Le ministre de l’Intérieur ne s’est pas contenté de sermonner hier le buraliste marseillais des quartiers sud qui, braqué pour la seconde fois en quelques semaines, a tiré une balle au caoutchouc contre un de ses trois agresseurs, lequel a été légèrement blessé. « C’est à l’Etat d’assurer la sécurité » (on ne lui fait pas dire…) a grondé Manuel Valls, lequel a été a contrario tout miel avec les policiers lors son deuxième discours annuel aux forces de sécurité.
Malgré les chiffres effrayants pointant la montée des violences et d’une insécurité multiforme, M. Valls a vanté les « résultats obtenus ». Or selon « le nouvel outil d’analyse de la délinquance » mis en place par le ministère de l’Intérieur et que Le Figaro détaillait dernièrement –voir notre article en date du 10 septembre- , « sur un an, d’août 2012 à juillet 2013, tout ou presque vire à l’écarlate: les atteintes à l’intégrité physique (+2,9%) et, parmi celles-ci, les violences sexuelles (+10,4%) ; les atteintes aux biens (+3,5%), parmi lesquels les cambriolages (+9,3%) ; enfin, les infractions économiques et financières (+5,9%).
Les policiers ne sont en fait pas dupes et sont sans illusions sur le vœu du ministre socialiste de créer de nouvelles ZSP (zones de sécurité prioritaires) en 2014. A l’ entendre celles-ci auraient permis une baisse sensible (toute relative) des violences urbaines.
Dans les faits constatent les personnels des forces de l’ordre qui nous ont contacté, les ZSP consistent surtout à déshabiller Paul pour habiller Pierre. En dehors de ces zones où les forces de l’ordre sont invités à s’investir, la criminalité croît partout ailleurs, les voyous commettant leur forfait dans les zones désertées par les force de sécurité faute d’effectifs et de moyens…
Cet échec à juguler la délinquance, qui s’ajoutent aux autres, est bien sûr une des causes des mauvais sondages pour l’exécutif socialiste. Certes, selon une enquête Ifop pour le Journal du dimanche, « seulement » un Français sur quatre (26%, dix points de plus tout de même qu’en janvier 2008) envisage de sanctionner François Hollande lors des élections municipales de mars 2014. Les considérations locales, le poids des clientélismes restent des paramètres souvent décisifs, c’est pourquoi Marine Le Pen refuse de crier victoire trop tôt car « ces élections sont difficiles pour le Front National » qui a toujours eu quelques difficultés « à s’implanter localement » note-t-elle.
Implantation locale qui est aussi tributaire du nombre des électeurs français. Or, comme le soulignait dernièrement Julien Sanchez, candidat du FN à Beaucaire (Gard), dans beaucoup de communes c’est une véritable course contre la montre qui est engagée. « C’est la dernière fois que le Front National peut gagner Beaucaire a-t-il dit car dans six ans, l’immigration sera majoritaire dans cette ville »…comme elle l’est déjà dans de nombreuses communes dirigées majoritairement par la gauche socialo-communiste constate Bruno Gollnisch…
Pour autant, comme le souligne (s’en inquiète) Le Monde, «le spectre du FN n’en finit pas de planer sur la rentrée politique. Un sentiment de panique semble envahir les partis de gouvernement, du PS à l’UMP». « Au sein des partis de gouvernement, on craint particulièrement que la séquence électorale en trois temps (Municipales, européennes, puis régionales en 2015, NDLR) qui va s’ouvrir en 2014 profite largement à l’extrême droite. »
« L’instabilité qui saisit la majorité s’explique surtout par le fait que, pour l’instant, personne n’a trouvé le moyen de stopper l’ascension frontiste. Chacun y va donc de son plan. Ainsi, le PS subit la cacophonie des courants, clubs et autres sensibilités (…). »
«Parallèlement, les écologistes traversent une énième crise interne entre partisans d’une sortie du gouvernement et défenseurs du statu quo. Si l’on ajoute au tableau les radicaux, vent debout contre la loi sur le non-cumul et un Front de Gauche en proie à une lutte entre le jusqu’au-boutiste Jean-Luc Mélenchon et le communiste Pierre Laurent, plus sensible que lui aux enjeux de pouvoir municipaux, le malaise est profond au sein des formations politiques de gauche (…). »
« Le tableau n’est pas plus réjouissant à l’UMP constate encore Le Monde, trop affaiblie pour attirer les électeurs tentés par le FN (…). Sans boussole, minée par les ambitions présidentielles, la droite affiche ses divisions et peine à incarner une alternative. (…) Comme le PS, l’UMP n’a pas trouvé la recette pour résister à la poussée de l’extrême droite. Pire, le parti se divise sur la stratégie à adopter face au FN. »
Dans ces conditions comment s’étonner là aussi de l’enquête BVA-Orange pour L’Express, la Presse Régionale et France Inter publié lundi. Elle indique que 63% des « sympathisants de droite et des sympathisants UMP » préfèrent Marine Le Pen à François Hollande (29%). Notons encore que pour la première fois, et tous Français confondus, Marion Maréchal-Le Pen est créditée dans ce même sondage de 18% d’opinions favorables ( +3 points ), devançant Cécile Duflot 16 %, – 7 points) et Harlem Désir (12 %, -2).
Cette cote de sympathie dont jouissent Marine et le FN est incontestablement une pierre dans le jardin des dirigeants de l’UMP, du tandem Copé-Fillon. Ce dernier s’est encore signalé dimanche lors d’une réunion Saint-Just-Saint-Rambert (Loire) en réaffirmant que « le programme du Front National est économiquement absurde et politiquement dangereux ». Au vu de la politique souvent calamiteuse qui fut la sienne à Matignon, les sympathisants de droite, comme les autres Français assure Bruno Gollnisch, sont en droit d’attendre un peu plus de modestie et de modération dans les jugements de l’ex Premier ministre…