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La Journée mondiale de l’alimentation : enjeux multiples, défis majeurs

Les obèses au nord les affamés au sud ? C’est aujourd’hui que se tient La Journée mondiale de l’alimentation, occasion d’évoquer des chiffres qui ne manquent pas d’inquiéter, de choquer, mais aussi de nous interroger sur le modèle de développement promu au niveau mondial. Dans nos contrées riches, le surpoids est un vrai problème de santé publique. Il y a 400 millions d’obèses dans le monde, dont 100 millions rien qu’aux Etats-Unis (dont 10% d’obèses morbides, les super-gros), les pays du Golfe, mais aussi l’Egypte, les classes aisées des pays dits émergents sont aussi concernées par ce phénomène. Selon les dernières données d’une grande enquête épidémiologique rendues publiques ce mardi par le laboratoire pharmaceutique Roche, 32,3% de la population adulte en France est en surpoids en 2012 (contre 31% en 1997), correspondant à 14,8 millions de personnes. 15% des Français sont considérés comme obèses en 2012, soit 6,9 millions d’adultes, dont environ 3,3 millions supplémentaires depuis 15 ans. Si le nombre d’obèses n’augmente plus dans les mêmes proportions qu’il y a quelques années, il est souligné que depuis 9 ans, la prévalence de l’obésité est plus marquée chez les femmes (15,7%) que chez les hommes (14,3%) et on trouve plus d’individus en surpoids dans le nord de la France que dans le sud et dans l’est qu’à l’ouest. Nous l’avons déjà relevé sur ce blog  la responsabilité de la déferlante de la junk food, de la mauvaise pitance mondialisée  dans l’augmentation de l’obésité et celle-ci touche  sous nos latitudes les plus modestes. Ceux qui fréquentent, par nécessité, les enseignes discount et low cost, qui écoulent principalement des denrées et des plats souvent enrichis en graisse saturée, eau gélifiée, édulcorants et autres émulsifiants. Pour ne rien dire de la qualité des produits écoulés par des gargotes de restauration rapide américanomorphe ou d’inspiration turco-maghrébine.

 L’autre réalité, pointée par cette Journée mondiale de l’alimentation, est aussi celle de la faim dans le monde. Une réunion se déroule aujourd’hui à Rome au siège de l’organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) en présence d’une quarantaine de pays. Le ministre de l’agriculture français, Stéphane Le Foll, qui la présidera, « souhaite évoquer la création de stocks alimentaires d’urgence dans les pays vulnérables » Si 40% de la nourriture produite est gaspillée chaque année, selon un rapport du FAO datant d’il y a quatre ans, les derniers chiffres publiés par cette organisation indiquent que 868 millions de personnes souffrent de la faim dans le monde. Pire encore rapporte Le Monde, selon le rapporteur spécial de l’ONU pour le droit à l’alimentation, Olivier De Schutter, « Si on mesurait la malnutrition plutôt que la faim, non plus le déficit en calories mais celui en micro-nutriments essentiels au développement des enfants, comme l’iode, le fer, les vitamines, les chiffres seraient encore plus considérables : on passerait au moins à 1,5 milliard. »

 Cet article indique encore avec raison que les dérèglements climatiques, les phénomènes de sécheresse, notamment en Afrique subsaharienne,  sont responsables directement de la montée brutale des prix des denrées de base. Aux Etats-Unis même, la sécheresse de cet été a eu pour conséquence que le pays n’a actuellement en stock que 6,5 % du maïs qu’ils consommeront dans l’année.

 Cette diminution des stocks a d’ores et déjà pour résultat une explosion des prix, entre septembre 2011 et septembre 2012. Selon un rapport de Food Price Watch, les prix du maïs et du blé ont augmenté d’environ 25%. Ironie du sort ( ?) au moment même ou tout se met en place pour faire à nouveau de la nourriture un des grands problèmes du XXIème siècle , au moment ou la Chine et l’Inde ,notamment devront lancer cet appel d’offre alimentaire planétaire, sans compter l’Afrique du nord, victime du réchauffement climatique, serons nous en mesure de répondre à cet appel d’offre ?

 C’est ce moment crucial qui a été choisi pour affaiblir encore un peu plus l’agriculture française relève Bruno Gollnisch , via la nouvelle mouture de la Politique agricole commune (PAC). Depuis 2010 avec le traité de Lisbonne, la France a perdu d’abord toute maîtrise de sa politique agricole. Puis dans un second temps la maîtrise de ses échanges de produits agro-alimentaires, au profit d’une Europe à la fois bureaucratique et gagnée par la doctrine ultralibérale mondialiste, incapable de s’opposer efficacement à l’emprise croissante de la finance et des marchés.

 Le projet de réforme de la PAC prévu par la Commission pour 2013 est encore moins favorable à l’agriculture européenne, spécialement à celle de la France : même si cette dernière obtenait le maintient de l’enveloppe globale de la PAC (ce qui est loin d’être assuré) un redéploiement aura nécessairement lieu au profit des nouveaux Etats-membres…

 Et malgré le productivisme imposé par la PAC, la balance commerciale agricole européenne est devenue durablement déficitaire en raison notamment des importations massives de blé et de soja, et l’Europe perd des parts de marché au niveau mondial…

 Si « la part des investissements agricoles dans le monde a plongé en vingt ans, passant de 20 % de l’aide totale dans les années 1980 à 4 % aujourd’hui remarque Luc Guyau, président indépendant du conseil du FAO », Le Monde pointe aussi au nombre des problèmes « la spéculation financière » sur les matières agricoles. Il s’agirait donc d’imposer une régulation des marchés financiers, afin d’empêcher la spéculation sur les matières premières, dont Bruno Gollnisch dénonce la nocivité.

 Nous l’évoquions également l’année dernière, face à cette situation, l’ONG Oxfam a appelé à limiter la spéculation dans les marchés agricoles et s’oppose fermement à l’utilisation de la nourriture comme matière première pour la production de biocarburants. Les prix du maïs se sont  d’ailleurs envolés  au cours de l’exercice 2011, la production mondiale étant incapable de suivre le rythme de la demande record, lié notamment à la croissance de l’industrie de l’éthanol aux Etats-Unis…

 Selon les conclusions d’une enquête d’une autre ONG, World Development Movement (WDM) « les banques (notamment Goldman Sachs, Morgan Stanley et Barclays) ont appauvri et plongé dans la famine des millions de personnes dans les pays en voie de développement.»

 « La spéculation sur les denrées alimentaires existe certes depuis le début du 20e siècle, mais elle n’a atteint des niveaux dangereux qu’à l’aube de la crise alimentaire de 2008. En 2003, elle était en effet de l’ordre de 3 milliards de dollars par an… contre 55 milliards en 2008, 2011 devrait constituer une nouvelle année record (…). Le montant des opérations spéculatives sur les marchés des matières premières (denrée alimentaires, énergie, métaux) devrait atteindre 400 milliards de dollars cette année, contre 300 milliards en 2008, selon l’ONU. »

 Enfin l’explosion démographique des pays du sud est aussi largement responsable de cette pénurie alimentaire. Une démographie galopante qui n’est pas sans conséquence sur le climat, par le biais notamment de la conversion de forêts tropicales, en particulier en Amérique du Sud et en Afrique, en surfaces agricoles cultivables. A cela s’ajoute le fait que l’augmentation du niveau de vie des pays émergents induit également d’autres modes de consommation alimentaire, indirectement responsables de cette déforestation avec l’augmentation des cheptels de bêtes à viande. – 6,4 millions d’hectares de forêt détruits chaque année depuis 2000 selon un rapport du FAO.

 Au-delà du problème de l’épuisement des ressources halieutiques relevions nous aussi, de celui de la superficie des terres cultivables, a priori existantes mais dont l’extension menace la préservation de la biodiversité, chacun sait que pour obtenir les rendements nécessaires, et indirectement pour l’élevage de bêtes à viande, il faut de l’eau, des engrais, des pesticides de l’énergie. Toutes choses qui ne sont ni inoffensives, ni inépuisables. Le lien entre agriculture intensive et érosion des sols, accélérant parfois la désertification n’est plus à démontrer dans un certain nombre de pays émergents. De même les engrais, pesticides chimiques, déchets divers polluent chaque jour un peu plus la qualité de l’eau, de l’air, des sols.

 En aout 2011, il ressortait des travaux l’Institut national d’Etudes démographiques (Ined), menés avec ceux des Nations Unies et de la Banque Mondiale, que notre planète accueillait 7 milliards d’habitants contre six milliards en 1999 ;probablement 8 milliards de terriens en 2025, 9 à 10 milliards dans un siècle…Un défi sans précédent dans l’histoire de l’humanité car comme le notait Gilles Pison, directeur de recherches à l’Ined, «  si les bientôt 3 milliards de Chinois et d’Indiens se mettent à consommer comme des Américains, notre bonne vieille planète aura bien du mal à tenir le choc… »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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