Le site du quotidien Le Monde est revenu hier sur le refus de Nigel Farage, chef du Parti (eurosceptique) pour l’indépendance du Royaume-Uni (UKIP), d’accepter la main que lui tendait Marine Le Pen pour former un groupe au Parlement européen. En guise de justification, et pour bien signifier que sa décision était irrévocable, M. Farage n’a pas hésité à manier la violence verbale en affirmant que « l’antisémitisme est dans l’ADN du (Front National)», rapporte la journaliste Elvire Camus. Elle note aussi que «sa réponse négative lui a valu les moqueries de Marine Le Pen qui se demande en effet pourquoi Nigel Farage a préféré s’allier au parti gaulliste de Nicolas Dupont-Aignan, Debout la République (DLR), qui fait des scores de 1% en France». Le 13 avril M. Farage était en effet présent, devant quelques centaines de fidèles de M Dupont-Aignan, à la réunion publique de lancement de campagne des européennes de DLR.
Dans son compte-rendu de cette réunion, Libération relayait la justification habituelle du leader de l’UKIP : «Nous devons être justes: Marine Le Pen a fait beaucoup de progrès. Mais étant donné l’histoire du FN, ce n’est pas un parti avec lequel nous voulons nous allier. Et si vous regardez son programme économique, c’est tellement à gauche, c’est incroyable!». A contrario a-t-il dit à la tribune, « Je crois en Nicolas Dupont-Aignan, en Debout la République, un parti politique respectable, modéré, qui est sur la même ligne eurosceptique.»
Ni respectable, ni modéré pour M. Farage, le FN n’en est pourtant pas moins aux yeux de nos compatriotes le porte-parole naturel du camp national, patriotique et souverainiste. Et concrètement, «le tribun de l’UKIP risque au final de ne s’allier… avec personne en France ». Car crédité de 1,5% des intentions de vote dans le sondage IFOP paru la semaine dernière qui place les listes FN en tête avec une moyenne de 24% des suffrages, « Nicolas Dupont-Aignan a pour l’instant peu d’espoir d’avoir des élus au Parlement de Strasbourg (…). M. Dupont-Aignan espérait rallier Jean-Pierre Chevènement ou Philippe de Villiers à ses listes mais ceux-ci n’ont toujours pas dit oui, ce qui met à mal l’unité des patriotes de gauche et de droite qu’il appelait de ses vœux ».
La notion de vote utile, devrait de surcroît décider tout électeur souverainiste conséquent à ne pas stériliser sa voix en portant son vote sur les listes de M. Dupont-Aignan – les listes DLR avaient obtenu 1,77% des voix en 2009– qui en toute probabilité n’enverront pas d’élus au parlement. Seuls les députés FN pourront donc mener la bataille contre le parti bruxellois et notamment sur les deux dossiers brûlants des prochains mois: la PAC et l’accord de libre-échange transatlantique (le fameux «Grand marché transatlantique »), actuellement en négociation entre l’Union européenne et les Etats-Unis. Ceux-ci sont d‘ailleurs les deux grands axes de la campagne européenne du Front National.
Marine Le Pen a eu l’occasion de la rappeler aujourd’hui à Paris lors de la présentation aux médias des têtes de listes européennes du FN, en présence des intéressés et de Bruno Gollnisch qui figure en troisième position dans le Sud-Est: elle même dans la circonscription Nord, le président d’honneur Jean-Marie Le Pen (Sud-Est), les vice-présidents Louis Aliot (Sud-Ouest) et Florian Philippot (Est), Aymeric Chauprade (Ile-de-France), Gilles Lebreton (Ouest), Bernard Monot (Centre-massif Central).
Samedi, lors de son déplacement à Brive (Corrèze) pour y soutenir Bernard Monot, la présidente du FN a aussi répondu à tous ceux qui doutent de la possibilité et/ou de l’efficacité d’une coalition de partis nationaux et patriotiques au Parlement européen. Bruno Gollnisch en parle d’expérience, ce n’est certes jamais chose aisée et nécessite patience et diplomatie. La présidente du FN a fait part des discussions en cours avec les Autrichiens du FPÖ, les Italiens de la Ligue du Nord, les Néerlandais du Parti de la Liberté (PVV).
Formations avec lesquelles nous avons il est vrai des divergences parfois assez grandes mais avec qui« nous avons aussi une cohérence sur les problèmes de l’Union européenne, ce qui n’est pas la cas pour les autres groupes où il n’y a même pas de cohérence de vote !».
Des divergences il y en avait aussi entre les participants à la manifestation organisée contre la venue de Marine et de Bernard Monot à Brive, contre le « néo-populisme européen » (sic). Les sympathisants du PS, dont le candidat élu à la dernière présidentielle partage les mêmes vues européistes qu’un Bayrou et qu’un Sarkozy, défilaient aux côtés des contempteurs de l’Europe libérale du PC et du Front de Gauche. Mais dans les faits, la détestation profonde de l’alternative portée par l’opposition nationale, populaire et sociale, génère des alliances qui ne sont aberrantes qu’en surface. Entre les altermondialistes d’extrême gauche et les mondialistes socialo-libéraux, deux faces de la même médaille antinationale, existent une différence de degrés et non de nature.
C’est pourquoi il est à l’inverse particulièrement condamnable que des défenseurs autoproclamés des souverainetés nationales, de l’Europe des patries, par peur, soumission au politiquement correct ou calculs boutiquiers à courte vue, trouvent toujours des bonnes (mauvaises) raisons pour ne pas s’allier, même avec le FN. Si leurs convictions patriotiques sont sincères, quelles illusions sur le Système et ses mensonges qu’ils disent combattre bercent encore un Dupont-Aignan ou un Farage ?
Laissons en cette circonstance le mot de la fin à Shakespeare : « le monde est sans cesse séduit par la beauté de la forme. En justice, quelle cause est assez noire, assez criminelle pour qu’en se parant d’une voix agréable, elle ne puisse dissimuler l’apparence même du mal ? En religion, quelle erreur assez damnable, qu’un front sérieux ne puisse exalter et prouver par un texte qui en cachera la grossièreté sous une belle parure ? Il n’y a pas de vice si franc qui n’assume la marque extérieure de quelque vertu »…
Erik dit
Les observateurs attentifs de la vie politique française savaient de longue date que Mr Dupont-Aignan était un nationaliste d’opérette, on découvre désormais que Mr Farage est lui aussi un histrion du même type…
A.F dit
Globalement, le positionnement de Dupont-Aignan c’est d’être le FN à la place du FN en disant du mal du FN. A part ça, il n’y a rien.