Lundi, le Salon beige a publié le message d’un internaute évoquant les appels aux dons lancés par les Organisations non gouvernementales (ONG) et relayés abondamment par les medias en faveur des victimes pakistanaises des meurtrières inondations de cet été : « si le Pakistan avait tout récemment 1,4 milliard pour acheter des avions de chasse à Lockheed, pourquoi le Pakistan n’a-t-il pas 460 millions de dollars à consacrer à ses propres citoyens détrempés? ».
« Je demande pardon à la Croix-Rouge, à CARE, à Oxfam et aux autres ONG, mais je ne donnerai pas un cent pour les efforts humanitaires au Pakistan. Je ne donnerai pas un cent pour le Pakistan parce que le Pakistan n’a jamais de problème à acheter, ou à se faire financer, du matériel militaire (…). Le Pakistan a du fric pour acheter des F-16. Le Pakistan a du fric pour entretenir un arsenal atomique capable de détruire la moitié de la planète? Le Pakistan a donc les moyens d’aider son peuple ».
« Je ne donnerai pas pour le Pakistan comme je ne donnerai pas pour les pêcheurs de La Nouvelle-Orléans poursuit-il, qui sont privés d’un gagne-pain depuis la fuite de pétrole causée par BP dans le golfe du Mexique (…).Je me demande pourquoi je devrais donner un sou aux habitants du pays le plus riche de l’histoire de l’humanité, dont le gagne-pain a été saccagé par une giga-multinationale jouissant d’une capitalisation boursière de 120 milliards US au sein d’une des industries – l’énergie – les plus lucratives de la planète ».
« Il me semble que les États-Unis d’Amérique, que BP, que l’industrie de l’énergie ont assez de fric pour dédommager les pêcheurs de La Nouvelle-Orléans et leurs familles et les descendants de leurs familles jusqu’en 2060, au moins (…) ».
Marie-France Galle sur le blog du Figaro relevait pour sa part que si les Pakistanais acceptent l’aide des pays frères musulmans et des occidentaux, ils refusent « obstinément les 25 millions de dollars offerts par l’Inde pour aider ses sinistrés (…). De quoi ont donc peur les autorités d’Islamabad ? Que les Indiens tentent de gagner les coeurs et les esprits des pauvres qui ont tout perdu au Pakistan ? ».
Dans son excellent dernier numéro, Le Choc du Mois qui consacre un dossier à l’Afrique postcoloniale, évoque le charity business, notant que « les bons sentiments (servent) des intérêts moins avouables. Cette confusion trop fréquente entre l’humanitaire, la raison politique et la rapacité économique, c’est le scandale de l’Arche de Zoé qui en a révélé l’ampleur en 2007. En cause : les liens entre les ONG et les autres acteurs de l’aide internationale, publics ou privés. De fait les grandes ONG exerçant leur lobbying à Washington ou à Bruxelles, sont concurrentes pour obtenir des crédits dans ce qu’il faut bien appeler le grand marché de l’aide humanitaire. Une logique importée, tant économique que politique peu donc commander l’action sur le terrain »…
Comme le note le célèbre universitaire africaniste Bernard Lugan dans ce même mensuel, interrogé sur l’avenir de l’Afrique, « les Africains ne sont pas des Européens (…) mais les héritiers d’une vieille histoire ancrée sur le communautarisme et la continuité temporelle. Ils se suicideraient donc s’ils abandonnaient ce qui fait leur identité. Si, au contraire, ils répudient le modèle européen fondé sur l’individualisme et l’oubli des racines, alors tout sera possible».
«Mais pour cela, ils doivent auparavant rejeter les modes intellectuelles et expliquer aux ONG qu’il y a suffisamment de malheureux en Europe pour occuper le temps de leurs membres, même si la misère est plus agréable à soulager au soleil des tropiques que durant les frimas de l’hiver septentrional… ».