Dans un article publié sur le site Boulevard Voltaire le 21 octobre, Me Frédéric Pichon apportait son soutien à la candidature de Karim Ouchikh à la présidence du SIEL, appelant au combat nécessaire contre « le projet transatlantique (TAFTA) », « l’œuvre de destruction massive de la souveraineté des peuples et des États au profit de l’Union européenne, marchepied d’un gouvernement mondial et des multinationales».
« La droite à laquelle j’adhère écrivait-il – si du moins ce mot a encore un sens – devra impérativement associer les impératifs d’identité, de souveraineté et d’écologie humaine. Loin de s’opposer, ces notions sont complémentaires (…)».
Me Pichon soulignait encore avoir été « touché » «par (les) qualités humaines » de Karim Ouchikh, « par son parcours, notamment sa conversion au christianisme, et sa vision de la France charnelle et enracinée si chère à Péguy ».
C’est une autre conversion, mais inverse celle-là, qui agite cependant le landerneau médiatique ces derniers jours, en l’occurrence celle de Maxence Buttey, 22 ans, conseiller municipal Front national à Noisy-le-Grand (Seine-Saint-Denis).
Il explique dans Le Parisien «s’être converti à l’islam (en juillet) , après avoir été longtemps catholique». «J’ai découvert cette religion grâce à un camarade de classe, sur les bancs de la fac de médecine à 19 ans». «Nous avons beaucoup parlé, et j’ai été amené à m’interroger. J’étais catholique mais, en relisant la Bible, je me suis aperçu de toutes les incohérences. En lisant le Coran de manière approfondie, j’ai compris que cette religion est plus ouverte. Et d’ajouter : Je ne sais pas trop comment ça va être pris, car tout le monde n’est pas forcément au courant » .
Le jeune homme cherche encore à justifier sa conversion en cherchant des points de convergences entre la religion musulmane et le FN : «Les deux sont diabolisés et très éloignés de l’image que les médias en donnent. Comme l’islam, le FN défend le plus faible. Le parti dénonce les taux d’intérêt exorbitants de la dette de notre pays. Et l’islam est contre la pratique de l’usure. »
« Bien sûr que certains de mes électeurs seront déçus par mes choix, dit-il dans Le Parisien . Mais je suis prêt à leur expliquer que l’islam a vocation à réunir tous les hommes et les femmes . Maxence est pour un islam modéré et déclare qu’il est contre le niqab et contre l’exclusion, loin du courant qui appelle à couper des têtes comme le pratique l’organisation État islamique». Le Parisien relève néanmoins que le jeune homme a du mal à croire en la version officielle d’événements comme les attentats du 11 septembre 2001 ou l’affaire Merah ». Certes, mais nous en connaissons d’autres dans le même cas qui ne sont pas pour autant musulmans.
Et qui n’appartiennent pas non plus à l’extrême-droite pro arabe et antisioniste. Dans les années 70-80 quelques figures de la droite radicale italienne, tiers-mondiste et néo-païenne, séduits par le courant révolutionnaire islamique, se convertirent ainsi à l’islam. Par rejet d’un judéo-christianisme décadent et de l’impérialisme américano-sioniste. L’exemple le plus frappant est certainement celui du brillant universitaire parmesan Claudio Mutti, alias Omar Amin depuis 1977, qui affirme trouver dans la religion du prophète une authentique filiation et réceptacle de ses valeurs et idéaux indo-européens… . Mais le jeune militant frontiste dont il est question ici ne relève certainement pas de cette filiation idéologique là.
Dans une vidéo envoyée récemment à «une dizaine» de cadres lors d’un échange de courriels, Maxence Buttey a voulu a-t-il dit, « sans prosélytisme », «face à l’incompréhension sur (son) choix, (s’)expliquer, montrer une autre image de cette religion ».
Ladite vidéo, assimilée pourtant bel et bien à du prosélytisme religieux, lui vaut aujourd’hui une suspension de ses responsabilités. « Nous avons su qu’apparemment, Maxence Buttey partageait des vidéos dans l’optique de convaincre son entourage et des adhérents », explique Jordan Bardella, secrétaire départemental du FN en Seine-Saint-Denis, dans un entretien à RTL.
Interrogé au sujet du cas Buttey sur France 3 Ile-de-France, Gaëtan Dussausaye, nouveau directeur du FNJ, a affirmé : «nous voulons une France laïque. Il faut qu’on commence avec nous-mêmes à respecter ce principe là. Ne pas confondre la politique et le religieux ». Et nous le confondons d’autant moins sous nos latitudes que la religion chrétienne sépare le domaine temporel du domaine spirituel.
Le Vice-président du FN, Florian Philippot, penche lui aussi pour « un comportement prosélyte dans l’enceinte du parti » de la part de Maxence Buttey. « Sa religion n’est pas l’affaire du parti car nous défendons la laïcité. Mais là, on a quitté le domaine de la conviction personnelle et de la foi. Un parti politique n’est pas le lieu pour cela ». « Une commission des conflits se réunira fin novembre pour faire la transparence afin que chacun puisse s’exprimer ». « Pour l’instant, on a besoin d’étudier le dossier, de regarder les choses concrètement…. Ca peut aller jusqu’à l’exclusion bien sûr. S’il est avéré qu’il y a eu du prosélytisme au sein du Front National avec des fichiers du Front National, alors ce n’est pas acceptable quelque soit la religion d’ailleurs.»
Florian est dans son rôle en rappelant la « règle de base ». Mais dans les faits, nous pouvons aussi légitimement penser que si le jeune Buttey avait envoyé aux cadres de son département une vidéo de son baptême tardif ou vantant les évangiles, les écrits de Saint Augustin, de Bossuet ou de Charles de Foucauld, la commission des conflits du FN ne se serait certainement pas réunie…
Frédéric Pichon l’écrivait aussi dans son article cité plus haut, « la France n’est pas un gigantesque terrain vague ni un supermarché de consommateurs de la World Company mais une réalité charnelle, culturelle, historique et spirituelle. Si elle est laïque, elle ne peut se comprendre sans se référer à ses racines grecques, romaines et chrétiennes. Comme le disait Péguy, chez nous en France, la politique va toujours de pair avec la mystique ».
Car ce n’est pas tant en effet une France laïque que nous voulons qu’une France qui reste française et l’identité helléno-chrétienne de notre civilisation est consubstantielle à celle de la France. C’est pourquoi il est toujours terriblement déstabilisant dans un contexte d’immigration de peuplement, d’attaques tous azimuts contre nos repères civilisationnels, notamment pour la grande masse des Français, et a fortiori de nos adhérents, sympathisants et électeurs, de voir un militant FN de souche, abjurer sa foi autochtone pour se convertir à une religion allogène.
Certes, mais le cas de figure est différent, la charge symbolique n’est pas du tout la même, cela n’empêche pas que des Français de confession musulmane aient toujours milité au FN. Nous pensons notamment aux harkis, mais pas seulement. Bruno Gollnisch est aussi de ceux qui pensent qu’il existe bien évidemment des musulmans modérés, Français respectables à part entière, si ce n’est un islam du juste milieu.
Ne nous y trompons pas, Bruno Gollnisch l’affirme aussi, les Français ne nous pardonneraient pas tout recul dans la défense de l’identité française. Selon le sondage Ifop-Valeurs actuelles publié dans le dernier numéro de ce magazine, nos compatriotes approuvent ainsi massivement les propos d’Eric Zemmour même si le polémiste « bénéficie, relève Jérôme Fourquet, d’une adhésion nettement supérieure parmi les classes populaires qu’au sein des classes aisées ».
Ainsi 62 % des Français estiment comme lui que « la nation française se dissout dans l’Europe, la mondialisation, l’immigration et le multiculturalisme » (plus des deux tiers à droite et près de la moitié à gauche, dont… 53 % chez les sympathisants d’EELV). Sur l’incompatibilité de l’islam avec la République, ils sont encore près de 6 Français sur 10 (dont 38 % à gauche) à l’approuver.
Nous le voyons, si la question de l’islam est toujours un sujet délicat et complexe -voir notre article en date du 30 septembre dernier- nos compatriotes sont aussi en pleine crise de foi…mais vis-à-vis d’un Système qui fait et prône l’inverse de leurs aspirations identitaires légitimes. Et cette crise là est aussi bénéfique que nécessaire car elle est un jalon sur la route de l’indispensable recomposition politique que nous appelons de nos voeux.