Placés devant la nette victoire du NON à la Constitution européenne, ses partisans dressent un sombre tableau de la situation. Ayant reproché à leurs adversaires d’agiter des peurs injustifiées, n’encourent-ils pas aujourd’hui exactement le même reproche ?
Car la nette victoire du NON n’est pas la fin du monde. Quoi qu’on en ait dit, il n’y aura pas de résurgence des antagonismes heureusement disparus. Ce n’est d’ailleurs pas l’indépendance nationale qui a provoqué les guerres civiles européennes que furent les conflits mondiaux ; ce sont au contraire les menaces contre l’indépendance nationale, que nos voisins n’exercent plus.
La portée du vote
Ce vote n’est pas non plus, il est vrai, la solution de tous nos problèmes. Juridiquement, le traité de Nice restera en vigueur et susceptible de renégociations dans la pratique, comme M. Delors l’a reconnu à demi-mot. Et que l’on ne vienne pas dire que cette perspective est utopique ou que les textes ne la prévoient pas. La France a, dans le passé, pratiqué la politique dite “de la chaise vide”, et elle avait obtenu le “Compromis de Luxembourg”, qui lui donnait satisfaction.
Au moment où les états membres de l’UE négocient les perspectives financières 2007/2013 (ie le budget de l’Europe) qui ne peuvent être adoptées qu’à l’unanimité, il est plus que douteux que les partenaires de la France la snobent, alors qu’elle contribue pour 17 % audit budget. Les responsables européens le reconnaissent eux-mêmes : l’Europe ne peut se passer de la France. Il revient à nos dirigeants de défendre le message des Français à Bruxelles : d’agir, non pas en chefs de partis, mais en représentants de la France et de l’expression de la souveraineté nationale.
De plus, il s’agit probablement d’un NON précurseur à beaucoup d’autres ! Sans parler de l’opposition allemande emmenée par Angela Merkel, donnée gagnante aux prochaines élections, qui peut faire basculer ce pays dans le camp des opposants à la Constitution, renouvelant le couple franco-allemand sur de nouvelles bases.
La fin d’un alibi
En tout état de cause, au plan national, la victoire du NON ne sonne pas seulement la fin d’une illusion, mais aussi celle d’un alibi. Celui de nos dirigeants politiques dans la constante évasion de leurs responsabilités. “C’est à cause de Bruxelles” ne pourra plus être l’excuse de l’inaction, des promesses non tenues, des réformes en souffrance. Cette victoire peut être l’occasion d’un sursaut national, renouveau dans lequel nous ferions enfin jouer nos atouts réels au service de nos intérêts légitimes.
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