Le sommet européen de ce jeudi doit permettre la mise en oeuvre d’un plan de sauvetage de la Grèce dont les modalités ont été discutées mercredi entre ministre des Finances de la zone euro. « Les capitales de la zone euro se retrouvent plongées dans l’urgence financière explique Libération. Il ne s’agit plus d’aider des banques privées, menacées de banqueroute, mais des États souverains, victimes d’attaques spéculatives menaçant la stabilité de la monnaie européenne.
Dans un éditorial consacré à la Grèce, Le Monde déplore qu' »à peine un an après avoir sauvé les banques en y consacrant de chaque côté de l’Atlantique des sommes colossales – 25 % du PIB, selon la Banque centrale européenne -, voici les Etats endettés attaqués par ces mêmes établissements financiers ».
Le Monde, quotidien de référence du système et d’Alain Minc, dénonçant les ravages de la finance apatride et vagabonde, il faut vraiment que la crise soit grave…
« La Grèce, analyse de son côté Libération, dont la situation budgétaire est dramatique, ne trouve plus preneur pour sa dette sur les marchés, à moins de 6 % pour un emprunt d’État à dix ans, un prix deux fois plus élevé que l’Allemagne. Le scénario d’une panne de refinancement de la Grèce, avec une explosion des taux d’intérêt, qui aboutirait à une faillite du pays, plane sur toute zone euro ».
En effet, le risque de contagion, signalé par la Commission européenne elle-même, a clos le débat sur l’opportunité d’isoler et de traiter vigoureusement la première victime ».
Dans le climat actuel, il n’est pas inintéressant de rappeler ce que disait Maurice Allais, prix Nobel d’économie. dans Le Figaro, en octobre 1998, en pleine crise asiatique :
« De profondes similitudes apparaissent entre la crise mondiale d’aujourd’hui et la Grande Dépression de 1929-1934 expliquait le professeur Allais : la création et la destruction de moyens de paiement par le système du crédit, le financement d’investissements à long terme avec des fonds empruntés à court terme, le développement d’un endettement gigantesque, une spéculation massive sur les actions et les monnaies, un système financier et monétaire fondamentalement instable (…).
Ce qui est éminemment dangereux, c’est l’amplification des déséquilibres par le mécanisme du crédit et l’instabilité du système financier et monétaire tout entier, sur le double plan national et international, qu’il suscite. Cette instabilité a été considérablement aggravée par la totale libération des mouvements de capitaux dans la plus grande partie du monde.
(…) Depuis 1974, une spéculation massive s’est développée à l’échelle mondiale. A New York, et depuis 1983, se sont développés à un rythme exponentiel de gigantesques marchés sur les « stock-index futures », les « stock-index options », les « options on stock-index futures », puis les « hedge funds » et tous « les produits dérivés » présentés comme des panacées (…).
Qu’il s’agisse de la spéculation sur les monnaies ou de la spéculation sur les actions, ou de la spéculation sur les produits dérivés, le monde est devenu un vaste casino où les tables de jeu sont réparties sur toutes les longitudes et toutes les latitudes. Le jeu et les enchères, auxquelles participent des millions de joueurs, ne s’arrêtent jamais. Aux cotations américaines se succèdent les cotations à Tokyo et à Hongkong, puis à Londres, Francfort et Paris. Sur toutes les places, cette spéculation, frénétique et fébrile, est permise, alimentée et amplifiée par le crédit. Jamais dans le passé elle n’avait atteint une telle ampleur (…).
L’économie mondiale tout entière repose aujourd’hui sur de gigantesques pyramides de dettes, prenant appui les unes sur les autres dans un équilibre fragile. Jamais dans le passé une pareille accumulation de promesses de payer ne s’était constatée. Jamais sans doute il n’est devenu plus difficile d’y faire face. Jamais sans doute une telle instabilité potentielle n’était apparue avec une telle menace d’un effondrement général. »
« Effondrement général » qui ne passerait pas seulement par la Grèce, qui pourrait être l’arbre qui cache la forêt comme l’explique un diplomate cité par Libération : «La Grèce est touchée, et tout le monde croise les doigts sur un cas beaucoup plus lourd : l’Espagne»…