Si, pour les juges, Dominique Strauss-Kahn savait que des prostituées participaient aux soirées où il était présent – il a été mis en examen hier pour proxénétisme aggravé en bande organisée en marge de l’affaire du Carlton de Lille- ses amis François Hollande et Jean-Luc Mélenchon savent aussi que cette élection présidentielle peut réserver de mauvaises surprises…dans les urnes. selon le sondage Ipsos publié ce mardi pour France Télévisions, Radio France et Le Monde, le candidat socialiste recueille 28% d’intentions de vote pour le premier tour de la présidentielle, contre 31,5% fin février. Il ne devance plus Nicolas Sarkozy que d’un demi-point. Pour Mélenchon et son entourage aussi c’est la douche froide. Certes il assèche totalement les intentions de vote en faveur des autres candidats d’extrême gauche et cette enquête enregistre une progression d’un point et demi en sa faveur. Mais il reste en quatrième position, trois points derrière Marine Le Pen, la candidate du FN étant créditée de 16% des suffrages (+ 1 point), certainement bien plus…. François Bayrou clôture la liste des candidats dépassant un score à deux chiffres (11,5%, -1,5 point).
Certes, les événements récents devraient légitimer aux yeux des Français les avertissements du FN et favoriser la dynamique de campagne de Marine, mais nous pouvons cependant compter sur Nicolas Sarkozy pour tenter d’en tirer profit avec sa duplicité coutumière. Il ya trois ans déjà, Francis Choisel publiait un article dans Les quatre vérités (7 avril 2009) qui mettait très clairement en lumière « la botte secrète par laquelle Nicolas Sarkozy triomphe de tous ses adversaires. Elle est pourtant d’une simplicité extrême, comme toutes les bonnes recettes. »
« Chez lui, explique-t-il, les mots et les actes mènent leur vie propre, séparément, sans jamais influer les uns sur les autres (…). Appelons cela la technique du pile et face. Le calcul est simple : il y a ceux à qui les mots suffisent ; et ceux qui veulent des actes. Aux uns, côté face, il prodigue des discours ; aux autres, côté pile, plus discrètement, il offre les faits. Simultanément. »
« Là est sa botte secrète : dans la simultanéité de la contradiction entre les paroles et les actes. Ainsi, ce qui était clairement un reniement chez ses prédécesseurs apparaît chez lui comme une synthèse, un dépassement des clivages. Chacun est satisfait – du moins pour un temps, car il n’y a pas synthèse mais supercherie : discours populiste pour le bon peuple, politique de pensée unique pour les élites ; discours de droite quand la mesure est de gauche, discours de gauche quand la mesure est de droite. L’un équilibre l’autre. Le discours camoufle l’action ; il est, au sens militaire du terme, un leurre.Sarkozy a expérimenté la formule au ministère de l’Intérieur en accouplant abolition de la pseudo double peine pour satisfaire la gauche bien-pensante et discours musclé contre la racaille à usage de Monsieur Toutlemonde (…) ».
.Et l’auteur de cet article de prendre comme exemple, « celui de la politique européenne ». « Pendant sa campagne, Sarkozy morigène la Banque centrale européenne, accuse l’euro, annonce qu’il faut entendre le message des nonistes – voilà pour les mots – et il annonce un mini-traité qu’il ne sera point besoin de ratifier par référendum – voilà pour le concret. Les souverainistes entendent traité au lieu de constitution, mini comme synonyme de au rabais . Ils sont satisfaits. Les européistes comprennent qu’il s’agit de resservir la Constitution giscardienne sous une autre forme. Satisfaits eux aussi, ils laissent dire. On voit là que la technique du pile et face fonctionne même en campagne.
Une fois Sarkozy élu, le traité se fait, sans référendum, comme annoncé, et il reprend toute la Constitution européenne rejetée, sauf les mots qui fâchent – toujours les mots puisque les naïfs y accordent de l’importance. Dans le même temps, Henri Guaino rédige toujours les discours présidentiels, qu’il alimente en remontrances contre Bruxelles et Maastricht ; et Sarkozy les prononce avec la même conviction ( …) »Parfois, il est vrai, les actes de Sarkozy ne contredisent pas ses paroles, mais ils sont largement en retrait, ou il ne se passe rien. La technique est la même. Moins il en fait concrètement, plus il crie fort sa volonté d’agir… »
Cette grille de lecture de la geste sarkozyste note Bruno Gollnisch, n’a cessé de se vérifier depuis le début du quinquennat. Il est évident que si elle était perçue aussi clairement par le peuple de droite dans les quatre semaines à venir, la parade serait vite trouvée…
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Sandras dit
Cette explication de la manière Sarkozy est lumineuse.
Elle peut se résumer ainsi « Jamais, un chef de l’État n’a poussé aussi loin la malhonnêteté intellectuelle » (malhonnêteté intellectuelle, sans préjudice de ce qu’il y aurait à dire de ce qu’on apprend, par exemple, du côté de la mise en examen de Philippe de Maistre.)
Quand cette malhonnêteté intellectuelle confine au manquement aux devoirs de sa charge, comme par exemple en ne tenant pas compte de la volonté populaire clairement exprimée, je ne sais comment la qualifier mais je sais que cela s’appelait (avant que le mot ait été effacé dans le code pénal) une forfaiture.
Plaise à Dieu que les écailles tombent enfin des yeux des Français et qu’ils voient.
En tout cas, si grande que soit la détestation qu’on peut avoir de tout ce qui se trouve derrière les candidats de gauche, il faut combattre l’idée que Sarkozy serait un moindre mal qu’eux.
Bernard Sandras