Le Front National ne cesse d’affirmer que le Système ment aux Français concernant les chiffres réels de la délinquance dans notre pays, mystification qui est l’apanage aussi bien des gouvernements de gauche que de droite. Une manipulation dénoncée par Jean-Marie Le Pen au cours de la campagne présidentielle et que le retour aux « affaires » de Sarkozy depuis 2002 n’a pas fait cesser, bien au contraire, celui-ci ayant largement bâti sa conquête de l’Elysée sur une réputation, très usurpée, d’homme à poigne ayant réussi à endiguer ce fléau. Dans un ouvrage à paraître le 4 octobre, « Police, des chiffres et des doutes », Jean-Hugues Matelly, chercheur à l’Institut d’études politiques (IEP) de Toulouse, et Christian Mouhanna, chercheur au CNRS, livrent une étude détaillée, s’appuyant notamment sur de nombreux témoignages de policiers et de gendarmes, sur l’ampleur des manipulations opérées ces dernières années. Piqué au vif, l’ex grand sachem du grand Orient, le sarkozyste Alain Bauer, président de l’Observatoire national de la délinquance (OND), a immédiatement dénoncé l’analyse de MM. Matelly et Mouhanna, qu’il a qualifié de « parcellaire ». M Bauer a cependant confessé que les enquêtes de victimation opérées par l’OND en 2005, démontrent que la délinquance est « trois fois supérieure aux chiffres officiels »…Selon Jean-Hugues Matelly interrogé par l’AFP le 29 septembre, « les chiffres (du ministère de) l’Intérieur sont aberrants », « le système triche (particulièrement) depuis 12 ans avec ces chiffres, c’est une manipulation ». Les deux auteurs fustigent les « faiblesses structurelles et l’instrumentalisation des statistiques pour montrer que la politique du gouvernement réussit », « la façon d’utiliser les chiffres en vue de servir une stratégie particulière ». « Chacun cherche à optimiser la situation, les pratiques d’enregistrement offrent nombre de failles, de possibilités de contournement ou d’évitement (…) sans le moindre contrôle externe ». Les auteurs énumèrent les « techniques de manipulation » : « refus d’enregistrer une plainte », « déqualification d’une infraction de délit en contravention » (non prise en compte dans les statistiques), « regroupement de plusieurs délits sous un seul procès-verbal et en un seul comptage statistique » pour éviter toute hausse. « C’est un vrai problème de démocratie » et « le sujet est tabou», affirme M. Matelly.