Un bras de fer qui avait son pendant dans le domaine civil , nous nous en faisions l’écho en juillet, lorsque l’administration américaine et Boeing avaient obtenu -aboutissement d’une plainte américaine déposée en 2004- de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) présidée par le socialiste français Pascal Lamy, qu’elle juge illégales certaines aides de Bruxelles accordées pendant 20 ans à Airbus.
Un culot américain assez phénoménal, car il est en effet de notoriété publique que Boeing, via notamment sa branche militaire, est fortement subventionné par le gouvernement américain… qui manie sans complexe, en fonction des circonstances et quand cela l’arrange, c’est de « bonne guerre », la carte du protectionnisme ou de l’ultra libre-échangisme.
Airbus avait alors assuré que la décision de l’OMC, « n’aurait pas d’impact » sur l’appel d’offres, et surtout, qu’elle « ne (devait) pas en avoir ». A l’occasion du déplacement de Nicolas Sarkozy à Washington pour y rencontrer Barack Obama, le président américain avait promis la totale équité et transparence de cet appel d’offre…
Dans La Tribune, en septembre dernier –voir notre article en date du 16 septembre- Gael Vautrin notait alors que la compétition Airbus-Boeing avait « l’inconvénient d’affaiblir les deux grands rivaux de l’aéronautique au moment où ils devraient hypothétiquement commencer à se serrer les coudes alors que la Chine a l’ambition de créer sa propre industrie et son propre champion. Et quand on connaît le pragmatisme, la réactivité et les moyens financiers de l’Empire du Milieu… »
M. Vautrin posait comme postulat implicite à son raisonnement, très critiquable, l’existence d’une solidarité « occidentale » ou « atlantique ». Au nom de laquelle les Etats-Unis ménageraient une industrie aéronautique franco-européenne dont le succès taille des croupières aux groupes américains.
Dés l’annonce de la victoire de Boeing, EADS, rapporte l’AFP, a précisé que « la version militaire de son A-330, le KC-45, est pourtant « le seul véritable avion-ravitailleur déjà en activité alors que la version du 767 présentée par Boeing n’existe « que sur le papier ». « L’européen, qui avait revu la semaine dernière ses prix à la baisse, avançait que sa production aux Etats-Unis générerait 48 000 emplois directs et indirects dans le pays. » Le groupe franco-européen n’a pas précisé s’il comptait faire appel de la décision.
Boeing a immédiatement assuré « que son projet, baptisé ‘KC-46A’, va permettre de soutenir le redressement de l’économie américaine en confortant 50.000 emplois aux Etats-Unis chez Boeing et 800 sous-traitants au sein de 40 Etats. » Le patriotisme économique de l’électeur américain a été pris en compte…Pouvait-om d’ailleurs imaginer que l’Oncle Sam laisserait échapper 35 milliards de dollars dans l’escarcelle de Boeing dans le contexte actuel de guerre commerciale à outrance ?
Bref un vrai coup dur pour Airbus –mais ses dirigeants se faisaient-ils beaucoup d’illusions ?- qui emploie dans les secteurs civil, militaire et spatial, 72 000 personnes rien qu’en France. Avionneur, dont le dynamisme offre à ses sous-traitants – Snecma, Hispano-Suiza du groupe Safran, Thales, Dassault Systèmes, mais aussi à des PME de premier ordre (les sociétés Aubert & Duva, Imphy, Latécoère, Daher Figeac Aero…) de se maintenir à la pointe de la technologie. Et de maintenir son avance …face à la montée en puissance technologique du géant chinois et des autres pays dits « émergents ».
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