Monsieur le Président, pendant la guerre, le Congrès s’amuse, disait-on en 1815. Telle est l’évocation historique que l’on pourrait lancer au visage des membres du Conseil, dont l’indécent document de synthèse ne mentionne le mot Irak qu’à partir de la 31ème des 36 pages qui composent les conclusions de la présidence.
Votre navrante déclaration orale, Monsieur le Président du Conseil, est un constat d’échec et d’impuissance. La guerre est là, événement considérable, majeur, dont les membres de l’Union, la Grande-Bretagne en tête, sont directement responsables. Nous n’y pouvons rien, dites-vous. Parlons d’autre chose. Pourtant, il y aurait beaucoup de choses à dire, maintenant qu’apparaissent au grand jour les mensonges dont l’empire américano-britannique s’est servi pour justifier sa brutale agression. Mensonge, quand on a prétendu qu’il s’agissait de permettre à l’ONU de désarmer l’Irak, alors qu’en fait, la guerre était programmée depuis le début, quoi qu’il arrive, comme c’est aujourd’hui une évidence. Mensonge, quand vous avez osé dire que le Conseil de sécurité était bloqué, parce qu’il n’avait pas voté de résolution autorisant la guerre. Il n’était pas bloqué: il avait adopté une procédure et une procédure qui fonctionnait.
L’Irak affaibli, méthodiquement affamé depuis dix ans, contraint de désarmer contre des promesses de paix, allait s’effondrer dès les
premières heures du conflit. Mensonge! Il résiste, et souvent héroïquement. La population irakienne allait accueillir les troupes de
l’empire comme des libérateurs. Mensonge! Elle les accueille comme des occupants. L’Irak disposait, paraît-il, d’armes de destruction massive. Tout a été dit à ce sujet, des bobards les plus sinistres aux plus ridicules, comme ceux de Tony Blair, qui s’est déshonoré, le 5 février, en présentant un rapport justifiant l’agression, dont 11 pages sur 19 émanaient d’un mémoire d’étudiant datant d’une dizaine d’années. À ce jour, les seules armes de destruction massive sont les milliers de bombes et de missiles sophistiqués de l’empire anglosaxon qui écrasent les villes irakiennes.
Comme juriste, je constate la cynique violation de toutes les règles de droit que les anglo-américains eux-mêmes avaient mises en place pour prévenir les guerres. Comme Européen, je déplore les haines, hélas justifiées, que les bombes de l’empire accumulent contre le monde occidental. Comme chrétien, je suis horrifié qu’une telle guerre, qui ne remplit aucune des conditions de justice, puisse se faire au nom de Dieu. J’appelle un chat un chat et Tony Blair un meurtrier mondain.
Quant à George Bush, qu’il cesse d’invoquer Dieu ou seulement pour le prier: que le sang des Irakiens innocents ne retombe pas sur le peuple américain !