Bruno Gollnisch : Je me félicite de ce résultat, bien sûr. J’analyse également qu’il est supérieur aux prévisions des sondages qui nous ont défavorisés et qui ont, une fois encore, prouvé qu’ils n’avaient pas un rôle informatif mais qu’ils créent l’événement. Sans eux, de nombreux autres électeurs auraient eux aussi voté Marine Le Pen.
F.-S. : Comment expliquez-vous cette poussée du FN ? Par le vote contestataire ?
B. G. : Cette idée du vote contestataire est profondément choquante. Le vote Front national existe depuis plus de 30 ans et il est, depuis, en progression constante. Mais on continue à en faire un vote de protestation, un vote d’exclus ou de gens qui ne savent pas très bien ce qu’ils font. Cette analyse est méprisante à l’égard de nos électeurs qui ont un très haut niveau de conscience politique, qui savent très bien ce qu’ils font, ce qu’ils veulent et ce qu’ils ne veulent pas.
F.-S. : Marine le Pen donnera-t-elle des consignes de vote pour le second tour ?
B. G. : Aucun des deux candidats (François Hollande et Nicolas Sarkozy, ndlr) ne nous a vraiment convaincu. Il nous faudrait de nombreuses raisons valables pour éventuellement nous prononcer pour l’un ou pour l’autre. Pour l’instant, rien n’est encore défini. Nous avons encore de nombreuses réunions, nous voulons examiner les éventuelles propositions des deux candidats et nous voulons nous tourner vers chacune des fédérations avant de prendre notre décision.
F.-S. : Mais cette hypothèse n’est pas exclue ?
B. G. : Ce serait envisageable si nous avions de bonnes raisons de le faire, c’est-à-dire si l’un ou l’autre des candidats reprenait certaines de nos propositions. Mais je crois que le PS et l’UMP veulent surtout piquer nos électeurs. Et nos électeurs en ont assez de ce mépris qu’exercent ceux qui les représentent.
« La surprise du vote FN, j’ai entendu ça dix fois ! »
F.-S. : Comment comptez-vous faire fructifier ce résultat ?
B. G. : Le premier round est terminé, nous ne serons malheureusement pas au second, mais nous serons très combatif pour le troisième (les élections législatives, ndlr). Il est quand même choquant que plus de six millions d’électeurs ne soient pas représentés au Parlement (le Front national n’a ni député, ni sénateur, ndlr). C’est une chose dont me parlent régulièrement mes collègues au Parlement européen car ils trouvent cela stupéfiant.
F.-S. : Pensez-vous pouvoir remporter des circonscriptions cette année, malgré un mode de scrutin qui ne vous est pas forcément favorable ?
B. G. : C’est très possible. Nous avons fait des projections. Il y a 335 circonscriptions où Marine Le Pen a dépassé les 12,5% d’inscrits, le minimum nécessaire pour se maintenir au second tour aux législatives. Si ces scores se confirmaient ou s’amplifiaient, nous y serions donc présents.
F.-S. : Comment envisagez-vous l’avenir du Front national dans l’hypothèse d’une défaite de Nicolas Sarkozy ?
« Si Sarkozy est battu, l’UMP ne survivra pas »
B. G. : Le Front national est une organisation stable et pérenne depuis longtemps. La surprise du vote FN, j’ai entendu ça dix fois ! Si Nicolas Sarkozy est battu (le 6 mai, ndlr), je pense que l’UMP ne lui survivra pas. Nous serions dès lors la première force d’opposition à la gauche. Et les électeurs se reconnaîtront dans cette formation cohérente.
F.-S. : Dans ce cas de figure, seriez-vous prêt a accueillir dans vos rangs d’anciens UMP, par exemple les élus de la Droite populaire ?
B. G. : La Droite populaire a surtout pour fonction d’empêcher les électeurs de l’UMP de partir au FN.
F.-S. : Et dans le cas d’une victoire du président sortant ?
B. G. : Si Nicolas Sarkozy était réélu, nous aurions de nouvelles raisons d’être déçus.
Propos recueillis par Philippe Peter.
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