Le 9 septembre, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov et le secrétaire d’État américain John Kerry avaient trouvé un accord sur un plan de règlement du conflit syrien et une trêve des combats… vite remise en cause par de multiples violations du cessez-le-feu. La reprise des hostilités par le régime syrien, ses alliés russes et iraniens pour reprendre le contrôle de la ville d’Alep aura eu raison de cet accord. Hier, le porte-parole du département d’État, John Kirby, a déclaré que les États-Unis suspendaient leur participation aux discussions bilatérales avec la Russie lancées pour garantir le cessez-le-feu, les Russes étant accusés d’avoir bombardé et détruit le plus grand hôpital d’Alep-Est. Moscou a assuré peu après «regretter» cette décision des Etats-Unis. S’il est reproché aux Russes de ne pas faire de différence de «traitement» sur le terrain entre rebelles dits modérés et djihadistes, le ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov à retourné le compliment aux Américains ces dernières semaines. Il a pointé leur incapacité à séparer le bon gain de l’ivraie, en l’espèce les groupes de combattants «raisonnables», minoritaires par rapport aux miliciens de la branche syrienne d’Al-Qaïda (Front Fateh al-Cham, ex Front al-Nosra) qui se servent à Alep des civils comme boucliers humains et les empêchent de fuir.
Jordan Shilton sur le site WSWS, le 29 septembre le rappelait, «al-Nosra a été accusé d’atrocités répétées. En juillet, Amnesty International a indiqué que le groupe avait procédé à une vague d’enlèvements, de tortures et d’exécutions sommaires dans les provinces d’Idlib et d’Alep. D’autres groupes rebelles impliqués dans des crimes de guerre comprennent Ahrar al-Sham, Mureddin Zinki, le Front du Levant et la Division 16, dont certains sont soutenus directement par les États-Unis.»
Entendons-nous bien, Bruno Gollnisch n’a jamais prétendu que le régime Syrien et son président étaient exemplaires, sans tâches et sans reproches. Mais la volonté de diaboliser Damas et ses alliés, qui s’apparente aussi comme une diversion des «occidentaux» pour occulter leurs propres turpitudes, ne doit pas occulter une réalité géopolitique autrement plus complexe.
Sur le site arretsurinfo.ch, l’analyste politique Guillaume Borel relayait l’entretien accordé au journal allemand Kölner Stadtanzeiger (publié le 26 septembre) d’Abou al-Ezz, un des chefs du Front al-Nosra-Front Fateh al-Cham à Alep. «Cette interview confirme un certain nombre d’analyses qui circulaient dans les médias indépendants, notamment en ce qui concerne la collaboration opérationnelle entre le Front al-Nosra et la coalition internationale, mais également la responsabilité des groupes djihadistes dans la crise humanitaire actuelle», en empêchant notamment l’acheminement des convois humanitaires. «Les déclarations Abou al-Ezz viennent ainsi confirmer une nouvelle fois la fiction de l’existence d’une rébellion modérée. Selon lui, al-Nosra est soutenu militairement par différents pays de la coalition, dont la Turquie et les Etats-Unis.»
En février 2016, poursuit M. Borrel, «un reportage de la chaîne France 2 intitulé Syrie le grand aveuglement réalisé parmi les groupes djihadistes d’Alep, montrait clairement la logique salafiste à l’œuvre dans les différents groupes djihadistes ainsi que la porosité entre les différentes factions de combattants se revendiquant toutes de la même idéologie. »
Manlio Dinucci dans un article publié fin septembre dans le journal italien il manifesto, souligne pour sa part les «Opérations psychologiques» (psyop ) menées par les services secrets états-uniens, des «opérations planifiées pour influencer à travers des informations déterminées, les émotions et motivations et donc le comportement de l’opinion publique, d’organisations et de gouvernements étrangers, afin d’induire ou renforcer des attitudes favorables aux objectifs préfixés». «Après cinq années pendant lesquelles on a cherché à démolir l’Etat syrien, en le démantelant de l’intérieur par des groupes terroristes armés et infiltrés de l’extérieur et en provoquant plus de 250 000 morts, maintenant que l’opération militaire est en train d’échouer on lance l’opération psychologique pour faire apparaître comme agresseurs le gouvernement et tous ces Syriens qui résistent à l’agression. Fer de lance de la psyop : la diabolisation du président Assad (comme auparavant Milosevic et Kadhafi), présenté comme un dictateur sadique qui prend plaisir à bombarder des hôpitaux et à exterminer des enfants, avec l’aide de son ami Poutine (dépeint comme un néo-tsar de l’empire russe renaissant de ses cendres)».
Manlio Dinucci cite a contrario des documents accréditant la thèse d’accointances entre les Etats-Unis et des djihadistes. «Par exemple, le document officiel de l’Agence de renseignement du Pentagone, daté du 12 août 2012 (déclassifié le 18 mai 2015 grâce à l’initiative de Judicial Watch ) : il rapporte que les pays occidentaux, les Etats du Golfe et la Turquie soutiennent en Syrie les forces d’opposition pour établir une principauté salafiste en Syrie orientale, chose voulue par les puissances qui soutiennent l’opposition afin de d’isoler le régime syrien».
«Cela explique aussi pourquoi le président Obama autorise secrètement en 2013 l’opération Timber Sycamore conduite par la CIA et financée par Ryad avec des millions de dollars, pour armer et entraîner les rebelles à infiltrer en Syrie (voir le New York Times du 24 janvier 2016). Une autre documentation se trouve dans les emails de Hillary Clinton (déclassifiés number case F-2014-20439, Doc N° C057944983), où, en habit de secrétaire d’état, elle écrit en décembre 2012 que, étant donné la relation stratégique Iran-Syrie, le renversement d’Assad constituerait un immense bénéfice pour Israël, et ferait aussi diminuer la crainte israélienne compréhensible de perdre le monopole nucléaire».
Ces dernières heures, sur la chaîne democracy now, le fondateur de wikileaks, Julian Assange, l’homme qui a révélé l’ampleur de l’espionnage de l’allié américain à notre détriment, indiquait que des courriels d’Hillary Clinton avaient été mis en ligne sur son portail wikileaks.com. M. Assange constate que ceux-ci , datant de l’époque ou elle était responsable de la diplomatie dans le gouvernement Obama, prouvent que la candidate à la Maison blanche a encouragé la vente d’arme à l’Etat islamique en Syrie pour faire tomber le régime de Bachar el Assad.
Le cas de M. Assange, qui paye au prix fort ses révélations, est d’ailleurs emblématique des méthodes des pseudo défenseurs du droit, de la liberté et des droits de l’homme (à géométrie variable). En févier dernier, Bruno Gollnisch condamnait la réclusion forcée de Julian Assange et le scandaleux refus de «l’Europe» de lui accorder l’asile politique, elle qui «laisse entrer sur son territoire des centaines de milliers voir des millions de personnes hâtivement qualifiées de réfugiés politiques».
La crainte du Big Brother, de Washington est hélas la plus forte. Peur, soumission acceptée ou volontaire, compromission subie ou assumée au Nouvel ordre mondial , qui rendent d’autant plus perméables les prescripteurs d’opinions aux opérations de désinformations évoquées plus haut.
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