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Henri Guaino, la mauvaise conscience de LR?

LesRépublicains15logo.svgEntre  la tuerie d’Orlando et le meurtre sauvage du couple de policiers français à Magnanville, l’annonce lundi  sur France Inter puis RMC par Henri Guaino, député LR des Yvelines,  de sa candidature à la primaire de son parti est passée plutôt inaperçue. Ils sont donc désormais 13 candidats, si l’on comptabilise l’inéluctable entrée en lice  de Nicolas Sarkozy, à se présenter aux suffrages des votants qui désigneront leur champion pour la présidentielle. Certes, la validation des candidatures passe par les parrainages de 250 élus (dont 20 parlementaires). Quand bien même, onze d’entre eux seront condamnés à faire de la figuration (?) ou au mieux à prendre date pour l’avenir, à monnayer un maroquin ministériel en cas de victoire de leur camp en 2017… Le jour même ou François Hollande était à Colombey-les-Deux-Eglises pour saluer la mémoire du gaullisme et, actualité aidant, rappeler son combat prioritaire et intransigeant contre l’ « homophobie », M. Guaino, annonçait donc qu’il se jetait dans la mêlée. Après tout, entre une NKM et un Jacques Myard, un Geoffroy Didier et un Jean-Frédéric Poisson, les positionnements les plus antagonistes sont déjà réunis…

Henri Guaino, dont le parcours personnel est un vivant symbole de la méritocratie républicaine,  semble de plus en plus en porte-à-faux au sein du parti présidé par Nicolas Sarkozy et cela commence à dater. Il y a deux ans, en mai 2014,  ce chantre du « gaullisme social » et du  « souverainisme »,  avait fait comprendre clairement qu’il ne voterait pas pour la tête de liste de l’UMP aux élections européennes, le fédéraliste européiste Alain Lamassoure, dont les idées sont à l’antithèse de son patriotisme républicain.

Alain Juppé, qui fut secrétaire général du RPR dans les années 1980 et 1990, lui avait alors conseillé de démissionner: »quand on est à ce point en désaccord avec son propre parti politique, la dignité la plus élémentaire, c’est d’en tirer les conséquences » avait déclaré le maire de Bordeaux. Jean-François Copé s’était empressé de rassurer le lobby antinational en expliquant dans la foulée que les eurosceptiques étaient « très minoritaires » au sein du parti.

M. Guaino, qui a avalé bien des couleuvres sous le règne de Chirac et de Sarkozy, dont il fut avec Patrick Buisson, l’une des « plumes », l’un  des conseillers les plus en vue, avait répliqué qu’il n’entendait pas démissionner de l’UMP ni « (apporter sa) caution publique à aucun autre parti ». En octobre 2014, lors du grand retour du mari de Carla Bruni à la tête de l’UMP, il avait affirmé que si celui-ci  venait à échouer, ce serait « une catastrophe pour la démocratie parce que ce sera une catastrophe pour l’opposition… ».

Un échec souhaité désormais  par le député des Yvelines, qui monte au front contre la double imposture Sarkozy-Juppé? Hier sur RTL, l’éditorialiste Alba Ventura affirmait qu’ « Henri Guaino, comme Gérald Darmanin  se méfie d’une possible dérive identitaire du futur candidat Sarkozy. Il se méfie aussi de la dérive libérale de tous les candidats. C’est pour cela qu’il a décidé de se jeter à l’eau. Henri Guaino veut faire vibrer, dans cette primaire, la corde du gaullisme social« .

« Le gaullisme social en France ces trente dernières années, c’était Philippe Séguin, le modèle d’Henri Guaino. C’est l’étatisme, c’est le souverainisme (…).En réalité, Henri Guaino, héritier du séguinisme, a été fortement déçu par ces politiques avec lesquels il a travaillé. Il se dit aujourd’hui que si ses idées ne sont portées par personne, il va le faire lui-même (…). »

Dans le JDD,  Gaël Vaillant, constate qu’ Henri Guaino « veut prendre la tête d’une famille décomposée dont les derniers partisans sont partis au FN ou chez Nicolas Dupont-Aignan« , se veut « le défenseur (du gaullisme) », « une  pensée peu défendue au sein de l’UMP/Les Républicains, parti pro-européen sous influence libérale. »

« Interrogé par le JDD, Florian Philippot, pour qui son parti le FN incarne le gaullisme aujourd’hui, partage ce constat : « Henri Guaino est sincère dans ses convictions, mais son influence au sein de son parti est nulle. Il sait très bien que son parti n’adoptera jamais sa ligne politique. »

Sur le site de Libération, Alain Auffray  relève que « le député des Yvelines affirme que le gaullisme, jadis au centre de sa famille politique, a tout bonnement disparu » au profit des « centristes et des libéraux« . « Et au milieu, un vide qui se comble par les extrêmes. En clair, Henri Guaino se propose donc de ramener au gaullisme une partie de son électorat égaré, faute de mieux, chez Jean-Luc Mélenchon et plus encore chez Marine Le Pen. »

« Il devrait pouvoir compter avec le soutien des députés LR Julien Aubert et Lionnel Luca qui regrettaient, dans une tribune publiée le 16 mai par l’Opinion, l’absence d’un candidat de la droite patriote, jacobine, sociale et eurocritique, capable de convaincre la France du Non.  »

Une France du  Non qui vote très largement FN, mais que celui qui mena campagne aux côtés de Philippe Séguin contre le traité de Maastricht a toujours du mal à comprendre, à appréhender, là ou Sarkozy tente de nouveau de la cocufier. « Même s’il prend soin de ne pas couper les ponts avec l’ex-chef de l’Etat, (M.Guaino) laisse deviner tout le mal qu’il pense de sa rechute identitaire. »

Rechute  mûrement réfléchie. L’été dernier ,  dans Valeurs Actuelles, Nicolas Sarkozy annonçait déjà, avec un culot en acier trempé,  la tonalité de sa campagne:  » On doit lutter contre le FN en essayant de convaincre ceux qui veulent voter pour lui, en apportant des solutions à leurs angoisses, et non pas en les méprisant ou en leur donnant des leçons ». Il  pointait « l’inquiétude profonde des Français sur nos valeurs et notre identité »,   les préoccupations majeures des Français:  le  « chômage, l’immigration, l’insécurité, trois sujets sur lesquels ils ont le sentiment qu’on ne leur dit pas la vérité (…). »  La  « question de la confiance sera centrale en 2017… »

 La question de la confiance, quand on est un patriote  souverainiste, un national qui n’entend pas, par cohérence tout simplement,  dissocier les notions de souveraineté et d’ identité nationales, se pose hélas aussi avec M. Guaino, Au delà de la sympathie qu’il inspire, des  vérités qu’il professe souvent, le député des Yvelines n’est pas avare non plus de déclarations, disons assez étranges. Nous nous souvenons de ce débat face à Marine, en novembre 2013 ou il avait déclaré avec le plus grand sérieux   que si  » Nicolas Sarkozy n’avait pas été là (lors de la crise des subprimes), il n’y aurait plus de démocratie en France, plus de démocratie en Europe et plus de démocratie dans le monde » !

Dans Le Monde, en décembre 2013, nous nous en étions fait l’écho, il écrivait  qu’au FN, « la conception du pouvoir (…) récuse la dimension tragique et humaine : pas une once de considération pour les pauvres existences qui sont en jeu, pour les vies que l’on risque d’abîmer, pour les drames humains auxquels aucune conscience ne devrait rester indifférente, aucun sentiment, aucun doute (…). C’est un parti auquel sa culture, son histoire, sa vocation interdisent de reconnaître et de prendre en compte ce qu’il y a de tragique dans la vie comme dans la politique, c’est-à-dire de profondément humain (…). »

« Sans doute les dirigeants du FN ne se voient-ils pas comme des monstres froids, mais la conception du pouvoir qui est inscrite dans leurs gènes (sic) les pousse à regarder le doute et l’état d’âme comme des faiblesses. C’est le signe infaillible d’une absence de cœur, de générosité, d’humanité (…). »

Bruno Gollnisch l’avait alors constaté, au regard de la politique de casse sociale menée par l’UMP entre 2002 et 2012, les propos de M. Guaino étaient  assez tragi-comiques. Car en fait d’inhumanité, d’absence de cœur et d’empathie, ses qualificatifs s’appliquent parfaitement à l’idéologie mondialiste et aux diktats bruxellois qui ont servi de mauvaise boussole aux politiques conduites par la droite sarkozyste cette dernière décennie. Le creusement dramatique des inégalités, l’augmentation sans précédent du nombre de pauvres depuis 1945, la paupérisation accélérée des classes moyennes, ont d’ailleurs débuté bien avant la crise de 2008.

Alors oui,  le pire qui puisse arriver à un peuple est d’être dirigé par des politiciens aux mains trop molles et qui par renoncement, lâcheté ou confort, confient à d’autres les destinées de leur pays. Alors oui, nous défendons un héritage, une  France, enracinée, charnelle qui n’a pas commencé en 1789;  nous entendons réserver en priorité notre générosité, la solidarité nationale, la justice sociale à la France et aux Français d’abord. Aimer les siens ne sous-entend pas que l’on déteste l’autre.

Toutes choses, dont sont  certainement convaincus, en leur  for intérieur, les Guaino, Myard, Poisson, Morano, de nombreux élus, et adhérents  LR.  Juppé et Sarkozy défendent-ils leurs idées ou en sont-ils les fossoyeurs? LR est il réformable de l’intérieur?  Il serait temps qu’ils en tirent vraiment les conclusions qui s’imposent.  Ne serait-ce pas là selon M. Guaino, une attitude gaulliste?

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