Malgré une abstention qui est restée très élevée (48,8%), d’une quinzaine de points supérieure à celle du second tour de 2004, et l’écrasante promotion médiatique en faveur de l’UMPS et d’Europe Ecologie entre les deux tours, le grand gagnant de ce 21 mars est incontestablement le Front National. Certes, l’alliance des partis de gauche et d’extrême gauche a recueilli 53,85%, un record depuis les législatives de 1981, vingt points devant l’attelage de l’UMP et des huit autres partis qui y sont associés.
Pour autant, dans les 12 régions où les listes FN ont pu se maintenir, elles progressent au second tour par rapport au premier de près de 500 000 voix, passant de 1 462 482 voix le 14 mars (15,09%) à 1 943 463 suffrages (17,81%) ce 21 mars. Le pointage établi hier soir par le ministère de l’Intérieur crédite le FN d’un total de 118 élus, contre moins d’une centaine siégeant sous l’étiquette FN dans les assemblées régionales sortantes.
Œuvrant consciencieusement à la destruction du FN depuis 2002, opposition nationale qu’il s’agissait de « tuer » pour empêcher tout recours à l’idéologie mondialiste de l’UMPS et de ses alliés, Nicolas Sarkozy a donc raté sa mission principale, celle pour laquelle du moins il avait recueilli de nombreux soutiens…
Donnée battue, vidée de sa substance et siphonnée par le parti sarkozyste, l’opposition nationale, populaire et sociale opère un spectaculaire redressement. Celui-ci eut été encore plus important avec une abstention moindre, suscitée en grande partie par les sondages d’avant le premier tour annonçant avec une « curieuse » unanimité le FN plus ou moins largement sous la barre des 10%. Enquêtes d’opinion qui ont contribué à démobiliser une partie de l’électorat national : à quoi bon se déplacer pour aller voter si l’on est certain de ne pas avoir d’élus ? Ainsi, à quelques petites dizaines de milliers de voix près, le FN n’a pu se qualifier pour le second tour dans certaines régions, notamment en Ile-de-France, en Aquitaine ou encore en Midi-Pyrénées où, au vu des résultats de ce dimanche, l’opposition patriotique aurait obtenu un nombre d’élus conséquent.
Avec une seule région sauvée, l’Alsace, et un score historiquement bas pour la « droite », les caciques de l’UMP peuvent méditer sur cet adage qu’aime à citer Jean-Marie Le Pen : « la roche tarpéienne est proche du capitole ». A bon droit, le Président du FN a affirmé dimanche soir à Nice que ce résultat du second tour des régionales marquait « l’effondrement du sarkozysme ». « Le coup est très dur » pour M. Sarkozy, d’autant plus que « les (huit) ministres engagés sont battus », a-t-il dit. « Il faut à présent se préparer à la succession », a-t-il ajouté, estimant que si sa carrière politique se terminait là, « elle se terminait bien ». « Mais (…) quand je vois Mme Veil entrer à l’Académie et qu’elle a mon âge, je me dis que j’ai encore de l’avenir !».
Marine Le Pen a estimé que les résultats marquaient « un très grand succès pour le Front national (…). Le courant national est revenu comme un acteur majeur. Nous sommes donc là face à un vote de conviction, un vote d’adhésion ». Un sentiment qui est aussi celui du politologue Jean-Yves Camus (Iris) qui note que « pour la première fois, le FN ne perd pas de voix entre les deux tours. Il y a une dimension de protestation dans ce vote mais aussi d’adhésion au programme du FN ».
Une analyse partagée par Bruno Gollnisch sur les antennes régionales dimanche soir, le président du groupe FN en Rhône-Alpes ayant d’ailleurs anticipé le succès de l’opposition nationale dans l’entretien qu’il a accordé en fin de semaine dernière à Lyon Mag, pointant les échecs et les reniements de la droite mondialiste. « Les Français a-t-il déclaré, n’en n’ont-ils pas assez de constater que leurs frontières économiques sont ouvertes à la concurrence de produits sauvages, qui, pour le profit d’un tout petit nombre, ruine nos entreprises, nos industries? Les frontières ajoutait-il, sont également ouvertes à une immigration de plus en plus invasive, à des capitaux qui viennent saisir chez nous ce qu’il reste de patrimoine industriel. Aucun des problèmes du pays n’est véritablement réglé. On continue à nous imposer des repentances à répétition. Notre jeunesse n’a pas la formation qui pourrait lui permettre de trouver facilement des emplois. On voit bien qu’aujourd’hui l’agitation du chef de l’État et du gouvernement est essentiellement médiatique. Les Français ont une occasion unique de protester contre cela et de dire leur sentiment : c’est le bulletin de vote Front National ! ».