Mais l’époque n’était pas franchement à la rigolade, et le talentueux journaliste, écrivain et homme politique Léon Daudet, pressentait la tempête à venir quand il écrivait dans L’Action française en 1938: « qu’on ne s’y trompe pas , ce livre est un acte et qui aura peut-être, un jour, de redoutables conséquences. Bagatelles pour un massacre, c’est un livre carnassier , et qui paraît, sous un ciel d’orage, à la lueur des éclairs. » Reste qu’il parait difficile de croire qu’en 2018 les émules plus ou mois illettrés des Fofana et consorts se seraient précipités dans les librairies pour acheter les pamphlets de Céline afin de se conforter dans leur haine des juifs; ils n’ont pas vraiment besoin de ce type de lecture pour cela.
Les militantes extrémistes du vieux dogme soixante-huitard féministe, les harpies de la lutte contre les inégalités de genre, déplorent ces derniers jours une autre publication. Celle de la tribune cosignée par une centaine de personnalités féminines, dont l’essayiste Peggy Sastre , la comédienne Catherine Deneuve, la critique d’art et écrivaine Catherine Millet, l’ex actrice X et désormais chroniqueuse Brigitte Lahaie. Elles sont sorties du bois pour dénoncer dans Le Monde les chiennes de garde et autres hystériques du combat contre la domination et la prédation masculine. Un blasphème insupportable pour une gauche féministe qui existe encore médiatiquement mais de plus en plus marginalisée -là aussi le principe de réalité triomphe toujours- , quelques mois après l’affaire Wenstein et la douteuse initiative balance ton porc.
Pourtant, si la tribune qui a fait bondir les complices de Caroline de Haas et de Marlène Schiappa prônait « une liberté d’importuner (les femmes), indispensable à la liberté sexuelle », rappelait que si «le viol est un crime », « la drague insistante ou maladroite n’est pas (pour autant) un délit, ni la galanterie une agression machiste », elle prenait aussi bien soin de rassurer sur la pureté progressiste des intentions des signataires. Certes, en accusant les féministes autoproclamées de favoriser ce qu’elles prétendent combattre: «Cette fièvre à envoyer les porcs à l’abattoir, loin d’aider les femmes à s’autonomiser, sert en réalité les intérêts des ennemis de la liberté sexuelle, des extrémistes religieux, des pires réactionnaires. »
Julien Sanchez, lui, n’entend pas balancer le porc des assiettes de nos chères têtes blondes fréquentant les cantines scolaires de la ville de Beaucaire (Gard) dont il est maire. Dans un entretien accordé à Valeurs actuelles qui a fait un certain bruit et dont il s’est de nouveau expliqué lors de ses récents passages médiatiques, Julien a redit son refus d’assister « au grand-remplacement du porc à la cantine. » « Parce que je me suis bien rendu-compte que d’année en année, de moins en moins de porc était servi. C’est une viande qui est souvent produite en France et il est également normal que nous choisissions de soutenir l’agriculture française. Ce n’est pas mon rôle d’y renoncer pour des raisons religieuses. J’insiste sur cette raison parce qu’elle me semble suffisante et fondamentale. Mais il y en a d’autres, comme l’apartheid que cela engendrait de fait. Je me suis aperçu que depuis la mise en place de ces repas de substitution par l’ancienne municipalité (en 2008), les enfants musulmans mangeaient sur des tables à part. Sans doute par souci d’organisation, ces enfants étaient séparés des autres et c’est inacceptable là encore, dans une école publique (…). A Beaucaire, ces repas de substitution concernaient 150 enfants sur 600, donc beaucoup de familles, c’est vrai. Mais je suis allé en commission des menus rencontrer les parents et tous ceux qui étaient de bonne foi – y compris les parents musulmans – étaient tout à fait satisfaits de cette décision (…). En France, en Gaule, on mange du sanglier depuis toujours, comme illustré dans Astérix ! »
Si la renommée d’Astérix n’est plus à faire, celle du Front National est au moins équivalente chez nos compatriotes, grande popularité de la marque FN qui pèse bien sûr dans le questionnement actuel sur un éventuel changement de nom du FN. Marine fait entendre des arguments très audibles, très défendables quand elle affirme, ce fut encore le cas dimanche dernier lors d’une conférence de presse à Alençon, dans le cadre de la huitième étape de sa tournée de Refondation, qu’il y aurait des avantages tangibles à un changement de nom.
« Si un nom contient une charge qui puisse susciter des craintes, ou (a) une charge émotionnelle qui soit trop forte, a-t-elle dit, et il semblerait que ce soit quand même le cas du Front National, alors il ne faut pas hésiter à se donner les moyens de la victoire.» « Si nous voulons que ce mouvement soit entendu, envisagé comme parti de gouvernement, susceptible de nouer des alliances, alors il faut que ceux qui éventuellement seraient tentés par cette alliance se disent il y a un nouveau mouvement qui tient compte de cette capacité. Il faut que le FN termine sa mue de parti d’opposition, de contestation en parti de gouvernement. Nous ne pouvons pas réfléchir en terme de nostalgie. »
« Un parti politique est un outil qui doit servir à arriver au pouvoir. Ce n’est pas une fin en soi ». Et « nous devons non seulement continuer à pointer du doigt les incohérences, les défaillances, les carences de la politique qui est mise en oeuvre aujourd’hui mais nous devons être aussi capables de présenter aux Français les projets qui sont les nôtres ». Toutes choses qu’ont réussi, a souligné la présidente du FN pour s’en féliciter, les mouvements de droite nationale actuellement au pouvoir en Pologne, en Hongrie, tandis qu’en Autriche, nos amis du Parti de la Liberté d’Autriche ( FPÖ) – parti qui n’a pas changé de nom depuis sa création en 1955 – faisaient leur entrée à des postes clés dans un gouvernement de coalition.
Marine a souhaité que cette question soit librement débattue, et les réflexions de fond amènent parfois à des révisions. C’est le cas notamment du député Gilbert Collard qui a confié sur LCP mercredi qu’il avait évolué. « J’étais pour et j’ai changé d’avis. » « J’ai été le premier à dire qu’il fallait changer de nom. Mais maintenant, j’en arrive à me dire que ça ne servirait strictement à rien de changer de nom. Je pensais que changer de nom favoriserait le processus de dédiabolisation. Et puis je me rends compte que de toute manière, quel que soit notre nom, même si on s’appelait la Baie des anges, on nous stigmatiserait, on nous diaboliserait parce que c’est un instrument dont les partis dits de pouvoir ont besoin pour s’entendre, pour justifier leur reniement leur revirement. »
Son collègue sur les bancs de l’Assemblée nationale, Bruno Bilde, estime pour sa part que la période actuelle ne serait pas la plus propice pour un chargement de nom du FN. Ajoutons avec Bruno Gollnisch que c’est le programme même défendu par les nationaux, d’opposition frontale à l’idéologie mondialiste, à l’effacement de nos libertés, de notre souveraineté, de notre identité, qui font de nous des infréquentables aux yeux des politiciens lâches et pusillanimes, des figures du Système et autres précepteurs d’opinions…
Dans La Croix, le militant de gauche et spécialiste es FN Jean-Yves Camus ne dit pas foncièrement autre chose: « La direction du Front National (?) a l’impression que le nom du parti reste un handicap majeur qui l’empêche de faire une percée électorale. Elle estime aussi que cela lui ouvrira des alliances avec le reste de la droite. Mais il paraît peu probable que cela rende le FN plus éligible à une alliance avec Laurent Wauquiez puisque ses positions sur l’islam, la laïcité, la sécurité ne devraient pas évoluer (…). Dans ce cas, pourquoi en effet changer de nom ? Il ne suffit pas de prendre un nouvel emballage si le fond du discours reste le même. » Et si le fond de notre discours changeait, si nous renions nos idéaux et nos valeurs, quelle serait notre raison d’être ?