Les critiques formulées par l’opposition nationale sur la viabilité de l’euro, monnaie commune imposée à nos compatriotes au terme d’une formidable campagne d’intoxication et de publicité mensongère, sont désormais partagées par un nombre sans cesse plus important de spécialistes. Si la dénonciation frontiste des tares de cette monnaie s’appuie historiquement sur les travaux de Maurice Allais, un autre prix Nobel d’économie, l’Américain Paul Krugman (lauréat 2008), se livre à son tour à une charge très sévère et sans concession dans l’édition de mars du magazine allemand Cicero paru hier.
Selon les extraits de cet entretien publié en France, M. Krugman relève que « les architectes de l’euro ont décidé d’ignorer les difficultés inhérentes à une monnaie commune », « ils ont surtout ignoré les mises en garde contre l’absence d’institutions nécessaires pour que fonctionne la monnaie commune ».
« Le résultat n’est pas seulement une tragédie pour l’Europe mais pour le monde entier » avance-t-il.
Au nombre des scenarii possibles pour sortir de la crise de l’euro, il propose aux responsables de l’euroland de prendre exemple sur la « zone dollar, à savoir les Etats-Unis », en transformant la zone euro en « union fiscale » qui permettrait des transferts financiers d’un pays à l’autre.
Paul Krugman cite l’exemple du Nevada, Etat aussi gravement touché par la crise que l’Irlande, mais qui s’en est mieux sorti parce qu’ « une grande partie des dépenses publiques viennent (de l’Etat fédéral) de Washington ».
« Les Etats qui ne sont pas encore en faillite paient pour les Etats qui sont en faillite », résume Paul Krugman, qui estime que ce type de fonctionnement est le seul capable d’assurer la pérennité de l’euro, faute de quoi, la monnaie commune européenne est condamnée…
La solution prônée par M. Krugman qui consiste à épouser le modèle fédéral a certes l’aval des européistes les plus fanatiques en ce qu’il sert leur propagande. Ces derniers expliquent en effet que toutes les tares de l’Europe bruxelloise viennent du fait que la logique européiste d’abaissement des souverainetés nationales n’est pas assez poussée. Un scénario qui achoppe pourtant sur la position du poids lourd allemand qui refuse que sa prospérité économique serve à renflouer les pays de l’UE en train de sombrer. Européens d’accord mais Allemands d’abord…
Marie-France Garaud, invitée de l’émission Ce soir ou jamais, sur France 3, le 13 décembre dernier –voir notre article en date du 17 décembre – rappelait que la vision européenne des dirigeants allemands correspondait avant tout « à l’espace historique de la Germanie », celui de l’empire carolingien.
« L’Allemagne n’a pas l’intention de soutenir les pays avec lesquels elle ne partage aucune solidarité politique, économique ou régionale. D’autant que ceci se passe à un moment où le basculement vers l’Asie est véritablement patent, visible, criant, massif, et où, par conséquent, l’Allemagne retrouve son tropisme historique vers l’Est (…). Ce n’est là qu’une politique germanique classique. Ça ne veut pas dire qu’elle ne veut pas que la France soit dans cette Europe-là, mais l’Allemagne n’a pas du tout envie des pays du Club Med. »
« Le projet de l’Allemagne pourrait être de garder les pays qui l’intéressent et de trouver les mécanismes, sans être trop sauvage, qui amènent à terme à des limitations de capacité pour les pays du sud, de sanctions, de privation des droits, etc. » Nous sommes loin des vœux de M Krugman…
Yves-Marie Laulan s’interrogeait de son côté sur le site Polemia en novembre: combien de temps l’Allemagne, « le roc solide sur le lequel s’amarre tout le système financier européen », « va-t-il accepter de se saigner aux quatre veines au profit de pays délinquants et incapables de se redresser à vue humaine ? »
Et d’évoquer un scénario de sortie de crise, avec le maintien d’un « noyau dur de l’euro, à 6 ou à 9 , regroupant les pays forts, à niveau de développement économique et administratif proche, assorti de l’acception d’une discipline budgétaire et monétaire concertée, sinon commune. Et les autres pays « hors euro autorisés à dévaluer et à restructurer avec une assistance financière et technique renforcée de l’Europe. »
Concernant « le problème des banques folles qui ont précipité l’Irlande (et l’Islande) et leurs gouvernements dans l’abîme », M. Laulan prône la « (nationalisation) des établissements bancaires ou de les placer sous surveillance permanente et les insérer dans le corset d’une réglementation sévère pour les empêcher de faire des opérations douteuses porteuses de drames. C’est exactement le contraire de ce qu’on a fait depuis 30 ans en cédant aux sirènes de la mondialisation et d’un libéralisme extravagant. »