Il n’a pas fallu attendre longtemps pour que la compétition interne reprenne ses droits à l’UMP dans la perspective des primaires qui désigneront le candidat de cette formation à la prochaine présidentielle. Invité d’Europe 1 hier, Alain Juppé s’est attribué la victoire de la droite, y voyant « un succès de la stratégie d’union (UMP-UDI-MoDem) (qu’il n’a) cessé de préconiser, et qui s’est faite à peu près partout ». Hervé Morin, ex (très mauvais) ministre de la Défense dans les gouvernements Fillon I et II, challenger malheureux de Jean-Christophe Lagarde à la présidence de l’UDI , n’a pas dit autre chose. Prêchant pour sa paroisse (son avenir personnel), M. Morin déclarait hier sur Sud Radio : « ce que montre cette élection, c’est que l’UMP ne peut pas gagner sans l’UDI et que l’UDI ne peut pas gagner sans l’UMP ». Le maire de Bordeaux a logiquement confirmé que le plus grand dénominateur commun des pontes de la droite euromondialiste reste bien la lutte contre l’opposition patriotique : « C’est moi qui ai préconisé un combat frontal contre le Front National et ses propositions pour bien ouvrir les yeux des électeurs sur ce qu’elles ont de dangereux ».
Alain Juppé a réitéré le refus de la direction de son parti, en porte-à-faux avec une très grande partie de son électorat, de tout accord avec les nationaux pour faire échec à l’élection d’un président de Conseil départemental socialiste : « nous devons refuser toute alliance avec le Front National ». Porteur d’un discours d’enfumage plus droitier, Nicolas Sarkozy fait lui aussi le pari d’une victoire en 2017 qui passerait par la neutralisation de l’UDI voire du MoDem. Une petite nébuleuse centriste à qui l’on donne(rait) et promet(trait) quelques postes, fiefs électoraux et maroquins en échange d’une non candidature à la présidentielle. Dans le cas inverse, cela pourrait rendre très problématique la qualification du « champion de l’UMP pour le second tour…
L’UMP, comme avant elle le RPR, s’accommode parfaitement de son jeu de duettistes avec le PS. Le partenaire indispensable de la pièce de théâtre jouée depuis quarante ans pour faire croire que l’alternance politique droite -gauche correspond à une réalité, alors que les orientations politiques, idéologiques dé fendues une fois au pouvoir, restent globalement les mêmes.
C’est pourtant ce jeu de dupes, ce refus de prendre en compte les aspirations identitaires, sécuritaires, protectionnistes au sens large, des Français, qui conduit aujourd’hui une large fraction des électeurs de droite à réclamer une inflexion nationale dans les assemblées d’élus, à la tête de l’Etat.
Chiraquien historique, mais néanmoins homme de conviction appartenant à la droite des valeurs, aux analyses et réflexions souvent pertinentes, en tout cas régulièrement partagées par Bruno Gollnisch, Denis Tillinac était interrogé ce début de semaine sur le site Atlantico.
Il y affirme qu’il existe certes « une frontière politique et stratégique » entre la droite classique et l’opposition nationale puisque dit-il, « Marine Le Pen veut la peau de l’UMP et Sarkozy veut la peau du FN. Ce sont des questions de pouvoir ». Pour autant, « la porosité que les observateurs remarquent entre les deux électorats est une évidence ». Si « Marine Le Pen réussit son pari, elle montra à 40% et marginalisera l’UMP. Sur la durée, on peut envisager la disparition totale (du FN ou de l’UMP). Peut-être sous la forme d’un suicide ».
Au-delà de cette hypothèse prospective, M. Tillinac, questionné sur la charte proposée aux élus UMP par le FN dans le cadre de l’élection des présidents de conseils départementaux (voir notre article publié lundi), souligne qu’ « Il y a un minimum de connivence entre les deux électorats (UMP et FN, NDLR). C’est un phénomène que Sarkozy, en qualité de président de l’UMP, devrait prendre en considération. »
« L’UMP doit avoir l’intelligence de ne pas se laisser piéger pour faire plaisir à trois journalistes de gauche indignés qui dénonceront une alliance avec le fascisme. Son électorat est plus près du FN que du PS. D’un autre côté, l’électorat FN préfère voter, à tout prendre, pour l’UMP plutôt que pour le PS. C’est une réalité fondamentale ».
Aussi, Denis Tillinac « ne trouve pas que ce soit une bonne idée de définir le FN comme un ennemi privilégié. C’est un adversaire, au même titre que le PS. Nous sommes dans un faux ni-ni. On menace d’exclusion immédiate quelqu’un qui ferait le moindre accord avec le FN. Or, lors des législatives partielles du Doubs, Juppé et NKM ont appelé à voter socialiste contre le FN – rompant alors le ni-ni. Je n’ai pas entendu dire qu’ils étaient exclus. Faire du FN son ennemi politique héréditaire est suicidaire pour l’UMP ». Bref, « l’UMP », qui « n’a pas dit un mot sur les deux thèmes qui font prospérer le FN : la question des flux migratoires et la question de l’Europe », ne doit pas «tomber dans ce panneau grossier » (de la diabolisation)».
D’autant, que « la thèse de l’UMPS a déjà été accréditée par l’élection de Jean-Claude Juncker à la tête de la Commission européenne par le PS et l’UMP. Si on laisse entendre que l’UMP, à tout prendre, préfère le PS à l’UMP, surtout dans un pays ou 40% de l’électorat récuse le système violemment, c’est très dangereux ».
Ce qui est tout aussi dangereux pour le Système en place, c’est de continuer à insulter l’intelligence des Français comme l’a fait de manière assez sidérante le politologue de gauche Thomas Guénolé hier sur slate.fr.
Il y affirme que Laurent Ruquier a eu raison de faire son mea culpa en s’accusant d’avoir contribué pendant cinq ans, dans son émission sur France 2, à « la propagation », « la banalisation et le succès de ses thèses » en donnant la parole à Eric Zemmour. Une opinion qui peut se discuter, même si les livres éventuels que pondraient son successeur dans cette même émission, Aymeric Caron, ne rencontreraient certainement pas la même audience. Plus prosaïquement, les livres de Zemmour ont du succès tout simplement parce que la petite musique qui y résonne, la vision du monde qui y est exposée, trouvent un écho dans les inquiétudes et le ressenti du peuple de droite.
M. Guénolé répond encore par l’affirmative à la question de savoir, si « plus largement », « les médias de masse ont une part de responsabilité dans le succès croissant du FN, dont les thèses sont les mêmes que celles d’Eric Zemmour sur l’économie comme sur les valeurs ». « À force de matraquage médiatique de reportages, d’articles et d’interviews en feu roulant, avec pour angle répétitif la-montée-du-FN-la-dédiabolisation-du-FN-la-transformation-du-FN, écrit-il, les médias ont une part de responsabilité dans les succès électoraux croissants de ce parti ».
« L’on pourrait objecter que les médias ont un devoir d’information, de pluralisme (…) mais ce n’est pas le problème » poursuit-il. « Le problème, c’est la disproportion. Dans le cas d’Eric Zemmour, il est flagrant que les tenants de thèses opposées aux siennes sur les sujets qu’il aborde sont actuellement sous-représentés dans les médias. Et dans le cas du FN, les élections départementales sont un cas d’école d’omniprésence d’un thème et d’un seul, sensationnaliste, au détriment colossalement disproportionné de tous les autres angles et sujets possibles ».
Certes, il n’existe plus à gauche depuis longtemps, de grandes figures intellectuelles, populaires, vendant des livres, engagées sur le terrain (méta)politique. Julien Dray en faisait l’aveu dimanche soir, évoquant Gramsci et sa thèse sur les conquêtes culturelles qui précédent toujours les victoires politiques. Mais asséner comme le fait M. Guénolé que les thèses frontistes sont surreprésentées dans les médias ne résiste pas une seconde à un examen un peu sérieux souligne Bruno Gollnisch.
C’est bien au contraire l’idéologie de la caste UMPS et leurs affidés, celle du vivre-ensemble multiculturaliste, de l’européisme-et- mondialisation-chance-pour-la-France qui est ultra-dominante au sein du quatrième pouvoir. Cette idéologie là correspond à la sensibilité de l’écrasante majorité des faiseurs d’opinion, des journalistes de gauche, exemples emblématiques de ces « mutins de panurge » décrit par feu Philippe Murray ; idéologie qui est le trait d’union, le point commun, à quelques nuances prés, des grands groupes financiers qui contrôlent les principaux médias.
C’est d’ailleurs parce que MM. Sarkozy, Juppé, NKM, Le Maire, Wauquiez, Bertrand, tous les grands pontes qui donnent le la au sein de l’UMP, sont les purs produits de cette idéologie dominante qu’ils préféreront toujours s’entendre sur avec leurs alter ego de gauche. Dirigeants de l’UMP que nous ne confondons pas avec leurs électeurs régulièrement cocufiés, abusés, méprisés. Ni même d’ailleurs avec certains cadres et élus locaux de l’UMP qui nous confient sous le sceau de la confidence qu’ils partagent avec le FN les mêmes valeurs.
Démagogos dit
Espérons que ces « valeurs » ne soient pas le « fervent pétainisme » dont a parlé JMLP ce matin… Personnellement, j’ai vraiment hâte que vous nous expliquiez cette dernière sortie du « président d’honneur »…
Modérateur dit
Relisez nos articles consacrés aux valeurs, aux grandes figures de notre courant de pensée » Démagogos » et vous aurez la réponse à votre (étrange) question! Cordialement; gollnisch.com
Démagogos dit
C’est fait, je n’ai pas trouvé Pétain (personnage assez singulier, vous me l’accorderez peut-être ?)…
Si vous me le permettez, ce qui est étrange, c’est surtout de voir la réalité rejoindre tranquillement la caricature, comme hier matin…
Modérateur dit
Vous avez mal cherché « démagogos », rien de plus facile avec notre moteur de recherche par mot clé. Pour le reste vous êtes sibyllin dans vos propos…et ça ne date pas d’hier matin! gollnisch.com
Démagogos dit
Vous trouvez ? J’essaie simplement d’être courtois, mais je peux aussi être plus direct ! Vous êtes bien au courant que JMLP a dit à Jean-Jacques Bourdin qu’il y avait « de tout » au Front National : « des fervents gaullistes, des fervents pétainistes, des fervents patriotes » ? L’article intitulé « le Front National, c’est quoi ? » où vous listez vos références ne l’évoque pourtant pas du tout. Après une vérification plus large, il semble que vous respectiez sa carrière militaire, pas politique… Donc le terme « pétainiste » (dont par ailleurs vous semblez vous plaindre à longueur de temps comme d’une caricature) ne s’applique pas… Dans ce cas, pourquoi (laisser) mélanger les torchons et les serviettes ? C’est assez hypocrite de se plaindre de la violence d’autrui quand on tend le bâton pour se faire battre…
Modérateur dit
On peut être « direct » tout en restant courtois, votre courriel en est l’illustration « Démagogos »! L’article auquel vous faites référence apporte effectivement la réponse à votre question…clairement et directement. Quant au « gaullisme » et au « pétainisme » , leurs faces d’ombre respectives, nous en avons aussi parlé incidemment sur ce blogue. Dans les faits, il est toujours trés compliqué d’évoquer cette période troublée en évitant l’écueil du manichéisme, et rappeler un certain nombre de vérités historiques, loin des dogmes officiels, a souvent pour conséquence l’inéluctable procés en sorcellerie. Eric Zemmour, par exemple, a pu notamment le constater à l’occasion de la sortie de son dernier livre…Aurait-il tendu le bâton pour se faire battre? Après tout peut-être…gollnisch.com
Démagogos dit
La différence, c’est que Zemmour connait ses « -isme »… et le sens du mot « détail » ! Pardon, mais si JMLP est si cultivé qu’on le dit, il serait bon qu’il ouvre son dictionnaire au moins une fois tous les trente ans ! Cet à-peu-près inquiétant, blessant, et récurrent fait vraiment « Taubira de droite », comme le fait justement remarquer Gilbert Collard… Et c’est très mauvais, aussi bien politiquement que moralement…
Modérateur dit
Le probléme n’est vraiment pas d’ordre sémantique « Démagogos », JMLP maîtrise parfaitement la langue française et ses subtilités, au moins aussi bien qu’Eric Zemmour et Gilbert Collard…gollnisch.com
Démagogos dit
Je ne vais pas vous embêter plus longtemps sur ce sujet, mais franchement, au vu de ses résultats politiques (notamment en 2002), il est permis d’en douter…
Modérateur dit
Vous ne nous embêtez pas « Démagogos » mais l’exemple de 2002 que vous prenez est plutôt mal choisi parce que c’est justement l’année ou JMLP a réussi à se hisser au second tour de la présidentielle au terme d’une belle campagne dont Bruno Gollnisch était d’ailleurs le directeur. C’est justement en privant JMLP, de manière totalitaire, pendant les quinze jours qui ont suivi, de toute possibilité de parole, en le noyant sous une avalanche de récriminations (Chirac refusant notamment le débat traditionnel entre les deux finalistes) que le Systéme a triomphé de manière écrasante. gollnisch.com
Démagogos dit
Dans ce cas : tout le monde sait que que le FN était bon troisième mais qu’il a profité des divisions de la gauche (incarnées par… Christiane Taubira). Je ne dis pas ça pour rabaisser votre campagne, ni pour justifier l’attitude scandaleuse de Chirac durant l’entre-deux-tours, mais il y a fort à parier que si JMLP avait tenu les mêmes paroles dans ce débat que devant Bourdin ou Rivarol, le résultat aurait même pu être pire… En ce qui me concerne, j’en suis navré, mais j’aurais très sûrement voté Chirac.
Modérateur dit
Vous refaites le match « Démagogos » ce que tout le monde a constaté c’est que JMLP était second et non troisiéme et au petit jeu des prospectives, il aurait peut être même été premier sans la candidature Mégret… Au regard de la calamité politique qui caractérisa la présidence Chirac, il est surtout très étonnant qu’il ait pu se qualifier pour le second tour en 2002… Mais bon ce qui est certain, au delà du charisme de JMLP hier et de celui de Marine aujourd’hui c’est que ce sont les fondamentaux portés par le FN qui sont la cause de son émergence, puis de sa croissance électorale actuelle; gollnisch.com