Pendant que la zone euro se débat dans ses contradictions mortelles, le Proche et le Moyen-Orient continuent de focaliser nombre de craintes. Le saccage de l’ambassade britannique à Téhéran par des « étudiants », en réponse à un renforcement de l’embargo britannique sur le pays, a eu pour effet d’élever encore d’un cran les tensions entre l’Iran, les puissances atlantistes et leurs alliés. Quant à la proclamation officielle des résultats des législatives en Egypte, ils ont confirmé la victoire attendue des islamistes pour lesquels deux électeurs sur trois se sont prononcés dans un scrutin marqué par un taux de participation record pour ce pays (62%). Un résultat salué de manière bien embarrassée par les soutiens occidentaux du si spontané « Printemps arabe »… Les Etats-Unis ont ainsi félicité l’Égypte pour « le succès de ce processus démocratique ». Washington a rappelé sa volonté de dialoguer avec un large éventail de mouvements politiques, y compris – avec les «Frères Musulmans», même si l’inquiétude prédominait en Israël, son principal allié dans la région.
Dans les faits, le « bloc islamique » a donc récolté 65% des suffrages des électeurs égyptiens : le parti Wassat recueille 4,2% des voix, le parti salafiste (encore plus rigoriste) près de 25%, les Frères musulmans 36% des suffrages.
Le 23 novembre, le blog de Bruno Gollnisch citait l’article de Jean-Claude Galli dans France Soir qui rappelait qu’ Alain Juppé expliquait qu’il ne faut « pas craindre les aspirations des peuples arabes à la démocratie et aux réformes » et « s’accommoder de la présence des Frères » en Egypte. A contrario, « le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), Richard Prasquier, affirmait pour sa part que l’arrivée des Frères musulmans au pouvoir serait une catastrophe pour la paix et pour l’Egypte elle-même . Ces derniers représentant, selon lui, un danger pour l’ensemble de la civilisation .»
David Koskas, sur le site israelinfo, rapportait de son côté ce lundi que « si les Frères musulmans choisissaient de tourner complètement le dos à la démocratie en appliquant un Coran intransigeant, ils perdraient à l’extérieur le soutien de l’Occident, qui vaut au moins les 1,3 milliard de dollars que versent les Etats-Unis à l’Egypte chaque année et se confronteraient à l’intérieur à une large partie des électeurs, ainsi qu’à l’armée. Ils ont par ailleurs annoncé qu’ils ne s’allieraient pas au parti salafiste, crédité de 20% des votes, vraisemblablement pour ne pas effrayer leurs partenaires et une partie de leurs électeurs. »
Pour autant, « Israël est le plus grand perdant des élections législatives égyptiennes largement dominées par les Frères musulmans, a déclaré dimanche un responsable du Hamas en Cisjordanie, Hamed Bitawi, cité par l’agence de presse The Quds Press (…). Il poursuit en faisant l’éloge des Frères musulmans, qui ont annoncé vouloir reconsidérer le traité de paix entre l’Egypte et Israël. » « Les partisans du Hamas (…), se félicitent de la victoire annoncée des Frères musulmans au premier tour des élections législatives égyptiennes, et contemplent avec la même joie, celles des Frères version tunisienne et marocaine(…). Pour Mousa Abou Marzouk, vice-président du bureau politique du Hamas, « avec la victoire des Frères musulmans, l’Egypte va revenir à sa mission originale de soutien total à la cause palestinienne ».
Au nord d’Israël, la Syrie de Bachar-al-Assad est toujours en proie aux violences. Dans la guerre des opinions publiques menée actuellement, la publication d’un rapport de l’Onu la semaine dernière sur les violations des droits de l’homme en Syrie a été largement médiatisée. Il fait état de témoignages d’opposants sur des meurtres et des tortures de centaines d’enfants par les forces fidèles au régime – témoignages formellement contestés par Damas.
Offensive anti Bachar-al-Assad qui ne faiblit pas sur le terrain diplomatique. Le Conseil des droits de l’Homme de l’ONU de la résolution a condamné le régime de Damas, malgré l’opposition principale de la Russie et de la Chine. Le vice-président américain Joe Biden était d’ailleurs en Turquie samedi et son service de presse a affirmé que «Al-Assad et son régime sont actuellement la source d’instabilité en Syrie et posent le plus grand risque d’attiser les conflits confessionnels, pas seulement en Syrie mais au-delà », a rapporté.
« Une ligne de partage s’est dessinée au fil des mois entre la majorité du monde arabe et la Turquie d’obédience sunnite, qui soutiennent la révolte conduite par leurs frères de religion majoritaires en Syrie, et un croissant chiite partant de l’Iran, en passant par l’Irak, la Syrie et le Liban qui appuie le président Bachar al-Assad, issu de la minorité alaouite, une émanation du chiisme rappelle une dépêche de l’Afp. En outre, le Moyen-Orient, est composé d’une mosaïque de minorités, notamment chrétiennes, mais également chiites dans les pays sunnites du Golfe, comme Bahreïn et l‘Arabie Saoudite, et sunnites en Irak ou au Liban. »
Conflits religieux et des minorités ethniques que certains « faucons » américains et israéliens attiseraient à dessein dans le cadre d’une volonté de remodelage de cette région du monde, et dont l’Irak de Saddam Hussein a déjà fait les frais avancent de nombreux observateurs. Dans son numéro 14 (février 1982) la revue israélienne Kivounim évoquait ce que pourrait être la stratégie de l’Etat hébreu à venir, basée sur la « dislocation » de « l’Egypte », de la « Libye » et du « Soudan ». « L’éclatement de la Syrie et de l’Irak en régions déterminées sur la base de critères ethniques ou religieux doit être à long terme, un but prioritaire pour Israël(…) ».
« Les structures ethniques de la Syrie l’exposent à un démantèlement qui pourrait aboutir à la création d’un Etat chiite le long de la côte, d’un Etat sunnite dans la région d’Alep, d’un autre à Damas, et d’une entité druze qui pourrait souhaiter constituer son propre Etat (…). Un tel Etat serait, à long terme, une garantie de paix et de sécurité pour la région » était il encore affirmé, mais ce n’est pas parole d’évangile et il est permis d’en douter !
waldmann dit
Monsieur,
J’ai lu avec attention votre article concernant la situation en Syrie et au Moyen Orient.
En votre quelité de membre éminent du FN je souhaite connaitre la position de votre mouvement sur les questions suivantes.
Soutenez vous la création d’un état Palestinien dans les frontières de 1967 ?
Que pensez vous des mouvements visant à déligitimer l’état D’Israel.
Vous sentez vous proche du régime de Bachar Al Assad et des mollahs Iraniens ?
Le hezbollah est il selon vous un mouvement terroriste ou de résistance ?
Merci pour votre réponse
Salutations
Modérateur dit
Au risque de vous décevoir Mickaël, la position du FN sur le conflit israélo-palestinien n’est pas très originale en ce qu’elle est officiellement partagée par la quasi-totalité des formations politiques françaises (et européennes), à savoir le droit pour le peuple juif, comme pour le peuple palestinien, de vivre en paix, dans un Etat aux frontières sûres et reconnues.
Les frontières de 1967 posent notamment la question du statut de Jérusalem, la position défendue par le Vatican à ce sujet nous paraît éventuellement une piste intéressante, mais encore faudrait-il qu’elle recueille l’assentiment des parties concernées…
Pour répondre à vos autres questions, il s’agit de comprendre que nous ne sommes dans l’absolu ni pro ni anti « Bachar » , ni pro ni anti « mollahs », ni pro ni anti « sioniste », mais tout simplement « pro-français ». Au-delà de nos liens d’amitiés anciens avec le peuple libanais, de l’empathie toute particulière que nous manifestons vis-à-vis des Chrétiens d’orient, nous n’oublions pas qu’« un Etat a des amitiés transitoires et des intérêts permanents »…
Quant à la question de savoir si le Hezbollah est un mouvement terroriste OU de résistance (ou un mouvement terroriste ET de résistance), elle n’a pas grande signification…elle n’a d’ailleurs pas tourmenté les autorités israéliennes qui ont soutenu pendant de années l’émergence de cette organisation islamiste afin d’affaiblir les laïcs de l’OLP…
Enfin, pour aller au fond des choses , il ne vous pas échappé que le FN s’est toujours élevé ces 20 dernières années contre la politique d’agression menée par le Nouvel ordre mondial, notamment au Proche et au Moyen-Orient. Or, Israël, dont nous ne minorons pas les dangers qui l’assaillent, mène une politique qui en fait aussi un relais des intérêts de Washington, un allié du « grand jeu » américain dans cette partie du monde. Or, les intérêts géopolitiques des Etats-Unis, ne sont pas toujours, très loin s’en faut, ceux des Français et des Européens.
Nous avons vu le résultat de cette volonté de domination américaine à l’œuvre en Irak, les conséquences désastreuses de cette guerre menée contre le régime laïc de Saddam Hussein avec le soutien d’Israël. Et aujourd’hui les risques de déstabilisation de la Libye (et de ses voisins) au lendemain de l’intervention de l’Otan …
Ce qui nous incite à la prudence, à ne pas partager les discours des boutefeux qui pressent à un conflit contre l’Iran ou qui manœuvrent en coulisse en faveur de la chute du régime laïc syrien, au nom d’une morale et de considérations « humanistes » à géométrie variable. Puisqu’il est à la mode ces derniers jours, rappelons cette sentence de Bismarck : « en politique les sentiments font de bons serviteurs mais de mauvais maîtres ». Tout est dit…