchés que moi, je n’en suis pas jaloux. Dans ce cas précis, il fonctionne comme un vide-ordures »…
En fait de brutalité, nous le voyons, c’est peut être celle de nos adversaires que Mme Rosso-Roig n’a pas eu la motivation, le courage de supporter. Faire de la politique, a fortiori dans les rangs de l’opposition nationale, nécessite d’avoir le cuir épais…
La constance, la détermination, la loyauté, le respect de la parole donnée, autant de qualités en effet qui ne sont pas données à tout le monde. Ainsi, en mai dernier, actant le fait que 64% des sympathisants UMP souhaitent un accord électoral avec le FN, Arnaud Cléré , un agriculteur de 35 ans, militant du parti de Jean-François Copé, décidait de nouer une alliance avec le Front National. Un accord qu’il appelait de ses vœux pour les Municipales de 2014 dans sa commune de Gamaches située dans la vallée de la Bresle (Somme).
Aussitôt exclu de l’UMP, il refuse d’adhérer au FN mais annonce son adhésion au parti Souveraineté indépendance et liberté (SIEL) de Paul-Marie Coûteaux, qui présente ses candidats sous l’étiquette RBM. Il mène alors un début de campagne sous l’étiquette divers-droite, bien décidé à «battre l’équipe socialo-communiste au pouvoir depuis 30 ans » et compose une liste de 23 personnes, dont six colistiers catalogués officiellement comme frontistes.
Pour preuve de son attachement indéfectible aux valeurs du gaullisme, Arnaud Cléré avait ainsi symboliquement rendu hommage le 18 juin dernier au général De Gaulle dans le village de Huppy, en compagnie de M. Coûteaux, et du président exécutif de son petit parti, Karim Ouchikh. «Entre (l’UMP) et ma ville, j’ai choisi ma ville» disait alors M. Cléré, actant que le FN y réalisait régulièrement des scores supérieurs (environ 25%) à ceux de l’UMP (environ 15%).
Mais voilà, dimanche sur Twitter, il annonce sa volonté de retourner à l’UMP et a indiqué au site Rue 89 qu’il a parlé à Jean-François Copé à qui il a envoyé une lettre dans laquelle il confesse ses fautes et demande sa réintégration. S’inspirant de l’histoire élaborée récemment par Nadia Portheault, ex candidate d’origine maghrébine du FN à la mairie de Saint-Alban qui dit faussement avoir été victime de propos racistes (elle est attaquée en justice par le FN pour diffamation), M. Cléré, sous la dictée de M. Copé, affirme avoir « fait une erreur, celle de penser que le FN était un parti fréquentable. Quand on voit Marine Le Pen à la télévision, on ne peut pas imaginer à quoi ressemble l’arrière-boutique » (sic).
« J’ai envoyé une lettre recommandée au FN pour dire que je renonçais à toute investiture et à toute collaboration. J’ai de bonnes chances d’être réintégré à l’UMP, mes colistiers issus de la droite saine (sic) sont soulagés et moi aussi. J’ai un poids en moins sur le thorax. »Le FN est un parti « sectaire » et « dictatorial » poursuit-il. « J’ai très vite été choqué par les propos homophobes et xénophobes des militants (…). Lors d’une réunion, mi-octobre, à Hénin-Beaumont, des têtes de liste et de quelques colistiers du nord de la France, j’ai vu des tatouages de croix gammées sur deux ou trois personnes. Sur leurs bras. Après le déjeuner, j’étais reparti. Cela a été l’élément déclencheur. »
Des propos proprement délirants affirme Bruno Gollnisch , lui qui candidat du FN depuis trente ans, n’a jamais croisé un seul militant ou adhérent frontiste arborant ce type de tatouages. Le Secrétaire général du FN, Steeve Briois, a mis M. Cléré au défi d’apporter la preuve de ce qu’il avance et précisé que des suites judiciaires seront données aux affirmations de ce dernier.
Pour donner de l’écho à cette manœuvre d’intox, Jean-François Copé, invité hier du Grand Rendez-Vous Europe 1/Le Monde/i>Télé, a évoqué le cas Arnaud Cléré qui est, selon lui, la preuve que les gens ne confondent plus l’UMP et la bête immonde tapie bien au chaud au sein du FN. Pitoyable…
La ficelle est certes un peu grosse et ne trompera pas grand monde. C’est en tout cas ce que laisse entendre un sondage réalisé par l’institut Polling Vox publié lundi pour une petite annexe du Parti socialiste, l’Union des étudiants juifs de France (UEJF), qui lance opportunément « un observatoire du racisme dans les discours de campagne ».
Ainsi, 42 % des Français n’excluent pas de voter pour une liste soutenue par le Front National aux élections municipales. Parmi les sympathisants UMP, le cumul de ceux pouvant « certainement » ou « peut-être » voter pour une liste FN atteint 59 %, -contre seulement 9 % des sympathisants de gauche. Ce même sondage indique que 88 % des Français penseraient que « parmi les candidats présentés par le Front National il y a des personnes tenant des propos racistes ou antisémites », mais 40 % disent penser qu’il n’y en a pas davantage que dans les autres partis.
Pire encore (?) et cela en dit long sur le degré de ras-le-bol de nos compatriotes devant les oukases du système et la dictature du politiquement correct, 30 % des sondés avouent qu’ils ne modifieraient pas leur vote si un candidat pour qui ils avaient l’intention de voter tenait des propos racistes ou antisémites »… ou plus exactement, étiquetés comme tels par les officines dites antiracistes, ce qui (très souvent) n’est pas la même chose affirme Bruno Gollnisch.
C’est à cette aune qu’il faut comprendre que cette enquête indique que 64 % des sympathisants FN disent qu’ils ne modifieraient pas leur intention de vote en cas de propos racistes ou antisémites et que 60 % d’entre eux trouvent injustifié de poursuivre en justice un candidat tenant ces propos. Ces chiffres atteignent respectivement encore 44 et 43 % parmi les sympathisants UMP (moins de 12 % chez les sympathisants de gauche).
Le président de l’UEJF, le peu finaud militant communautaire Jonathan Hayoun, en profite pour asséner qu’« il n’est pas surprenant que les sympathisants FN soient les plus complaisants à l’égard des propos racistes ». « Ce parti continue de se structurer autour d’un discours qui distille la haine, attise les peurs et agite les préjugés ». Tout ce qu’on peut reprocher justement, de manière autrement plus fondée, à l’UEJF et aux groupuscules antipatriotiques du même tonneau.