Avec un moindre tapage médiatique qui celui qui a accompagné les libérations de la colombienne Ingrid Bétancourt , des infirmières bulgares ramenées de Lybie ou encore des membres de L’Arche de Zoé prisonniers au Tchad, Clotilde Reiss, a enfin foulé le sol national dimanche. La jeune étudiante de 23 ans, emprisonnée six semaines, fut arrêtée le 1er juillet 2009 à l’aéroport de Téhéran alors qu’elle rentrait en France après avoir travaillé cinq mois comme lectrice à l’université d’Ispahan. Elle a donc été retenue dix mois en Iran, assignée à résidence dans les locaux de l’ambassade de France. Elle avait été condamnée par la justice iranienne à deux fois cinq ans de prison pour « atteinte à la sécurité nationale de l’Iran ». Plus précisément pour avoir transmis des informations sur les manifestations post-électorales et participé aux rassemblements anti-gouvernementaux. Considérée selon les propres termes de Nicolas Sarkozy comme l’une de ses « protégées », ladite protection a donc porté ses fruits, même si de « mauvais esprits » doutent des affirmations selon lesquelles cette libération a été possible sans contrepartie…
Dimanche, le chef de l’Etat a remercié tout particulièrement « pour leur rôle actif » dans la libération de Clotilde Reiss les présidents syrien Bachar al-Assad, sénégalais Abdoulaye Wade, et brésilien Luiz Inacio Lula Da Silva -ce dernier était hier à Téhéran, dans le cadre d’une une ultime médiation sur le dossier nucléaire.
Selon le site oumma.com Abdoulaye Wade a pris toute sa part dans le règlement de cette affaire : « sous sa double casquette de président du Sénégal et de l’OCI (Organisation de la conférence Islamique), il s’imposait comme l’interlocuteur le plus légitime, à même de convaincre Mahmoud Ahmadinejad, l’homme fort de Téhéran du bien-fondé d’un geste hautement symbolique, ce à quoi ce dernier aurait immédiatement donné son accord de principe ».
« Aujourd’hui, le président du Sénégal met clairement en cause la diplomatie française qui, selon lui, en confiant, en octobre 2009, le relais d’un dossier bien avancé, mais très sensible, à André Parant, le conseiller spécial de l’Elysée pour l’Afrique, aurait purement et simplement perdu plus de six mois. Un piétinement préjudiciable qui s’est enlisé dans une impasse inextricable, que seule la nouvelle intervention d’Abdoulaye Wade a réussi à démêler pour le meilleur. Je suis quand même le président de l’OCI . C’est fort de ça que je pouvais faire quelque chose. Mais je ne dis pas que si ce n’était pas moi, quelqu’un d’autre ne l’aurait fait » a déclaré M. Wade.
Mais pour certains, les démarches diplomatiques cacheraient d’autres accords plus inavouables. L’avocat de Clotilde Reiss, Ardavan Amir Aslani, a déclaré à RTL que la libération de la jeune française s’est monnayée 250 000 Euros. Sans aller jusque là, le ministre de l’Intérieur Brice Hortefeux signera ce lundi un décret d’expulsion de l’Iranien Ali Vakili Rad, ouvrant la voie à sa libération conditionnelle. condamné en 1994 à perpétuité pour le meurtre en 1991 de l’ancien Premier ministre du Chah, Chapour Bakhtiar, cet élargissement était demandé avec insistance par Téhéran. Peu nombreux sont ceux qui croient en une coïncidence. L’Express a également relevé un lien de cause à effet entre la relaxe de l’étudiante française et le renvoi en Iran le 7 mai de Majid Kakavand, dont la cour d’appel de Paris a rejeté une demande d’extradition vers les Etats-Unis…
Dans un autre registre, l’officier de marine Maurice Dufresse, auteur sous le nom de plume de Pierre Siramy du livre « 25 ans dans les services secrets » (Flammarion) paru en mars dernier, a souhaité lui aussi réagir à cette affaire. Ancien sous-directeur de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) jusqu’à la fin 2009, chef du Service Technique d’Appui (400 fonctionnaires, 61 millions d’euros de budget annuel), il a ainsi affirmé que Clotilde Reiss était un agent français.
Hier sur la chaîne d’information LCI, l’ex cadre de la DGSE a expliqué que Clotilde Reiss, « a travaillé au profit de la France pour collecter des informations qui étaient de nature de politique intérieure et d’autres qui étaient sur la prolifération nucléaire. Elle est immatriculée à la DGSE ».
« Selon Pierre Siramy a expliqué la chaîne LCI, c’est par patriotisme que la jeune française se serait d’elle-même présentée à l’ambassade dès son arrivée en Iran. Un engagement que les autorités locales auraient découvert, d’après lui, en scrutant sa correspondance par internet ».