L’Express.fr : Comment réagissez-vous à l’exclusion d’Yvan Benedetti?*
Bruno Gollnisch : Je regrette vivement cette suspension « temporaire » qui revient en pratique à une exclusion définitive. D’une part, parce que je crois dangereux de se fonder sur des propos ou comportements rapportés par des éléments hostiles sur des sites d’extrême-gauche; comme le propos antisémite démenti par l’intéressé. D’autre part, parce que cette décision affaiblit l’opposition au député-maire communiste de Vénissieux, André Gerin, dont Yvan Benedetti était le plus farouche opposant.
Enfin, je crois qu’un spectre très large de sensibilités doit se réunir pour assurer le succès de la candidature de Marine Le Pen à l’élection présidentielle. Nous avons des ralliements qui viennent même de la gauche ou de l’extrême-gauche. Il ne faut pas donner à penser à la mouvance nationaliste, même radicale, qu’elle en est exclue.
L’Express.fr : Plusieurs de vos soutiens on déjà été exclus en avril. Avez-vous l’impression que, derrière ces vagues d’exclusions, c’est vous qui êtes ciblé?
Bruno Gollnisch : Il serait navrant que ces exclusions en donnent l’impression.
L’Express.fr : Votre influence a grandement diminué au sein du Front national. Pourquoi restez-vous?
Bruno Gollnisch : Le Front National n’est ni une fin en soi, ni un moyen d’assouvir je ne sais quelle ambition personnelle: c’est un instrument politique au service de la restauration de la France, de sa prospérité, de sa sécurité, de son identité, de son indépendance, de ses libertés. Cet instrument est sans doute imparfait, mais existe-t-il aujourd’hui en France un outil plus efficace et mieux approprié? Je ne le crois pas. Et tant qu’il en sera ainsi, j’ai l’intention de servir la cause que j’ai toujours servie au sein de ce mouvement.
L’Express.fr : Vous êtes un fidèle parmi les fidèles. Comment réagissez-vous lorsque vous voyez d’anciens mégrétistes (qui ont quitté le FN lors de la scission en 1999 – ndlr) truster aujourd’hui les postes les plus importants au sein du FN?
Bruno Gollnisch : Je suis pour le pardon des offenses, qui est à la fois moralement louable et politiquement utile. Je n’ai à cet égard aucune arrière-pensée. Ceux qui sont revenus sont les nôtres à part entière, c’est très bien. Je souhaite seulement qu’ils manifestent à leur tour de l’indulgence à l’égard de ceux qui sont, pour une raison ou pour une autre, en délicatesse avec la discipline du mouvement. Tant qu’il ne s’agit pas, bien sûr, de sabotage délibéré.
L’Express.fr : En février 2001, Jean-Marie Le Pen vous désignait comme son successeur le plus légitime. Etes-vous l’un des derniers défenseurs du Front national des origines?
Bruno Gollnisch : Je ne suis certes pas le gardien d’un temple à la fondation duquel, d’ailleurs, je n’ai pas participé. Je crois défendre un intérêt national compatible avec des valeurs universelles. Je suis résolument moderne, et favorable aux nécessaires évolutions. Mais je crois qu’il n’y a de modernité viable qu’enracinée dans la tradition. C’est en partie le legs de mon expérience du Japon.
L’Express.fr : Quel regard portez-vous sur l’initiative de vos anciens amis de créer une « UDF nationaliste »? Avez-vous renoncé à défendre l’idée d’un « compromis nationaliste » entre toutes les franges de l’extrême droite française?
Bruno Gollnisch : Je ne me considère pas comme « extrémiste ». Je ne souhaite pas l’union des « franges de l’extrême droite française », mais celle de tous les patriotes. Je n’y ai pas renoncé. Mais l’on ne peut réconcilier que des gens qui le souhaitent, de part et d’autre.
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*Militant nationaliste de très longue date, adhérent de la fédération FN du Rhône depuis 2005, dont il est le secrétaire départemental adjoint, conseiller municipal de Vénissieux depuis 2008, Yvan Benedetti a été un soutien actif de Bruno Gollnisch lors de la campagne interne pour la désignation du successeur de Jean-Marie Le Pen. Elu au Comité central lors du dernier Congrès de Tours, il a été exclu pour deux ans du FN , suite à sa comparution devant la Commission des conflits du Mouvement le 29 juin. Une majorité des personnalités siégeant à cette commission ont décidé de cette exclusion, décision validée par Marine Le Pen.