La semaine dernière, Paris-Match interrogeait deux députés emblématiques de l’UMP, Axel Poniatowski (Val-d’Oise) et Pierre Lellouche (Paris) afin de savoir pourquoi leur parti, contrairement à d’autres mouvements dits « conservateurs », n’a pas envoyé ne serait-ce qu’un représentant à la convention du parti républicain à Tampa (Floride). M Lellouche, agent d’influence de l’Otan de longue date, avance comme explication que « Les Américains considèrent que l’Europe est un continent en déclin » (ce qui n’est pas faux), que le parti républicain n’est pas tendre avec la France (il le découvre ?). Enfin confie-t-il, le mouvement populiste des tea party…n’est pas franchement sa tasse de thé. M Poniatowski, indique de son côté que« les valeurs de la droite américaine et de la droite française se sont considérablement éloignées depuis 15 ans ». « On a plus de relations avec les démocrates et les think tanks d’obédience démocrate » précise t-il. » On l’occulte toujours, mais l’UMP se situe parfaitement en concordance avec le Parti démocrate. Et encore, on serait plutôt un peu plus à gauche».
Dans les faits, que les Etats-Unis soient dirigés par un républicain ou un démocrate, ne change guère les orientations de la politique étrangère de Washington. L’ «élite au pouvoir » défend bec et ongles ce qu’elle considère être ses intérêts géostratégiques (et ceux du peuple américain ?) avec l’appui de ses « caniches « atlantistes . « Caniche » c’était en effet le sobriquet utilisé par Laurent Fabius quand il était dans l’opposition pour fustiger en septembre 2006 l’attitude d’allégeance de M Sarkozy envers M. Bush.
Aujourd’hui M. Fabius est ministre des Affaires étrangères d’un François Hollande qui colle, quand il ne les précède pas, aux vœux et manœuvres des Américains, comme on le constate une nouvelle fois dans le dossier Syrien.
L’unanimisme, toujours louche, de nos médias dans leur « « éclairage » sur la situation de ce pays, ou les forces fidèles au régime de Bachar Al-Assad sont forcément composés de salauds ivres de sang et de tortionnaires, et les rebelles de patriotes humanistes, est d’ailleurs le signe supplémentaire que l’affaire syrienne ne doit pas être appréhendée avec manichéisme.
Celui dont a fait preuve, mais est-ce bien étonnant, Laurence Parisot mercredi qui a accueilli le pathétique boutefeu Bernard-Henri Lévy, auréolé de son appel à une action militaire aérienne en Syrie, à l’Université d’été du MEDEF. « Vous êtes l’incarnation de l’intelligentsia française telle que nous l’aimons » a déclaré Mme Parisot à l’adresse du philosophe pipo(le)…rien de moins.
Dans ce déluge de jugements à l’emporte-pièce sur la Syrie, suscité et démultiplié par les habituels pions et censeurs du système politico-médiatique, hormis le FN , les voix de quelques hommes lucides se font entendre. Mi-août, Jean-Pierre Chevènement, président d’honneur du MRC, a dénoncé les « professionnels de l’ingérence » qui poussent la France « à intervenir militairement » en Syrie ; « La Syrie n’est ni la Tunisie ni l’Egypte. C’est un pays plongé dans une guerre civile inspirée et alimentée de l’extérieur » a-t-il constaté.
Selon l’ancien ministre de la Défense, « des professionnels de l’ingérence poussent aujourd’hui la France à intervenir militairement, fusse par la seule voie aérienne, en violation de la légalité internationale et au côté de pays dont les ambitions et les intérêts ne sont pas les nôtres ».
Ancien préfet, un temps adhérent au RPF de Charles Pasqua, ancien membre des cabinets de Philippe Séguin et d’ Édouard Balladur, Roland Hureaux a signé pour sa part une tribune dans le numéro (estival) de Valeurs Actuelles (du 9 au 22 août,) intitulée « Et si l’on pensait aux chrétiens de Syrie ? » Il rappelle le rôle historique de la France au Levant , le mandat confié sur la Syrie par la SDN, par lequel la France était aussi censée protéger les minorités chrétiennes. Or, aujourd’hui, écrit-il, la diplomatie des Juppé et Fabius s’« évertue à détruire le seul régime arabe qui les protège encore », évoquant à ce sujet le sort funeste des chrétiens d’Irak.
M Hureaux, souligne la méthode des insurgés qui consiste à « pénétrer dans les quartiers centraux pour y prendre en otage la population ». Il relève que les massacres, tortures, enlèvements, viols, exécutions commis en Syrie sont principalement le fait de combattants de la liberté étrangers, se réclamant du salafisme ou d’al-Qaïda, venus renforcer la prétendue rébellion … ». « L’acharnement mis par Washington à vouloir à tout prix renverser le régime Assad ne semble plus relever d’une rationalité ordinaire mais de l’hybris d’une grande puissance irascible qui ne supporte pas qu’on lui résiste » affirme encore Roland Hureaux.
Et d’ajouter : « En poursuivant avec tant d’insistance leur offensive en Syrie par mercenaires interposés, par des sanctions et par une campagne médiatique sans précédent en temps de paix, les Américains et les Français se sont mis eux-mêmes devant le risque de n’avoir bientôt plus à choisir qu’entre une reculade humiliante et un conflit frontal avec la Russie, dont les conséquences seraient incalculables. »
Notons encore le communiqué du député UMP Jacques Myard qui se situe aux antipodes des fulminations anti-russes et atlantistes d’un Alain Juppé. « Les événements récents en Tunisie, en Libye, et en Egypte, où l’on voit s’installer des régimes islamiques qui veulent imposer par la force leurs conceptions intégristes et prosélytes de la charia doivent conduire les gouvernements occidentaux à plus de prudence sur le changement de régime à Damas (…) la France serait bien avisée de réfléchir à deux fois avant d’exiger le renversement du régime de Bachar, qui au demeurant se battra jusqu’au bout n’ayant rien à perdre » affirme M. Myard.
En effet, poursuit-il, « aucun observateur n’est capable d’affirmer que le mouvement de révolte contre le régime de Bachar El Assad serait conduit par des républicains laïcs. Il apparaît bien au contraire que ces mouvements dits de la « révolution » sont constitués de multiples forces disparates, allant d’Al Qaida aux salafistes, qui dans la mise en place d’un nouveau régime balayeront les quelques laïcs pour imposer leur loi. Et cela d’autant plus qu’ils sont armés en sous main par l’Arabie Saoudite, dont les conceptions libérales et le respect des minorités religieuses sont bien connus… »
Chacun aura noté avec Bruno Gollnisch que dans cette appréhension du dossier syrien, nous retrouvons la ligne de partage qui traverse parfois un même parti. A savoir entre d’un côté ceux qui refusent d’abdiquer les indépendances et souverainetés nationales, et de l’autre ceux qui, à « gauche » comme à « droite », acceptent de se soumettre au Nouvel ordre mondial. Cela n’est bien sûr pas le fruit du hasard…
BS dit
3 septembre 2012
Fort bien ! mais que fait encore M. Myard dans le parti des Juppé, Poniatowski, Lellouche et autres ?
M. Chevènement, au moins, n’est plus au PS et il avait eu le courage de démissionner pour ne pas cautionner la première intervention contre l’Irak.
BS
jean moulin dit
http://www.haaretz.com/news/middle-east/al-qaida-threatens-hezbollah-over-its-support-of-the-syrian-regime.premium-1.462076
Al-Qaida threatens Hezbollah over its support of the Syrian regime
Amid threats against Lebanon-based Hezbollah, tensions among Syrian opposition groups could deteriorate into fighting, alongside conflict with Assad’s regime.
By Zvi Bar’el | 02.09.12
Traduction amateur
Al-Qaida menace le Hezbollah pour son soutien du régime syrien
Parmi les menaces contre la base Hezbollah au Liban, les tensions parmi les groupes d’opposition syriens pourraient dégénérer en bagarre, à côté du conflit avec le régime d’Assad.
Par Zvi Bar’el | le 02.09.12
Un nouvel allié a rejoint l’Israël dans la lutte contre Hezbollah. Al-Qaida a récemment publié une attaque dure sur Hezbollah, dans lequel il demande aux Shi’ites de quitter l’organisation “s’ils ne veulent pas être la cible d’attaques Al-Qaida.”
Dans un enregistrement transmis sur les sites Internet Al-Qaida, le commandant d’Abdullah Azzam Shaheed Brigade en Syrie, Majd Al-Majd, a déclaré que “la revendication des chefs chiites qu’ Israël et les États-Unis sont responsables de l’assassinat de Premier ministre libanais Rafik Al-Hariri et pour susciter la rébellion en Syrie est sans base. Ceux derrière l’assassinat étaient les chefs du Hezbollah, les gardiens de la frontière avec Israël.”
Al-Majd, un citoyen saoudien qui a vécu jusqu’à récemment dans le camp de réfugiés Al-Hilweh Ein au Liban et de là a bougé en Syrie, est sur la liste d’Arabie Saoudite des hommes les plus recherchés. Il y a deux mois, on « l’a élu » pour être la tête de la branche syrienne d’Al-Qaida. Selon l’intelligence de Jordanie, Al-Majd supervise presque 6,000 militants qui sont entrés dans la Syrie de l’Iraq et de la Turquie.
Al-Majd dit au Libanais Shi’ites que “en envoyant vos fils du Liban pour qu’ils luttent sur le côté du régime criminel en Syrie, tuez nos fils et faites peur à nos femmes, est considéré comme un soutien en faveur à l’oppresseur contre l’opprimé et participe complètement au crime… Les membres d’ Hassan Nasarallah, qui pour ce régime, ont été tués comme les martyrs sont une insulte aux millions de Musulmans.” Al-Qaida est une organisation Sunni et ses chefs voient le règne du Hezbollah au Liban et le règne de la minorité Alawite en Syrie comme une réalité qui doit être changée pour toujours. Al-Majd n’hésite pas à menacer tout le Liban, si le Hezbollah continue de soutenir le régime Assad. “L’existence du Hezbollah est une menace à la sécurité du Liban et à l’industrie de tourisme,” a-t-il dit, en laissant entendre que son organisation y penserait par deux fois avant de planifier une attaque sur les touristes au Liban, l’état ne devrait continuer à renforcer le Hezbollah et ses chefs.
La branche Al-Qaida en Syrie rivalise avec une autre organisation jihadist dirigée par le prêcheur Jordanien Salafiste Muhammad Al-Shalabi, aussi connu comme “Abu Sayyaf.” Dans une interview avec le journal saoudien Al-Sharq, Abu Sayyef a dit qu’il supervise des centaines de combattants de Jordanie, d’Iraq, de Libye et d’autres états arabes, dont certains sont “les combattants d’Al-Qaida qui furent allé combattre en Iraq,” et que son organisation “a reçu la reconnaissance d’Al-Qaida.” Son organisation a revendiqué plusieurs bombardements impressionnants en Syrie, pendant qu’Al-Majd réclamait que son organisation était responsable de ces mêmes bombardements.
Une lutte pour le pouvoir survient maintenant entre les deux organisations, pendant que le groupe d’Abu Sayyef se concentre sur les opérations dans la Syrie du sud, spécialement dans Daraa. D’autre part, Al-Majd se concentre sur la Syrie du Nord et a même pris le contrôle sur un des franchissements de la frontière entre la Syrie et la Turquie. Al-Majd demande à ces combattants, et aussi bien à ceux de l’Armée de Syrie Libre de se retennir d’exécuter des attaques avec explosifs, puisqu’ils peuvent faire du mal aux gens innocents. Il semble, cependant que ces expressions de compassion sont juste là une autre façon de critiquer l’organisation d’Abu Sayyef.
On s’attend à ce qu’un autre pouvoir entre dans la bataille, aussi. Un groupe de militants Al-Qaida du Yémen, ont apparemment décidé de voyager en Syrie pour lutter contre le régime d’Assad et essayer de saisir un bout de pouvoir de décision du pays. Selon des rapports au Yémen, un groupe initial de militants a déjà commencé le voyage en Syrie et il y a beaucoup d’inquiétude qu’une guerre religieuse entre ces organisations entrera en éruption.