Pour autant nous pouvons peut être nous réjouir de la large identité de vue de la classe politique sur la nécessité de soutenir les Irakiens, et plus spécifiquement les minorités Kurdes, Chrétiennes et Yézidis menacées par l’offensive des milices de l‘Etat islamique (EI). Alors que l’aviation américaine intervient pour freiner la progression des colonnes de djihadistes menaçant notamment leur consulat situé à Erbil, capitale du kurdistan irakien, une aide humanitaire a déjà été consentie par notre pays et sont évoquées également des livraisons d’armes. Marine Le Pen avait réclamé de son côté « une aide logistique et un soutien dans le domaine du renseignement », précisant que la lutte contre l’abjection terroriste « ne peut et ne doit se limiter à des discours et des déclarations d’intention ».
Il convient aussi de noter que le voudrait-elle, la France serait bien incapable d’intervenir militairement en Irak, même a minima et de manière autre que symbolique, au vu de nos engagements opérationnels actuels en Afrique, mais surtout de l’état général de notre outil militaire.
Bruno Gollnisch le rappelait déjà en 2003, « notre pays consacre une part dérisoire du budget national à la défense. C’est à l’échelle d’une nation une imprudence comparable à celle d’un particulier qui ne consacrerait aucun budget ni à sa sécurité, ni à ses assurances. La défense est toujours trop chère lorsqu’on est dans une situation de paix ; en situation de crise, c’est évidemment un autre problème… ».
Les coupes sombres opérées dans le budget de notre défense, la paupérisation de nos armées qui s’est accélérée de manière dramatique sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy, ont été poursuivies sous celui du tout aussi atlantiste François Hollande.
En ce sens les jérémiades d’un ex ministre de la Défense du même tonneau comme le centriste Hervé Morin, ou de l’actuel maire de Bordeaux et ex ministre des Affaires étrangères Alain Juppé dénonçant sur son blog le « génocide » des Chrétiens et « l’effacement honteux de la France et de l’Europe sur la scène internationale » seraient risibles si la situation n’était pas aussi grave. Et que dire de la déclaration de Laurent Fabius, en déplacement ces dernières heures à Erbil ?
Certes, après avoir rencontré à Bagdad son homologue Hussein Chahristani, le ministre des Affaires étrangères était dans son rôle quand il a dénoncé le « califat de la haine» établi par les djihadistes sur une partie du sol irakien et syrien et en soulignant que les combattants irakiens qui les affrontent ne menaient «pas simplement un combat pour eux-mêmes», mais «un combat pour les libertés qui nous concerne tous». Pour autant, comment le croire quand il affirme dans le même temps que « la France ne laisse jamais tomber ses amis» !
Exemple récent, Bachar el Assad invité d’honneur de Nicolas Sarkozy lors des cérémonies du 14 juillet 2008, n’est certainement pas du même avis que M. Fabius, lui dont le pays est justement toujours la proie du fanatisme islamo-terroriste encouragé, financé et largement suscité par les apprentis sorciers de l’axe atlantiste Washington-Londres-Paris-Ankara et leurs alliés du Golfe.
Le 29 juillet dans le long discours qu’il a prononcé à l’occasion de sa réélection, le président syrien ne s’est pas contenté de fustiger la traitrise du « frère » Recep Tayyip Erdogan. Le Premier ministre turc islamo-conservateur a d’ailleurs été confortablement élu président ce dimanche. Et ce dès le premier tour d’un scrutin disputé pour la première fois au suffrage universel direct, malgré les scandales financiers, les critiques sur la « dérive autoritaire » du régime.
Bachar el Assad a logiquement remercié « l‘Iran, la Chine, la Russie », « ces pays qui ont respecté les décisions du peuple syrien tout au long de trois longues années et ont justement défendu toutes les conventions de la Charte des Nations Unies relatives au respect de la souveraineté des États et à la non-ingérence dans leurs affaires intérieures ».
Mais il a surtout dénoncé l’aveuglement des occidentaux face à l’extrémisme islamiste et l’incapacité, même des chancelleries de la vieille Europe, à appréhender la nature de la résistance syrienne. «Celui qui cherche à prévoir le comportement et les réactions d’un peuple de vieille tradition, devrait disposer d’une même profondeur historique et civilisationnelle pour comprendre où résident sa solidité et sa résistance, qualités qui se manifestent clairement lors des grandes crises et à la faveur d’étapes historiques décisives (…) » .
Bref a-t-il affirmé, « un pays ne se définit pas uniquement par sa surface, sa démographie, ses finances ou son pétrole. Un pays est d’abord une civilisation, une culture, et un peuple conscient de son rôle historique , de sa souveraineté, et de la nécessité de relever les défis du présent pour construire l’avenir ».
Bachar el Assad, comme l’opposition nationale en France et les analystes les plus lucides l’avaient annoncé, a également rappelé que l’«invasion de l’Irak» (par l’armée américaine et ses supplétifs en 2003, NDLR), «(fut) le point de départ du sacre du confessionnalisme et de la partition. Nous étions réellement inquiets d’une telle évolution dangereuse et, à notre avis, inéluctable. C’est désormais une réalité que nous payons très cher ».
Difficile de lui donner tort sur ce point.