Jean-Luc Mélenchon a joué sa partition de vieux grincheux laïcard en s’indignant de ce que «samedi, jour anniversaire de la loi de 1905 sur la laïcité de l’Etat, le président de la République, chanoine de Latran, participe à une messe dans l’église de la Madeleine, monument religieux contre-républicain, où la prostituée de l’évangile implore le pardon du Christ. » Bigre! En se livrant à cette saillie verbale très décalée, force est de constater que le grand oriental et lider maximo de La France Insoumise n’a pas tout retenu des enseignements et le doctrine de feu le président vénézuélien Hugo Chavez; ce qui après tout en rassurera peut-être certains…
D’autres ont souligné la tentative de récupération de cette ferveur populaire autour du rockeur défunt par Emmanuel Macron dans son allocution…mais le principe de cet hommage une fois accepté, pouvait-il ne pas prendre la parole quitte à profiter de l’éventuel effet d’aubaine sur sa cote de popularité? D’autres encore, ont remarqué que les Français qui se sont déplacés étaient beaucoup moins nombreux que la foule qui a suivi le cercueil de Victor Hugo en 1885, voire que les 500 000 Parisiens qui ont accompagné celui d’Edith Piaf jusqu’au Père-Lachaise en 1963. Laissons-là les (querelles de) chiffres, quand bien même cela serait-il, c’est une figure du divertissement populaire, sans équivalent aujourd’hui, à laquelle les Français ont voulu rendre hommage.
Nous ne savons pas si Alain Finkielkraut était au nombre des 50 000 personnes qui ont défilé dans les rues de Paris le 19 avril 1980 pour l’enterrement de Jean-Paul Sartre , alias l’agité du bocal selon le bon mot de Louis-Ferdinand Céline. Mais ce qui est certain c’est que l’essayiste a encore une fois joué le contre pied en contestant hier au micro de l’émission qu’il co-anime avec Elisabeth Levy sur RCJ le culte rendu à Johnny. Il a dénoncé un unanimisme que l’on peut après tout jugé agaçant: «Non, nous sommes un certain nombre dans toutes les classes sociales à n’avoir rien en nous de Johnny… Mais là, là où la dictature émotionnelle se fait vraiment inquiétante, c’est quand Aurore Bergé (député et porte-parole de LREM, NDLR) compare la ferveur de Johnny avec ce que la France avait connu pour Victor Hugo. » L’auteur de L’identité malheureuse a enfoncé dans la foulée un autre clou dans le cercueil du politiquement correct: «Le petit peuple des petits blancs est descendu dans la rue pour dire adieu à Johnny. Il était nombreux et il était seul. Les non-souchiens brillaient par leur absence ». Plus prosaïquement, M. Finkielkraut découvre ici que le rock – même mâtiné de variétés selon les époques de la carrière de Johnny- est un style de musique qui attire très majoritairement un public blanc. Une donnée factuelle. Il suffirait que l’académicien observe lors de ses pérégrinations parisiennes la queue qui se forme devant une salle programmant un concert de ce type pour le savoir…
Marine, qui participait la veille dans la cour des Invalides à la cérémonie d’hommage national organisée pour l’écrivain Jean d’Ormesson, elle aussi brillait par son absence samedi matin lors de cet hommage populaire rendu à Johnny Hallyday. Elle entendait s’y rendre mais il a été dit que la famille du chanteur et son entourage médiatico-professionnel ne souhaitaient pas sa présence. Un conformisme, une frilosité pas très rock’nroll ? La présidente du FN s’est interrogée: « Est-ce que cela s’adresse également à mes électeurs ? Car ils sont nombreux à faire partie du public qui a soutenu Hallyday tout le long de sa carrière. » Et de rappeler aussi que « Johnny avait fait un spectacle à Fréjus (en juillet 2016) à l’invitation (du maire FN) David Rachline », alors même que l’entourage du chanteur y était alors plutôt formellement opposé…
D’une discrimination l’autre, avec ou sans chansons pour faire passer la pilule, les Français se sentent de plus en plus menacés par les effets de la mondialisation sauvage et son corollaire: la progression des insécurités sociale, économique, physique. Selon le dernier sondage Ifop publié dans le JDD, « 59% des personnes interrogées fin novembre se disaient pessimistes quand elles pensaient à l’avenir de la France, soit 3 points de plus que fin juin et 11 points de plus que fin mai (…) ils sont 60% (54% en juin) à penser que leurs enfants (ou neveux et nièces) vivront moins bien qu’aujourd’hui dans la société française de demain. »
Ont été rendues également ces derniers jours les conclusions de l’enquête dite de victimation, réalisée chaque année par l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) et l’Institut national de la statistique (Insee) -16 000 personnes ont été interrogées- portant sur le sentiment d’insécurité chez les Français. Un sentiment ? Plus exactement une réalité invasive, redoutée, vécue et subie précise pour sa part Bruno Gollnisch qui sait que les mots et les euphémismes ne sont jamais neutres.
Il ressort de cette étude que pour la première fois depuis onze ans, la « proportion de personnes inquiètes à cause du terrorisme (32%) prend le pas sur celle mesurée pour le chômage (23%) ». L’enquête enregistre également une augmentation de la peur des Français d’être victimes d’une agression (21% contre 20% en 2016), la gent féminine se sentant particulièrement menacée. 26% des femmes interrogées déclarent se sentir en insécurité. Enfin, cette insécurité progresse aussi pour les femmes travaillant dans les servies publics, victimes des comportements d’un nombre croissant d’usagers.
L’étude Ifop pour Synopia rapportée notamment par La Croix en avril 2017 sur « les Français et les enjeux de sécurité », indiquait que seuls 17 % des sondés considéraient « ne pas se sentir spécialement en insécurité ». Jérôme Fourquet, directeur du département Opinion à l’Ifop relevait que« Les Français ont le sentiment que l’on vit dans une société moins civique, plus éruptive, que le vernis du vivre ensemble se craquelle (…).» Autre enseignement de cette enquête, « 60 % des sondés (estimaient) que le refus de la classe politique de regarder la réalité en face est une cause très importante des problèmes d’insécurité (…) ». Le vivre-ensemble dût-il en souffrir, il serait grand temps que les portes du pénitencier, ou mieux encore celles des charters quittant notre territoire, se referment dans le dos d’un certain nombre d’indésirables qui pourrissent la vie des Français. Mais à part l’opposition nationale au pouvoir, qui le fera?