La comparaison avec François Mitterrand s’arrête là, car hormis les militants, le peuple de gauche rassemblés à la Bastille hier soir et agitant drapeaux roses, rouges, arc-en-ciel, turcs ou algériens, les Français ont voté sans espoir et sans passion. C’est plus au rejet de Nicolas Sarkozy que François Hollande doit sa victoire qu’à l’adhésion proprement dite à sa personne et à son programme.
Quant aux 6 421 000 électeurs frontistes du premier tour, ils ont été à l’évidence nombreux à emboîter le pas à Marine Le Pen qui avait annoncé qu’elle voterait blanc. La sanction du refus de l’UMP et de son candidat d’appeler à voter FN aux législatives, dans l’hypothèse d’un second tour opposant un candidat du Rassemblement bleu marine à un communiste, un socialiste ou un écolo-gauchiste…
Quelques heures avant le discours du 1er mai de Marine, Bruno Gollnisch confiait au quotidien Le Progrès, que « même s’il (partageait) les critiques qui ont été faites sur (le président sortant) par le FN pendant la campagne » , il « (pensait) que Nicolas Sarkozy serait le moins pire pour la France par rapport à François Hollande ». « Je redoute pour le pays de voir une coalition écolo-socialo-communiste », « mais, poursuivait-il, si, comme Nathalie Kosciusko-Morizet, Valérie Pécresse ou Claude Guéant, (M. Sarkozy) affirme que le FN est pire que le PS, je voterai blanc. »
Ainsi souligne Le Monde, « pour ce second tour, 2,1 millions d’électeurs ont voté blanc ou nul, soit près de 5,84 % des votants. Une proportion plus importante qu’en 2007, où ils étaient 1 568 426 d’électeurs (4,2 %), selon les chiffres du ministère de l’intérieur(…). Selon trois instituts de sondages, entre 25 et 35 % des électeurs du Front National ont effectivement refusé de choisir ce dimanche (abstention, votes blancs, votes nuls).Il faut remonter aux seconds tours des présidentielles de 1995 (Jacques Chirac face à Lionel Jospin) et de 2002 (Jacques Chirac face à Jean-Marie Le Pen), pour retrouver des taux comparables, avec respectivement 5,97 % et 5,38 % de votes blancs ou nuls exprimés. Au premier tour du scrutin, le 22 avril 2012, il y avait eu environ 700 000 bulletins blancs et nuls (soit 1,92 % des votants).»
Logiquement, il faut donc en déduire qu’une partie non négligeable des 65% à 75% des électeurs lepénistes du 22 avril qui n’ont pas voté blanc ou nul, a donc dépassé sa déception, sa colère devant les promesses trahies, les mensonges, mais aussi les options politiques antinationales de M Sarkozy, pour procéder hier à un vote contre le droit de vote des immigrés ou le mariage homo notamment. Un vote anti socialo-communiste, pour ne pas donner tous les pouvoirs à une gauche qui règne déjà en maître dans de nombreux départements, villes, la quasi-totalité des régions et qui est majoritaire au Sénat.
L’exemple de la PACA, donné par Le Monde, illustre bien cet état de fait, région ou « Nicolas Sarkozy, qui avait réalisé un résultat moyen le 22 avril, bénéfice d’un report très large – et parfois quasi-intégral – des voix obtenues par Marine Le Pen. Avec 57,6% des suffrages sur la région, il perd cependant plus de quatre points par rapport à 2007. Cette porosité entre les deux électorats se vérifie surtout dans les villes très fortement ancrées à droite où celles où la percée FN est récente. En revanche, dans les quartiers pauvres de Marseille ou à Avignon, une partie du vote le Pen s’est portée sur François Hollande. »
Un constat qui se vérifie de manière emblématique dans le Nord-Pas-de-Calais, à Hénin-Beaumont entre autres, et plus largement dans les régions, villes et quartiers ouvriers où les électeurs marinistes du premier tour ont voté plus massivement pour M Hollande.
Enfin, Marine a impitoyablement renvoyé dans ses buts la porte-parole de la campagne du candidat de l’UMP, Nathalie Kosciusko-Morizet qui, hier soir sur le plateau de TF1, a accusé la présidente du FN de « participer à la victoire de François Hollande. »
« N’essayez pas d’échapper à vos responsabilités », lui a rétorqué Marine, « prenez exemple sur Nicolas Sarkozy qui, lui, assume les siennes. Vous avez dit que vous voteriez socialiste, vous avez introduit dans l’esprit des Français que somme toute voter socialiste ça ne devait pas être si grave que ça, voyez: ils vous ont écoutée en partie ! »
« C’est Nicolas Sarkozy qui a participé à la victoire de François Hollande », a-t-elle ajouté, pointant « tous les dirigeants de l’UMP qui n’ont eu de cesse, entre les deux tours, d’expliquer que voter socialiste, c’était plutôt pas si mal que ça, c’était pas dramatique. Ils portent ce soir la responsabilité de l’échec de leur camp ».
Mais « tout n’est pas perdu » puisque les législatives de juin peuvent permettre à nos compatriotes d’avoir des élus patriotes, au sein d’ « une Assemblée vraiment nationale, où il y aura des députés qui ne seront ni complices, ni soumis ! ». C’est tout le sens du combat qui redémarre dés ce lundi matin et auquel Bruno Gollnisch va consacrer toute son énergie.