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Traitement des minorités au parlement européen – « affaire » des assistants parlementaires, etc.

Alors que ce jour M. Tajani, jusqu’ici Président du Parlement Européen, cède la place à M. Sassoli, nouvellement élu, vous trouverez ci-jointe la lettre que lui a adressée Bruno Gollnisch, député sortant, membre du Bureau du Rassemblement National.

Bruno Gollnisch
Doyen de faculté honoraire
Député au Parlement européen

Bruxelles, le 24 juin 2019

À Monsieur le Président TAJANI, Président du Parlement Européen

Monsieur le Président,

Vous avez bien voulu m’adresser une aimable invitation à la cérémonie solennelle marquant la fin de la législature, ce 1erjuillet à Strasbourg à 17 h 45. Si j’en juge par les précédentes cérémonies de ce type, les députés sortants, dont je suis, devraient y recevoir une sorte de médaille commémorative, compensant peut-être la mesquine suppression par le Bureau du titre de député honoraire.

Je vous remercie sincèrement de cette invitation, mais je ne m’y rendrai pas.

Voici pourquoi :

Au cours de cette mandature, j’ai, comme d’autres collègues appartenant comme par hasard à la minorité, été odieusement persécuté. Certes, c’est votre prédécesseur M. Schulz qui a lancé les hostilités, en nous reprochant d’avoir utilisé nos assistants à des fins politiques ou partisanes, alors que son propre assistant, accrédité, devant à ce titre résider à Bruxelles, exerçait depuis Aix-La-Chapelle la direction d’une société commerciale, la société Euregio Tours, agence de voyages du parti socialiste allemand SPD. Alors aussi qu’il a été convaincu, notamment dans le rapport Pieper de la Commission du Contrôle budgétaire, d’avoir utilisé non seulement les assistants, mais bien plus les fonctionnairesde ce Parlement à des fins électorales, sans compter les billets d’avion et autres facilités, etc. Prévarications qui apparemment n’intéressent en aucune façon l’Office de Lutte anti-fraude OLAF.

Dans cette affaire, Monsieur le Président, vous n’avez donc pas été Hérode, mais vous avez été Ponce Pilate. Vous avez laissé faire, et couvert de votre autorité, toutes les ignominies auxquelles a procédé sur ordre votre Secrétaire général Klaus Welle, consistant à décréter d’autorité la spoliation confiscatoire des indemnités qui nous étaient dues, et nécessaires à l’exercice de nos mandats. Ces décisions ont été prises sans même qu’à aucun moment ni mes collègues ni moi-même n’ayons été en mesure d’être simplement entenduspar ce fonctionnaire politique, malgré nos demandes répétées.

L’institution que vous présidez a violé tous les principes juridiques dont ce Parlement se gargarise à tout propos et hors de propos : respect de la présomption d’innocence, règles gouvernant la charge de la preuve, droit d’être entendu, non bis in idem, non-discrimination, principes de proportionnalité, de confiance légitime et de sécurité juridique, droits civiques des assistants, indépendance des parlementaires, etc.

Les instances de recours prétendues : les Questeurs, et le Bureau – que vous présidez – sont dans la situation de juges qui n’entendraient pas les plaignants, mais siègent avec le procureur – en l’occurrence ledit Klaus Welle – délibèrent avec lui, et lui confient la rédaction de la décision ! Il est vrai qu’il ne s’agit guère que de leurs adversaires politiques…

Toutes ces infamies ont eu lieu sous les prétextes les plus dérisoires : lieu administratif du contrat de travail, candidatures électorales des assistants,  etc ; qui aboutiraient dans la pratique, s’ils étaient étendus à l’ensemble du Parlement, à frapper des mêmes spoliations les neuf dixièmes de ses membres.

Vous êtes un brave homme, certes, mais vous avez sans doute pensé que défendre vos collègues de la minorité nuirait à votre tranquillité.

Pire encore : c’est en votre nom, ou en celui de M. Welle, qu’a été produite devant la Cour de Luxembourg l’assertion mensongère selon laquelle le Parlement européen n’était partie à aucune procédure pénale contre moi ou mes collègues, assertion que les juges complaisants se sont empressés d’avaliser malgré les précisions qui leur ont été fournies. En effet, c’est toujours en votre nom qu’un avocat français s’est constitué partie civile, peut-être pour me réclamer une deuxième fois les sommes dont j’ai été indûment spolié. Vous faites verser ainsi à MeMaisonneuve des honoraires considérables, qui lui permettent d’arguer de détournements fantasmagoriques, qui ne sont en fait que les salaires mérités d’assistants sérieux et travailleurs, salaires dont bien entendu les députés que nous sommes n’avons pas touché un seul centime.

Ainsi, l’homme politique parfaitement intègre que je suis, et que j’ai toujours été, particulièrement économe de surcroît des deniers publics, comme l’attestent tous les crédits de voyages et autres que j’aurais pu utiliser et auxquels j’ai renoncé, doit se justifier maintenant devant la justice pénale de son pays. Cependant qu’au mépris du secret de l’instruction, les accusations de ceux que vous stipendiez font l’objet de fuites organisées aux fins d’un lynchage médiatique, utile préalable de ces procédures judiciaires.

Je m’arrête là en ce qui concerne cette affaire.

Mais je voudrais ajouter ceci : les droits politiques des députés de la minorité, depuis trente ans que je suis dans ce Parlement, n’ont cessé d’être rognés, et votre présidence y a malheureusement contribué autant que celles de vos prédécesseurs les plus partisans. Toutes les réformes successives du Règlement intérieur, toutes, ont été faites contre les minorités. On est allé jusqu’à se donner le ridicule de sanctionner des députés, non pour avoir troublé les débats, mais pour avoir émis des propos non conformes au « politiquement correct ».Contrairement à ce qui existait quand je suis entré dans ce Parlement, la protection des députés est aujourd’hui à géométrie variable. Un escroc patenté ayant commis des délits de droit commun a plus de chances de voir son immunité maintenue qu’un député de la minorité poursuivi dans sa libre expression à l’initiative d’adversaires politiques. En ce qui concerne également les députés non-inscrits, quand je suis arrivé dans ce Parlement, ils désignaient, compte tenu de leur diversité, deux des leurs pour les représenter, sans droit de vote, à la Conférence des Présidents. Au fil des réformes successives, ce nombre a été réduit à un. Puis, dans la crainte qu’un « populiste » fût désigné par ses collègues, on a purement et simplement supprimé l’élection ! Et c’est le Président du Parlement, par hypothèse d’une couleur politique adverse, qui nomme le représentant de ces députés. Du moins vos prédécesseurs renouvelaient-ils cette nomination tous les six mois, afin d’assurer la représentation de toutes les nuances. Vous avez laissé en fonction une collègue britannique qui ne s’est pas donné la peine en cinq ans d’informer une seule fois ses collègues de ce qui se passait dans l’enceinte où elle était censée les représenter. Ultime mesquinerie discriminatoire : quelques mois avant la fin de la mandature, nous avons appris que le Bureau – sous votre présidence – interdit désormais aux députés non-inscrits de recruter un stagiaire, contrairement à leurs autres collègues…

Telles sont, Monsieur le Président, quelques-unes des raisons pour lesquelles vous comprendrez que je ne suis pas enclin à participer à des rituels faussement consensuels et aussi dérisoires, en regard de ce que mes collègues et moi-même avons subi de la part de votre administration.

À l’homme que vous êtes, je pardonne sans réserves. Mais quant à l’institution, que je quitte sans regret, je préfère utiliser mon énergie à dénoncer l’imposture et l’hypocrisie qui y règnent encore.

En vous remerciant de bien vouloir considérer que cette missive n’a aucun caractère confidentiel, je vous prie, Monsieur le Président et cher Collègue, de bien vouloir agréer l’expression des sentiments que je vous dois.

Bruno Gollnisch

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